Pas de retraite à taux plain avant 67 ans : cette mesure va frapper directement les femmes.
Dans le « débat » qui a précédé l'annonce des décisions gouvernementales sur la réforme des retraites, on n'a presque pas parlé d'inégalités entre les hommes et les femmes. Or, celles-ci sont criantes. En 2004, le montant des pensions de droit propre des femmes représentait 48 % de celui des hommes, 62 % si l'on inclut les droits dérivés (pensions versées aux veuves au titre de la retraite de leur mari décédé). Sur les générations qui partiront à la retraite entre 2025 et 2030, les pensions des femmes pourraient être encore inférieures de 30 % à celles des hommes.
Pourquoi de telles différences alors que les taux d'activitéféminins ont explosé depuis les années 1970 ? D'abord, parce que les femmes connaissent des interruptions de carrière, même si elles sont de plus en plus courtes, et chaque année d'interruption se traduit par une baisse de 11 % du salaire. Ensuite, parce que cette augmentation du taux d'activité s'est surtout faite sous forme de travail à temps partiel : 30 % des femmes travaillent ainsi. Enfin, parce que des écarts importants de salaire subsistent entre hommes et femmes : 26 % selon les derniers chiffres.
Connaissant plus d'interruptions, les femmes doivent travailler plus longtemps avant d'accéder à la retraite à taux plein, ce qui explique pourquoi beaucoup ne liquident leurs droits aujourd'hui qu'à 65 ans. Le recul à 67 ans de l'âge auquel on peut obtenir ce taux plein va donc les frapper directement, elles qui sont déjà les plus concernées par la décote, le minimum contributif et le minimum vieillesse.
C'est pour exercer une vigilance particulière, élaborer des propositions et les diffuser que vient d'être créé le Laboratoire de l'égalité[1]. Il rassemble des chercheurs, des associations, des syndicalistes et des réseaux visant à promouvoir l'égalité professionnelle. Parmi les premières propositions : exiger des analyses d'impact de la réforme des retraites sur les femmes, mais aussi développer des modes d'accueil en quantité et en qualité suffisantes, clé de l'autonomie. Autre revendication : la mise en œuvre complète du rapport Gresy[2] sur l'égalité professionnelle.
Dominique Méda, sociologue