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Expliquer la finance et l'économie par un praticien. Participer a la compréhension d'une matière d'abord difficile mais essentielle pour le citoyen.

Les Objectifs du millénaire des Nations unies sont-ils crédibles ? (OMD)

Les Objectifs du millénaire des Nations unies sont-ils crédibles ?

Avant l'échéance de 2015, où en est-on ? Lutte contre la pauvreté, éducation, santé : quels sont les progrès ?

Il y a dix ans, la communauté internationale s'engageait dans un défi sans précédent : réduire de moitié la pauvreté dans le monde d'ici à 2015. Cette promesse formulée au travers des huit Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) a soulevé d'énormes espoirs et relancé la solidarité internationale. A deux tiers du parcours, le bilan est cependant très mitigé. Une quinzaine de pays sont déjà au rendez-vous, mais plus nombreux sont ceux qui n'y parviendront pas. A cinq ans de l'échéance, le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies (ONU), M. Ban Ki-moon, organise un sommet à New York, du 20 au 22 septembre, afin de permettre une accélération des progrès.

1 Réduire de moitié l'extrême pauvreté et la faim

Plus d'un Africain sur deux vit encore avec moins de 1,25 dollar par jour, défini comme le seuil de l'extrême pauvreté par les Nations unies. Si certains pays comme le Bénin, l'Ethiopie ou le Ghana ont accompli des progrès importants, d'autres, tel le Zimbabwe, ont vu la pauvreté gagner du terrain, avec 78 % de leur population concernée en 2005, contre 33 % en 1990.

Au niveau mondial, le taux de pauvreté a reculé de 46 % à 27 % en 2005. Mais la crise a montré la fragilité de ces performances : 64 millions de personnes ont rejoint les rangs des plus démunis en 2010, selon la Banque mondiale. Et le " score " mondial est en bonne partie dû à la Chine qui a déjà rempli ses engagements.

Les chances de parvenir à réduire de moitié la faim dans le monde d'ici à 2015 semblent en revanche bien minimes. 925 millions de personnes souffrent de sous-alimentation. Sans réforme en profondeur du système du commerce mondial, d'investissements massifs dans l'agriculture des pays en développement délaissée pendant plusieurs décennies, la sécurité alimentaire mondiale reste suspendue à la volatilité des cours des denrées de base.

2 Assurer l'éducation pour tous

L'école pour tous n'est pas pour demain. Avec 72 millions d'enfants non scolarisés (100 millions d'après l'Unicef), selon le rapport mondial de l'Unesco 2010, l'objectif d'" assurer l'éducation pour tous " est inatteignable. Si les tendances actuelles se prolongent, il restera 56 millions d'enfants exclus des classes en 2015.

Des progrès importants ont pourtant été engrangés entre 2002 et 2004, de nombreux pays procédant à une scolarisation de masse. L'Asie du Sud et de l'Ouest a réduit de moitié sa population non scolarisée en près de dix ans. Le Bénin, souvent cité en exemple, affichait en 1999 un taux de scolarisation de 50 %, l'un des plus bas du monde. Dix ans plus tard, ce pays pourrait atteindre 100 % d'une classe d'âge scolarisée en 2015.

Mais les progrès ont ralenti ces dernières années. La crise n'est pas seule en cause. Après avoir fait du chiffre, nombre de pays doivent maintenant s'attaquer aux inégalités au sein de leurs propres sociétés. Car les laissés-pour-compte de l'éducation sont aussi ceux qui sont privés d'accès à d'autres services publics, comme la santé. Parfois parce qu'ils habitent dans des régions reculées, parce qu'ils font partie d'un groupe ethnique minoritaire, parce que la langue de l'école n'est pas leur langue... Ces enfants marginalisés sont les moins scolarisés : jeunes musulmans de l'île de Mindanao, aux Philippines, petites filles kurdes en Turquie (40 % de scolarisées), enfants de pasteurs nomades au Kenya, jeunes Afghanes que l'on garde à la maison, ou enfants issus des basses castes en Inde...

Les progrès de la scolarisation seront d'autant plus difficiles à accomplir qu'il s'agit de surmonter des préjugés, et d'autant plus coûteux qu'il ne s'agit plus d'amener ces enfants à l'école mais d'amener l'école à ces enfants.

3 Promouvoir l'égalité des sexes et le sort des femmes

Qu'il s'agisse de fréquenter l'école, d'accéder aux services de santé, de trouver un emploi ou d'atteindre la parité dans les représentations politiques, les femmes ont encore du chemin à parcourir. Même si l'éducation (avec 96 filles pour 100 garçons scolarisés dans le primaire) représente d'ores et déjà une conquête pour les filles. L'ONU Femmes, créée en juillet, n'en aura pas moins fort à faire pour parvenir à l'objectif 3.

Dans des pays en développement encore largement dominés par l'agriculture, l'accès à la terre est une des clés de cette " autonomie ". Or, bien que " les femmes constituent la majorité des fermiers ", comme le rappelle le fonds de développement des Nations unies pour la femme (Unifem), les paysannes sont très minoritaires parmi les propriétaires des terres.

A Madagascar par exemple, alors que 83 % des femmes sont employées dans l'agriculture, elles ne possèdent, selon le Fonds mondial pour l'alimentation (FAO), que 15 % des petites propriétés. Le pourcentage des femmes propriétaires des terres agricoles est encore plus faible au Guatemala, au Népal ou en Algérie. Seul le Cap Vert - où femmes et hommes sont quasiment à égalité dans ce domaine - fait exception.

Dans d'autres domaines, les femmes commencent à gagner leur place. Mais à des rythmes extrêmement variés selon les régions. Si, au niveau mondial, 41 % des salariées du secteur non agricole sont des femmes, en Asie, elles ne représentent qu'un cinquième des effectifs des services et de l'industrie.

4 Réduire de deux tiers le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans

En 1990, le taux de mortalité au niveau mondial atteignait 89 décès pour 1 000 naissances d'un bébé en vie. Ce taux a été réduit d'un tiers en 2009, à 60 décès pour 1 000 naissances. Au cours de la même période, le nombre de décès chez les enfants de moins de 5 ans a également décru : 8,1 millions en 2009 contre 12,4 millions en 1990. En 1970, ce chiffre atteignait 16 millions.

Les organismes des Nations unies attribuent ces avancées notamment aux progrès en matière d'éducation maternelle. Quatre maladies contre lesquelles des traitements existent - la pneumonie, les diarrhées, le paludisme et le sida - expliquent 43 % des décès des enfants de moins de 5 ans survenus en 2008. Autant de domaines où il est possible, avec des efforts accrus, de réduire encore la mortalité infantile.

Beaucoup de régions sont parvenues à une réduction d'au moins 50 % de cette mortalité. Parmi les pays en développement, les progrès les plus marquants ont été accomplis en Afrique du Nord et en Asie de l'Est, avec des diminutions de respectivement 68 % et 58 %. Le Bangladesh, l'Erythrée, le Laos, Madagascar, le Népal ou le Timor-Oriental ont enregistré des diminutions d'au moins 60 %.

Ces progrès se traduisent également par la baisse du nombre de pays connaissant un taux de mortalité des moins de 5 ans d'au moins 100 décès pour 1 000 naissances : 52 pays concernés en 1990 et seulement 31 en 2009. L'Afrique subsaharienne demeure la région qui connaît les taux les plus élevés : un enfant sur huit meurt avant son cinquième anniversaire. Soit le double de la moyenne des pays en développement.

5 Réduire de trois quarts le taux de mortalité maternelle

Mille femmes meurent chaque jour dans le monde de causes liées à la grossesse, estiment les Nations unies. Des progrès majeurs ont été toutefois accomplis dans le domaine de la santé maternelle. Le nombre de femmes décédant de complications de leur grossesse ou lors de l'accouchement a ainsi diminué de 34 %, passant de 546 000 en 1990 à 358 000 en 2008.

Cependant, les institutions internationales constatent que " le taux annuel de diminution est inférieur de plus de la moitié à celui qui serait nécessaire pour atteindre la cible " prévue. Atteindre l'objectif fixé supposerait une diminution annuelle de 5,5 %. Or, la baisse de 34 % observée depuis 1990 représente une diminution moyenne annuelle d'à peine 2,3 %.

Cet objectif est celui sur lequel le retard est le plus important. Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, devrait prendre une initiative pour faire redoubler les efforts d'investissement dans les systèmes de santé et pour atteindre les femmes les plus exposées.

Les principales causes de la mortalité des femmes enceintes sont connues : hémorragies graves suivant l'accouchement, infections, troubles hypertensifs et avortements à risque. Sur les 1 000 femmes mourant pour ces raisons chaque jour dans le monde, 570 vivent en Afrique subsaharienne, 300 en Asie du Sud et 5 dans les pays à revenu élevé. Le risque pour une femme d'un pays en développement de mourir d'une cause liée à sa grossesse est 36 fois supérieur à celui que connaît une femme dans un pays développé. De plus, la réduction du nombre de grossesses chez les adolescentes " est au point mort, ce qui met plus de jeunes mères en danger ", soulignent les Nations unies.

6 Avoir enrayé la propagation du sida et du paludisme

C'est l'objectif qui a enregistré les résultats les plus encourageants. Grâce à des financements sans précédent, mais aussi à la mobilisation politique de plusieurs pays du Sud, le front de lutte contre le sida a nettement progressé depuis dix ans. Le nombre de personnes mourant du VIH ou nouvellement infectées est en diminution, celui des malades ayant accès aux médicaments anti-VIH en augmentation.

L'objectif d'assurer en 2010 l'accès universel au traitement n'a toutefois pas été atteint : sur les 15 millions de personnes séropositives en ayant besoin dans les pays à faibles ou moyens revenus, près de 10 millions n'en reçoivent toujours pas. L'épidémie semble, quant à elle, s'être stabilisée dans la plupart des régions, même si la prévalence reste en hausse en Europe de l'Est, en Asie centrale et dans d'autres régions d'Asie, à cause d'un taux important de nouvelles infections. L'Afrique subsaharienne reste la région la plus touchée, avec 72 % des nouvelles infections par le VIH en 2008.

En ce qui concerne le paludisme, l'objectif 6 prévoyait en 2000 d'inverser la tendance d'ici à 2015. Mission quasiment accomplie : dans plus d'un tiers des pays d'Afrique touchés par cette maladie parasitaire, le nombre de cas a été réduit de plus de 50 % entre 2000 et 2008. Le bilan est plus sombre en ce qui concerne la tuberculose : 1,8 million de personnes en sont mortes en 2008, dont un tiers étaient porteuses du virus du sida. Développer la recherche sur la tuberculose devient une urgence d'autant plus grande que les formes multirésistantes aux traitements se développent très vite.

7 Assurer un environnement durable

En formulant cette ambition, les Nations unies avaient soit mal appréhendé l'ampleur de la tâche, soit surestimé la capacité d'action de la communauté internationale. Aucun accord n'a pu être trouvé pour organiser la lutte contre le changement climatique, qui menace pourtant en priorité les pays les plus pauvres.

Le bilan est encore plus sombre sur le front de la biodiversité : rendez-vous avait été donné en 2010 pour freiner le rythme de disparition des espèces - dont une sur trois est menacée au niveau mondial. Il ne sera pas honoré. Cet échec montre les limites des OMD, qui ont imposé une vision très fragmentée du développement.

D'importants progrès ont été réalisés pour l'accès à l'eau potable, même si l'Afrique subsaharienne et les populations rurales restent très défavorisées. En matière d'infrastructures d'assainissement, seulement 40 % des ménages ruraux sont équipés d'installations sanitaires de base, alors que celles-ci permettent de limiter la propagation de certaines maladies. L'ONU admet que l'objectif de diviser par deux la population n'ayant pas accès à un assainissement minimum ne sera pas atteint.

8 Mettre en place un partenariat pour le développement

Cet objectif suppose que les aides publiques au développement soient en croissance et les dettes des Etats défavorisés en baisse. En ce qui concerne l'aide, le compte n'y est pas. L'ONU avait fixé comme but que les pays riches y consacrent 0,7 % de leurs produits intérieurs bruts (PIB) et les donateurs avaient promis, en 2005, d'augmenter de 50 milliards de dollars par an les 107 milliards d'aide atteints cette année-là.

Les chiffres de 2009 disent la dérive de ces ambitions : l'aide publique recensée par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) s'est élevée à 119,6 milliards de dollars (122,3 milliards en 2008) largement en dessous des 160 milliards espérés. Et le taux d'aide par rapport aux PIB plafonne à 0,31 %.

Dans ces temps de disette budgétaire, les ONG bataillent pour que des coupes n'amputent pas les crédits de l'aide publique au développement (APD). Nicolas Sarkozy a promis, le 15 septembre, que " l'APD sera la seule dépense publique qui ne diminuera pas en 2011 ".

Bonne nouvelle, la communauté financière internationale poursuit sa politique d'annulation de la dette des pays pauvres. Dernier pays en date à en profiter, le Liberia a vu supprimer, le 15 septembre, une dette d'1,2 milliard de dollars par le Club de Paris, regroupant les créanciers publics, après avoir bénéficié en juin d'un allégement de son fardeau de 4,6 milliards de dollars par le FMI et la Banque mondiale. Trente-cinq pays en ont profité sur les quarante concernés par la procédure " Initiative renforcée en faveur des pays très endettés ". Reste à traiter les Comores, l'Erythrée, la République kirghize, la Somalie et le Soudan.

Les ONG redoutent un retour de l'endettement en raison des prêts d'urgence consentis aux pays frappés par des catastrophes naturelles, comme Haïti ou le Pakistan. Ils s'inquiètent aussi des crédits plus ou moins opaques que la Chine pratique avec les pays africains dont elle souhaite exploiter les ressources minières.

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