Les travailleurs réclament de meilleures conditions de travail et une hausse des salaires. Le constructeur japonais a dû arrêter les chaînes d'assemblage de ses quatre sites dans le pays
Shanghaï Correspondant
En bloquant l'usine qui fournit l'ensemble des boîtes de vitesses des modèles de Honda fabriqués en Chine, les ouvriers grévistes de Honda Auto Parts Manufacturing à Foshan, à une trentaine de kilomètres de Canton, ont frappé dans le mille. Le constructeur japonais a été forcé d'arrêter, mercredi 26 mai, ses chaînes d'assemblage dans ses quatre sites en Chine.
Honda, qui exporte une petite partie de ses modèles depuis la Chine et en construit une autre pour le marché chinois en coentreprise avec deux sociétés d'Etat, a annoncé une production en Chine en croissance de 38 % sur les quatre premiers mois de l'année 2010, et entend porter sa capacité de production dans le pays de 650 000 véhicules aujourd'hui à 830 000 d'ici fin 2012.
Si grèves et débrayages se comptent par centaines chaque année en Chine - le droit de grève n'y est pas reconnu par la Constitution, mais les actions collectives sont un moyen pour les ouvriers de pousser les autorités à intercéder en leur faveur -, ces mouvements touchent rarement le secteur automobile. Plus rares encore sont ceux qui bloquent l'intégralité des opérations d'une multinationale prestigieuse comme Honda.
...
En bloquant l'usine qui fournit l'ensemble des boîtes de vitesses des modèles de Honda fabriqués en Chine, les ouvriers grévistes de Honda Auto Parts Manufacturing à Foshan, à une trentaine de kilomètres de Canton, ont frappé dans le mille. Le constructeur japonais a été forcé d'arrêter, mercredi 26 mai, ses chaînes d'assemblage dans ses quatre sites en Chine.
Honda, qui exporte une petite partie de ses modèles depuis la Chine et en construit une autre pour le marché chinois en coentreprise avec deux sociétés d'Etat, a annoncé une production en Chine en croissance de 38 % sur les quatre premiers mois de l'année 2010, et entend porter sa capacité de production dans le pays de 650 000 véhicules aujourd'hui à 830 000 d'ici fin 2012.
Si grèves et débrayages se comptent par centaines chaque année en Chine - le droit de grève n'y est pas reconnu par la Constitution, mais les actions collectives sont un moyen pour les ouvriers de pousser les autorités à intercéder en leur faveur -, ces mouvements touchent rarement le secteur automobile. Plus rares encore sont ceux qui bloquent l'intégralité des opérations d'une multinationale prestigieuse comme Honda.
Le cas Honda est sensible : l'usine de Foshan, l'une des quatre de ce type au monde en dehors du Japon, est détenue à 100 % par le constructeur japonais, et répond à la stratégie du gouvernement chinois d'attirer une production à plus fort contenu technologique. La presse chinoise, qui a commencé à couvrir la grève, a visiblement reçu l'ordre de se faire plus discrète, à moins d'une semaine de l'anniversaire, tabou, du massacre de Tiananmen.
Le printemps est associé en Chine à des poussées de contestation dont le souvenir a souvent suscité des remous, du mouvement du 4 mai 1919 aux grèves de 1925, dans des usines textiles japonaises, en passant par les manifestations antijaponaises d'avril 2005.
Récemment, la recrudescence de suicides chez les petites mains de Foxconn, un sous-traitant d'Apple à Shenzhen, a braqué le projecteur sur le malaise des nouvelles générations d'ouvriers migrants. Au point que Wang Yang, secrétaire général du parti dans le Guangdong, a dû, samedi, rappeler que " le développement économique doit d'abord bénéficier au peuple ".
Première province exportatrice de Chine, le Guangdong est une caisse de résonance pour les mouvements des droits du travail en Chine : c'est là que les ouvriers, des migrants en grande majorité, sont le plus organisés. " La grève chez Honda est extrêmement surprenante, et en même temps, elle est circonscrite, note un spécialiste de l'automobile. Il ne faut pas perdre de vue qu'en Chine, il y a de grandes différences de statut entre différentes entités d'un même groupe industriel, qui peuvent provoquer des frustrations. Les disparités régionales sont fortes et les attentes différentes selon que les gens sont migrants, comme dans le Guangdong, ou locaux, comme dans les bassins automobiles de l'intérieur du pays, où les sociétés d'Etat offrent des conditions d'emploi plus généreuses par rapport aux attentes. "
Le mouvement de grève aurait commencé le 17 mai, après qu'une centaine d'ouvriers ont débrayé pour obtenir de meilleures conditions de travail et une hausse des salaires. Plusieurs facteurs auraient radicalisé les grévistes : la société aurait d'abord refusé de procéder à des augmentations, tout en envoyant des recruteurs à l'extérieur. Deux " meneurs " auraient vu leurs contrats suspendus. Enfin, des intérimaires, rapporte le South China Morning Post de Hongkong, auraient été forcés de s'engager à ne pas rejoindre le mouvement.
Lundi matin, " les employés n'étaient pas prêts à se réconcilier " avec la direction, a déclaré au quotidien hongkongais un représentant de la centrale syndicale chinoise, qui, en cas de crise, joue un rôle de médiateur. Selon l'un des ouvriers cités par Le Quotidien du peuple, le salaire de base n'est que de 1 211 yuans par mois (110 euros). Le logement, la nourriture et les frais courants laissent moins de 500 yuans d'épargne possible. Les ouvriers demanderaient de 500 à 1 000 yuans supplémentaires.
Les cas de Honda et de Foxconn sont révélateurs de tensions qui affleurent dans le marché du travail chinois, où les mécanismes de représentation réels des ouvriers sont absents : la centrale syndicale chinoise est représentée au sein des entreprises par des membres de... l'encadrement, ou des officiels du syndicat au sein des administrations.
" On a plusieurs fois assisté, ces dernières années, à ce genre de phénomène, où les travailleurs lancent leur propre grève et contournent le syndicat officiel, constate Geoffrey Crothall, porte-parole de l'organisation non gouvernementale (ONG) China Labour Bulletin à Hongkong. Il faut noter toutefois qu'il s'agit d'une usine de composants qui fournit l'intégralité des usines de Honda et que les ouvriers savaient qu'en la bloquant, ils gagneraient en pouvoir de négociation. "
Brice Pedroletti
Hon Hai Precision Industry, la maison mère du taïwanais Foxconn, frappé par une série de suicides (Le Monde du 28 et du 29 mai), a annoncé, le 28 mai, qu'elle allait augmenter de 20 % le salaire d'au moins 200 000 de ses 800 000 ouvriers en Chine. " La tristesse est contagieuse, la joie aussi, a dit un dirigeant. Nous espérons que les ouvriers auront un regard plus positif sur leu