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Expliquer la finance et l'économie par un praticien. Participer a la compréhension d'une matière d'abord difficile mais essentielle pour le citoyen.

Lutte contre la pauvreté : l'ONU garde le cap de 2015

Lutte contre la pauvreté : l'ONU garde le cap de 2015

Les gouvernements, qui se retrouvent à New York le 20 septembre, s'apprêtent à confirmer les objectifs fixés il y a dix ans

 

A cinq ans de l'échéance que s'est fixée la communauté internationale pour réduire de moitié la pauvreté dans le monde, les chefs d'Etat et de gouvernement qui se réuniront du 20 au 22 septembre à New York autour du secrétaire général des Nations unies s'apprêtent à confirmer la promesse faite en 2000.

" Nous sommes convaincus que les Objectifs du millénaire pour le développement - OMD - peuvent être atteints même dans les pays les plus pauvres ", affirment les dirigeants de la planète dans le projet de déclaration finale qui devrait être adoptée à l'issue du sommet. Pari audacieux. Dans ce document de 27 pages, dont Le Monde a obtenu copie, le bilan des avancées réalisées au cours de la dernière décennie apparaît très mitigé et la liste des obstacles à surmonter pour être au rendez-vous en 2015 demeure titanesque.

Le séisme financier qui a déstabilisé l'économie mondiale a remis en cause dans nombre de pays une partie des progrès réalisés. La crise alimentaire provoquée en 2008 par l'envolée des prix des denrées agricoles a rappelé que la persistance de la faim dans le monde constitue le plus sévère échec des politiques de développement. Alors que la course aux terres arables dans laquelle se sont lancés plusieurs pays - à commencer par la Chine - pour sécuriser leurs approvisionnements alimentaires et la conversion de vastes superficies à la production d'agrocarburants aiguisent le problème.

L'impact du changement climatique jusqu'alors peu pris en compte bouscule les scénarios imaginés pour atteindre les OMD. " Nous reconnaissons que le changement climatique fait peser de sérieux risques sur tous les pays, en particulier les pays en développement " et qu'y " répondre est crucial " pour préserver ce qui a été accompli, souligne la déclaration.

Entre 1990 (année à partir de laquelle sont mesurés les résultats) et 2005 (dernière année pour laquelle des chiffres sont disponibles), le nombre de personnes vivant sous le seuil de l'extrême pauvreté - soit 1,25 dollar de revenu par jour - est passé de 1,8 milliard à 1,4 milliard. La misère a, en pourcentage de la population, reculé sur tous les continents à l'exception de certaines régions d'Asie. Mais pour atteindre la cible, 500 millions de personnes doivent encore sortir de la pauvreté d'ici cinq ans.

La croissance rapide de la Chine et d'autres pays émergents permettra peut-être d'y parvenir. Mais on sait déjà qu'une division par deux du nombre de pauvres en Afrique subsaharienne ou en Asie de l'Ouest est hors de portée. Personne ne s'en étonnera tant cet objectif identique pour tous les pays, quelle que soit leur situation, a très vite été jugé peu réaliste.

Les ODM, qui comportent sept autres chapitres couvrant l'accès universel à l'éducation primaire, la réduction de la mortalité infantile et de la mortalité maternelle, la lutte contre les grandes pandémies, ou encore la préservation de l'environnement, ont été adoptés alors qu'il s'agissait de remobiliser la communauté internationale sur les questions de développement et de solidarité internationale après des années de désillusion. De ce point de vue, le résultat est positif. L'aide publique au développement a atteint un montant record de 120 milliards de dollars (94 milliards d'euros) en 2009, soit une hausse de 30 % par rapport à 2004. La dette des pays les plus pauvres a en bonne partie été annulée.

Les engagements qui avaient été pris par les pays du Nord n'ont toutefois pas été tenus et c'est ce que rappelle la déclaration de New York en demandant aux bailleurs de respecter leur promesse de " consacrer 0,7 % de leur produit national brut à l'aide publique au développement d'ici à 2015 dont 0,51 % dès 2010 ". Cela représentera un effort annuel de 35 milliards de dollars supplémentaires d'ici à 2015.

Les gouvernements du Nord sont invités, dans les termes toujours pesés des textes onusiens, à " établir, dès que possible, la programmation budgétaire " de ces dépenses. Les pays favorables, dont la France, à l'instauration de " financements innovants ", comme la taxe sur les billets d'avion pour financer la lutte contre le sida, sont parvenus à faire adopter leur approche puisque le texte reconnaît la possibilité " d'explorer de nouveaux mécanismes financiers ", à condition qu'ils ne se substituent pas à l'aide publique.

Adoptés par 189 pays, les OMD sont aussi une promesse des pays du Sud à placer le recul de la pauvreté et des inégalités au coeur de leurs politiques. Le texte réaffirme que " chaque pays est le premier responsable de son développement économique et social ". Mais ne va pas au-delà. Au regret de certains bailleurs qui auraient aimé un accord aussi plus exigeant à l'égard des gouvernants du Sud.

Laurence Caramel

Les promesses non tenues de l'aide internationale

AU MOMENT de souffler les dix bougies des Objectifs pour le développement du millénaire (ODM), le bilan pose question sur l'efficacité de l'aide internationale. Les pays qui arrivent en tête du palmarès des succès remportés dans la lutte contre la pauvreté ne sont pas ceux qui ont le plus bénéficié de la " générosité " des pays riches, mais ceux qui ont mené des politiques leur permettant d'engranger la plus forte croissance économique tout en maîtrisant leur insertion dans l'économie mondiale.

La Chine en est le meilleur exemple. " Les grandes victoires des ODM se trouvent dans les pays émergents qui ont réussi à mener de front des politiques économiques, sanitaires, éducatives, et les grands échecs s'inscrivent en Afrique subsaharienne, où la dynamique économique n'a pas été suffisante pour financer de façon pérenne les budgets sociaux, alors que l'aide internationale subissait elle-même une grande volatilité ", constate André Pouillès-Duplaix, de l'Agence française de développement.

Pour justifier ces échecs, l'insuffisance de l'aide est le plus souvent mise en avant. Les pays riches n'avaient-ils pas promis en 1970 de consacrer 0,7 % de leur PIB à aider le Sud ? Quarante ans après, leur effort atteint tout juste 0,3 %. Plus d'aide : encore une fois, les bailleurs seront mis à New York face à leurs promesses. A quelques jours du sommet, les agences multilatérales de coopération et les organisations non gouvernementales ont commencé de faire les comptes : il manque 16 milliards de dollars (12,6 milliards d'euros) pour doubler l'aide à l'Afrique subsaharienne, comme cela avait été promis au G8 de Gleneagles, en 2005 ; il faudrait allouer une enveloppe supplémentaire de 37 milliards de dollars au secteur de la santé, selon l'Organisation mondiale de la santé, 37 milliards de dollars également, selon Oxfam, pour résoudre le problème de la malnutrition, et encore 10 milliards pour l'éducation, sans compter les nouveaux besoins - 100 milliards de dollars à l'horizon 2020 - pour faire face au changement climatique. L'aide publique au développement à elle seule ne pourra répondre à tous ces besoins, d'où l'idée de trouver à travers des taxations internationales de nouvelles sources de financement, d'où la montée en puissance aussi des milliardaires philanthropes tel Bill Gates ou Warren Buffett.

" Transparente "

On aurait tort de se contenter de cette explication. La focalisation du débat sur la " quantité " de l'aide nuit à l'attention tout aussi grande qu'il faudrait porter sur son efficacité. Certes, aucune déclaration internationale n'omet, depuis quelques années, de rappeler que l'aide doit être " transparente " et qu'il faut améliorer sa " qualité ". La meilleure coordination des bailleurs est aussi normalement, depuis 2003, un impératif. Sur le terrain, ces bonnes résolutions sont cependant loin d'être mises en musique. Pourtant, l'abondante littérature académique produite depuis dix ans sur la réduction de la pauvreté a montré qu'une " mauvaise aide " est non seulement inefficace mais aussi nuisible.

L. C.

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