• Cinq impératifs pour le G20

    Cinq impératifs pour le G20

    Jamie F. Metzl and Zachary Karabell

     


     


    NEW YORK – Les économies de la planète sont de plus en plus interdépendantes mais le nationalisme économique, le protectionnisme, et les comportements opportunistes menacent les liens de confiance et de coopération exigés par une économie réellement globalisée.

    Pour éviter une autre récession, ou pire encore, les dirigeants des vingt nations les plus riches doivent agir avec fermeté lors de leur prochain sommet semi-annuel à Séoul pour définir un ordre du jour élargi qui contribuera à encourager une croissance globale plus équilibrée, plus équitable et plus durable – et garantir la stricte application de ce dispositif.

    Cinq principes devraient guider leur réflexion. Premièrement, même si les différences dans les échanges commerciaux et les politiques économiques doivent être traitées, il faut fermement s’opposer aux intérêts personnels à courte vue. Les excédents excessifs de certains pays et les dettes excessives d’autres, alimentés par des monnaies sous évaluées et la débandade des dépenses publiques, doivent respectivement être jugulés. Les pays doivent s’engager à ne pas interrompre pour des raisons politiques les exportations de ressources naturelles clés, et à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour maintenir et encourager les marchés libres sur la base des principes de réciprocité et de viabilité à long terme.

    Pour ce faire, l’ensemble des acteurs majeurs doivent rester fidèles au principe du libre échange dans le cadre d’un système global juste et équitable, et ils doivent formuler cet engagement de manière respectueuse, ferme et répétée à leurs concitoyens. Les Etats-Unis et la Chine surtout, en tant que les deux plus importantes puissances commerciales mondiales, doivent combattre leurs inclinaisons respectives à élever d’invisibles barrières ou à prendre des mesures de représailles inappropriées à seule fin de calmer l’opinion publique de leurs pays. Toutes les économies devront gérer les bouleversements intérieurs qui peuvent accompagner la libéralisation des marchés.

    Deuxièmement, des efforts nettement plus conséquents doivent être entrepris pour faire avancer les accords commerciaux multilatéraux, particulièrement pour clôturer le cycle de négociations commerciales de Doha. Même si la prolifération d’accords commerciaux bilatéraux partout dans le monde constitue un développement positif, ces accords ne peuvent se faire au dépend d’accords plus globaux, exponentiellement plus bénéfiques pour relancer la croissance globale.

    Troisièmement, dans le contexte d’une économie globale de plus en plus interdépendante, les politiques monétaires et budgétaires des différents pays doivent être bien mieux coordonnées. Le G20 doit s’atteler à un effort bien plus important d’harmonisation des politiques économiques et budgétaires de tous les pays sur tous les continents pour catalyser la croissance globale. Les barrières inutiles contre les flux de capitaux et les investissements directs transnationaux devront être progressivement éliminées au fur et à mesure que les économies se renforceront.

    De la même manière, il faut aussi agir beaucoup plus rapidement vers une appréciation des monnaies impulsées par les marchés partout dans le monde – et pour résoudre le problème d’endettement de nombreux pays développés. Le G20 pourrait aussi jouer un rôle plus important pour développer les compétences des régulateurs dans un environnement globalement interconnecté, et devrait développer un cadre règlementaire accepté par tous et adapté à des marchés financiers évolutifs.

    Quatrièmement, il faut absolument agir pour débloquer l’extraordinaire potentiel humain et économique des 1,4 milliards de personnes vivant dans l’extrême pauvreté et dénués d’opportunités valables. Neuf millions d’enfants meurent chaque année avant leur cinquième anniversaire ; 69 millions d’enfants en âge d’être scolarisés ne le sont pas ; 884 millions de personnes n’ont aucun accès à l’eau potable ; et 2,6 milliards de personnes n’ont pas accès aux installations sanitaires de base.

    Instruire et donner les moyens aux pauvres et aux groupes défavorisés partout dans le monde, y compris aux femmes, n’est pas seulement un impératif moral, c’est aussi l’un des meilleurs investissements pour une croissance durable à long terme que les dirigeants de ce monde peuvent effectuer. Les pays du G20 doivent prendre l’initiative pour que cela arrive.

    Enfin, l’innovation doit être encouragée en tant que générateur de croissance à long terme. Cela suppose d’encourager des investissements plus efficaces dans l’éducation et dans la recherche et le développement, de renforcer la protection intellectuelle, et d’encourager des efforts de collaboration internationale supplémentaires pour permettre de répondre aux défis posés dans les domaines de l’énergie, la protection environnementale, la santé, entre autres.

    La déclaration de principe du 23 octobre des ministres de l’économie du G20 va plutôt dans le bon sens sur un certain nombre de ces questions. Mais les mots des ministres sonneront creux si, tout comme certaines déclarations similaires émises lors de précédents G20 à Londres et Toronto, les états membres ne les traduisent pas en actes.

    Dans la mesure où l’Amérique est moins à même de jouer son rôle de leader dans la gestion de l’économie mondiale, la responsabilité en incombe d’une certaine manière aujourd’hui au G20, avec les Etats-Unis et la Chine au devant de la scène, pour définir un cap de collaboration et de coordination, dans les mots et dans les actes, à même de guider la croissance économique du 21ème siècle.

    Si les dirigeants du G20 n’acceptent pas d’assumer cette responsabilité, et choisissent plutôt la voie du nationalisme économique, l’avenir pourrait devenir bien sombre.

    Jamie Metzl, ancien membre du Conseil de Sécurité Nationale du président Bill Clinton, est vice-président exécutif de la Asia Society.

    Zachary Karabell est le président de RiverTwice Research. Ils ont tous deux été respectivement coordinateur et directeur du projet Asia Society Task Force on Global Economic Rebalancing. (Groupe de travail de la Société Asia sur le rééquilibrage de l’économie globale, ndt)

    Copyright: Project Syndicate, 2010.
    www.project-syndicate.org
    Traduit de l’anglais par Frédérique Destribats

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