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Expliquer la finance et l'économie par un praticien. Participer a la compréhension d'une matière d'abord difficile mais essentielle pour le citoyen.

Vers la fin de la rigueur salariale en Allemagne ?

Vers la fin de la rigueur salariale en Allemagne ?

Le syndicat de la métallurgie IG Metall réclame une hausse de 6 %. Un salaire minimum dans l'intérim est à l'étude
Berlin Correspondant

 

C'est lundi 6 septembre qu'ont démarré les négociations salariales dans la métallurgie allemande qui, traditionnellement, donnent le ton à l'ensemble des branches professionnelles. Le puissant syndicat IG Metall (2,3 millions d'adhérents, un record en Europe) a déjà affiché ses prétentions : 6 % d'augmentations salariales sur douze mois.

Au cours de ce qu'il qualifie de " premières négociations de l'après-crise ", le syndicat veut également aborder deux autres sujets : l'amélioration des conditions de travail pour les salariés âgés et l'égalité des rémunérations entre les intérimaires et les salariés en contrat à durée indéterminée. Alors qu'en cette rentrée, la " locomotive " allemande tourne à plein régime - la croissance devrait être d'environ 3 % cette année -, le syndicat réclame sa part du gâteau.

Le patron de la confédération syndicale DGB, Michael Sommer, a été explicite. " Les salariés se sont privés en acceptant le chômage partiel " et les syndicats ont tempéré leurs demandes pendant la durée de la crise, " mais, avec la reprise, nous n'allons plus nous retenir ", a-t-il affirmé dans le Hamburger Abendblatt. Au-delà de la crise, l'Allemagne a connu quasiment une décennie de stagnation salariale. De 2000 à 2008, le coût unitaire de la main-d'oeuvre n'y a augmenté que de 2,7 %, contre 16,5 % en moyenne dans la zone euro (et 17,6 % en France). Si les salariés de la métallurgie sont rarement à plaindre, l'Allemagne compte 1,4 million de personnes qui travaillent, mais dont les revenus sont insuffisants pour vivre et qui doivent bénéficier d'aides. 18 % des Allemands gagnent moins de 800 euros par mois, ce qui correspond à 60 % du revenu moyen et donc au seuil de pauvreté.

Sans aller jusqu'aux 6 % d'augmentations, l'économiste Peter Bofinger, qui fait partie du conseil des cinq économistes les plus écoutés du gouvernement, jugeait début août qu'une hausse moyenne des revenus " d'au moins 3 % " serait la bienvenue. Angela Merkel a, le 29 août, abondé en ce sens.

Plan de rigueur

Il faut que " les situations meilleures au niveau des entreprises se reflètent auprès des travailleuses et des travailleurs ", a affirmé la chancelière qui, il est vrai, s'apprête à mettre en oeuvre un plan de rigueur qui va peser sur le pouvoir d'achat des plus modestes. Il est vrai aussi que la chancelière a également averti que la reprise était " encore fragile ".

C'est bien cet argument que met en avant le patronat. " Après le plus profond et le plus brutal effondrement de l'histoire économique, la reprise est encore flageolante ", explique Martin Kannegiesser, le président du patronat de la métallurgie. Celui-ci propose une augmentation de 2,7 % à partir du début 2011. Très dépendante de ses exportations et donc notamment de la santé de l'économie américaine, l'Allemagne n'est pas certaine d'être sortie d'affaires. Par ailleurs, les Allemands estiment davantage tirer la croissance européenne en créant des emplois qu'en augmentant les salaires. " Si l'emploi augmente de 1 %, la consommation des particuliers progresse de 0,8 % et si le salaire réel augmente de 1 %, la consommation ne croît que de 0,2 % ", a récemment expliqué Michael Hüther, directeur de l'institut d'économie de Cologne au Spiegelonline.

Les négociations dans la métallurgie soulèvent un autre débat : celui de l'intérim et de l'emploi précaire. Pour la première fois, l'IG Metall veut inscrire dans l'accord l'égalité de revenus entre les intérimaires et les autres salariés. Pour le patronat, cela est impossible puisque les entreprises d'intérim ne dépendent pas des mêmes conventions collectives. Le sujet est d'autant plus sensible qu'à partir du 1er mai 2011, la libre circulation des travailleurs dans toute l'Union européenne pourrait provoquer un afflux de Polonais ou des Tchèques acceptant de travailler pour de faibles salaires, et déstabiliser le marché de l'intérim.

Pour pallier ce risque, le gouvernement, bien qu'hostile à un salaire minimum national, envisage d'imposer un salaire minimum dans l'intérim. Actuellement, seules quelques branches comme la construction ou la santé disposent d'un tel plancher. En créer un dans l'intérim concernerait, de fait, toutes les branches et pourrait être vu comme un substitut à un salaire minimum national interprofessionnel.

Mais la coalition au pouvoir est, sur ce sujet, divisée : la CDU et la CSU y sont favorables, les libéraux du FDP hostiles. Du coup, la ministre du travail envisage une loi qui empêcherait une entreprise de payer un intérimaire moins qu'un salarié en place si cet intérimaire a travaillé auparavant dans l'entreprise. Il y a un an, la chaîne de drogueries Schlecker avait fait scandale en licenciant des salariés et en les réembauchant, avec des salaires moins élevés, par le biais d'une filiale spécialisée dans le travail temporaire.

Frédéric Lemaître

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