La Chine et le FMI d'accord pour mettre en place un système de changes plus équilibré.
Dominique Strauss-Kahn a trouvé moyen de passer deux jours en Chine en même temps que Barack Obama. Les deux voyages n'étaient pas coordonnés et les deux hommes ne se sont nullement rencontrés. Au final, les positions défendues par le Directeur Général du Fonds Monétaire International (FMI) l'ont situé tantôt en soutien des dirigeants américains tantôt du côté des Chinois.
Le 17 novembre, pendant que le chef de la Maison Blanche insiste sans succès auprès de Hu Jintao pour que la Chine laisse le yuan se revaloriser, Dominique Strauss-Kahn a la même conversation avec le vice-Premier ministre Wang Qishang, responsable des questions économiques. Il cherche à le convaincre qu'une monnaie sous-évaluée entraine des distorsions économiques: certes, elle donne un avantage commercial, mais elle défavorise les secteurs d'activités non liés à l'exportation. «Au contraire, une monnaie qui se revalorise redonne du pouvoir d'achat aux ménages et renforce donc la consommation. De plus, les prix des investissements à long terme deviennent plus justes» résume Dominique Strauss-Kahn dans une conférence de presse où il martèle: « la réévaluation du yuan est dans l'intérêt de l'économie mondiale mais aussi de la Chine».
Si Hu Jintao reste silencieux sur le sujet après sa rencontre avec Barack Obama, le Ministère chinois du Commerce en revanche répond à DSK que la responsabilité de l'Etat est d'assurer aux entreprises chinoises «un environnement stable et prévisible, y compris en ce qui concerne la politique des changes». Yao Jian, porte-parole de ce Ministère, précise: «si on demande à un seul pays de laisser sa monnaie se réévaluer alors que la valeur du dollar baisse, cela ne profitera pas à la reprise mondiale et ce sera injuste».
Pourtant, de ses conversations, Dominique Strauss-Kahn tire la conviction que la politique économique chinoise est en train de se diriger sans précipitation vers un modèle plus centré sur la demande intérieure. Mais comme le laisse entendre le porte-parole du Ministère du Commerce, l'alignement du yuan sur le cours du dollar est considéré comme un handicap. Cet argument est développé par un autre interlocuteur de Dominique Strauss-Kahn: Zhao Xiaochuan, le Gouverneur de la Banque centrale de Chine. En mars, il a proposé de retirer au dollar sa place de seule monnaie de réserve internationale.
L'idée relayée par plusieurs pays émergents fait son chemin et à Pékin on pense qu'un panier de monnaies pourrait servir de référence à l'évolution du Yuan. Naturellement, sur ce point, le Directeur Général du FMI est beaucoup plus proche des autorités chinoises que des dirigeants américains. Selon lui, «il y a de bonnes raisons de chercher à avoir une monnaie internationale plus composite». Zhao Xiaochuan voudrait y introduire les Droits de tirages spéciaux du FMI. «Pourquoi pas?» répond DSK. Il verrait bien aussi un système de monnaies de réserve où le dollar, l'euro et le yen seraient en concurrence.
Mais l'ancien ministre français estime que, pour le moment, le dollar est encore largement dominant. Et qu'il le sera tant que la confiance en cette monnaie durera. «Regardez!» dit-il, «la crise vient d'un mauvais fonctionnement de l'économie financière américaine. On aurait pu penser que ça créerait de la défiance vis-à-vis des Etats-Unis et un écroulement de la valeur du dollar. Pas du tout! C'est sur le dollar que ceux qui avaient de l'argent se sont reportés pour se protéger». En quittant Pékin, Dominique Strauss-Kahn affirmait néanmoins qu'il fallait travailler à la mise en place d'un système monétaire mieux équilibré.
Richard Arzt