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Les " guerres du climat " n'ont pas encore eu lieu, selon un chercheur

Les " guerres du climat " n'ont pas encore eu lieu, selon un chercheur

Il est impossible aujourd'hui d'établir une corrélation entre changement climatique et conflits en Afrique subsaharienne

Le lien entre le changement climatique et la multiplication des conflits violents n'est pas aussi évident que certains scientifiques et écologistes l'affirment, selon une étude publiée, lundi 6 septembre, par la revue de l'Académie américaine des sciences, PNAS.

Le Norvégien Halvard Buhaug, de l'Institut de recherche sur la paix, à Oslo, y démontre qu'il n'est pas possible d'attribuer au réchauffement les conflits africains des trois dernières décennies. Le chercheur appelle à la prudence quant à l'idée que des conflits, comme celui du Darfour, au Soudan, découlent de causes environnementales plutôt que politiques.

Son étude paraît alors que la recherche sur les relations entre conflits et environnement est en plein développement. Elle répond précisément à une autre étude, publiée en 2009, dans la même revue par des chercheurs américains, qui concluait qu'une forte corrélation existait entre les guerres civiles et l'évolution de la température en Afrique.

M. Buhaug commence par montrer que les hypothèses sur lesquelles Marshall B. Burke (université de Californie, Berkeley) et ses collègues avaient bâti leur modèle sont très discutables. N'avaient été ainsi retenus que les conflits ayant provoqué plus de mille morts par an. L'analyse était limitée à la période 1981-2002, alors que depuis 2002, le nombre de guerres civiles et leur gravité ont décru en Afrique, tandis que le réchauffement et l'assèchement se sont poursuivis. L'équipe américaine a par ailleurs opéré des choix méthodologiques dans son analyse statistique que M. Buhaug juge injustifiés.

Paramètres sociopolitiques

Le chercheur norvégien pose ensuite son propre modèle statistique, centré sur l'Afrique subsaharienne et qui élargit le champ des paramètres : il y inclut tous les conflits ayant entraîné plus de 25 victimes par an, et ne se limite pas aux seuls niveaux de la température et des précipitations, mais y adjoint la variation de ces valeurs par rapport à l'année précédente et leurs déviations par rapport à des moyennes à long terme.

M. Buhaug met aussi les variations climatiques en regard avec des paramètres sociopolitiques : l'exclusion politico-ethnique dans les pays considérés et leur niveau de développement économique.

Les calculs de corrélation montrent qu'aucune des variables climatiques n'a d'effet significatif sur la fréquence des conflits.

Au contraire, sur la période étudiée (1981-2002), les guerres civiles - d'abord nombreuses - reculent fortement depuis la fin des années 1990, alors que la température moyenne a augmenté régulièrement pendant la même période.

Conclusion : la variabilité climatique n'est pas corrélée aux variations à court terme des conflits en Afrique subsaharienne. Ceux-ci doivent plutôt être expliqués par des conditions structurelles et contextuelles classiques : exclusion ethnique, pauvreté, changement des rapports de force depuis la fin de la guerre froide, etc.

Halvard Buhaug se garde cependant de généraliser. Il ne prétend pas trancher la question sur le long terme. Observant que le réchauffement sur la période étudiée a été modeste et lent, il rappelle que les scénarios du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) suggèrent qu'à l'avenir, des vagues de chaleur et des événements météorologiques beaucoup plus importants sont envisageables - et que cela pourrait entraîner de vifs conflits.

" L'analyse des réponses des sociétés aux variations passées - du climat - peut être de peu d'enseignement " face à des événements aussi majeurs qu'un éventuel arrêt de la mousson asiatique, conclut le chercheur.

Hervé Kempf

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