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Expliquer la finance et l'économie par un praticien. Participer a la compréhension d'une matière d'abord difficile mais essentielle pour le citoyen.

En sept volets, nos nouvelles révélations sur l'Ecureuil

En sept volets, nos nouvelles révélations sur l'Ecureuil
09 Novembre 2009 Par Laurent Mauduit

C'est une enquête hors normes, dont Mediapart commence aujourd'hui la publication. Hors normes parce qu'elle s'appuie sur plus d'une vingtaine de documents confidentiels, que nous dévoilerons au gré des sept volets de notre série. Ces documents apportent des éclairages souvent saisissants sur les dysfonctionnements qui ont plongé les Caisses d'épargne dans une crise sans précédent, la plus grave qu'un établissement financier ait jamais traversé en France. Cette enquête vient du même coup illustrer, au travers d'une banque emblématique en France, celle de l'Ecureuil, qui a longtemps été le symbole du Livret A et de l'épargne populaire, certains des mécanismes de la crise financière qui a secoué la planète avant de se transformer en une crise économique historique. Enfin elle vient confirmer, et même au-delà, le bien-fondé d'une première et longue enquête conduite par Mediapart, qui avait fait l'objet d'une rafale de plaintes en diffamation, intentées par l'ancienne direction de la banque contre notre journal – plaintes qui viennent d'être retirées.

 Cette enquête n'est certes pas la première que mène Mediapart sur les Caisses d'épargne. J'en ai déjà conduit plusieurs, dont j'ai détaillé l'ambition dans les deux vidéos ci-contre, l'une mise en ligne le jour du lancement de notre pré-site, le 2 décembre 2007, pour expliquer les raisons de ma participation à l'aventure Mediapart; la seconde, mise en ligne le 13 mars 2008, pour présenter plus précisément les buts poursuivis par la première enquête sur les Caisses d'épargne.

 Mais cette nouvelle enquête va encore plus loin que les précédentes. Si le journalisme d'investigation se heurte souvent à de grandes difficultés, l'exercice est encore plus difficile en matière économique, où la transparence est rarement admise, et plus encore dans le domaine des banques, où le secret est un principe absolu. Or, ce secret, qui est parfois un paravent trop commode et qui à la faveur de la crise a été de plus en plus controversé, nous sommes parvenus dans le cas des Caisses d'épargne à le briser. Nous avons rencontré de très nombreux témoins qui, jusque dans les sommets de la banque – au sein même de son directoire et de son conseil de surveillance –, au sein des Banques populaires avec lesquelles les Caisses d'épargne vont fusionner, au sein aussi de <st1:personname productid="la Commission" w:st="on">la Commission</st1:personname> bancaire (le gendarme des banques), et au ministère des finances, ont accepté, confidentiellement, de nous aider. Parce que beaucoup ont jugé que dans la crise des Caisse d'épargne, tout n'avait pas été dit ; que la page avait été trop vite tournée ; que la vérité n'avait pas encore été publiquement établie.

 Bref, par sens civique, parce que cette crise des Caisses d'épargne a débouché sur un plan de sauvetage passant par un mariage entre cet établissement et les Banques populaires, mais aussi par des subsides publiques, c'est-à-dire parce que les contribuables ont été appelés à la rescousse pour sauver l'Ecureuil, des hauts fonctionnaires, des banquiers de haut rang, des membres du conseil de surveillance ont pris le risque de nous aider. C'est donc grâce à toutes ces aides que nous sommes parvenus à conduire notre enquête. Et à obtenir des documents confidentiels, dont le lecteur comprendra vite qu'ils sont, en ces affaires bancaires, d'un exceptionnel intérêt.

  • ·  La chronique d'un désastre financier annoncé

 Que l'on prenne le temps d'examiner les pièces que nous allons produire :

 – Les pièces qui attestent que deux commissions, portant sur plusieurs millions d'euros, ont été versées dans le cadre de deux projets de financement pour la construction d'un hôpital en Arabie saoudite et l'acquisition d'un avion d'affaires au profit d'un proche de la famille royale de ce pays;

 – Les pièces qui révèlent que les 751 millions d'euros perdus par les Caisses d'épargne en octobre 2008 sont le résultat non pas d'un banal «incident de marché» sur fond de crise financière, comme cela a souvent été dit, mais de dysfonctionnements de toute la chaîne hiérarchique;

 – Les pièces qui témoignent que les Caisses d'épargne étaient en réalité sous la surveillance constante de <st1:personname productid="la Commission" w:st="on">la Commission</st1:personname> bancaire depuis des années et que de nombreuses alertes, injonctions ou sommations avaient été faites les années précédentes, mais sans que cela empêche l'accident;

 – Les pièces qui attestent qu'au-delà de ces 751 millions partis en fumée, dont on a beaucoup parlé, les Caisses d'épargne ont perdu également des fortunes dans d'autres opérations financières, dont on n'a pas parlé et qui se sont pourtant révélées aussi spéculatives que risquées;

 – Les pièces qui révèlent de nombreux financements engagés par les Caisses d'épargne ou des projets secrets, dont la logique suscite des interrogations : des financements par exemple dans le domaine du logement social ou de la presse;

 – Les pièces qui témoignent des importants dysfonctionnements de certaines banques d'outre-mer, regroupées au sein de la filiale Océor.

 Que l'on prenne donc le temps de tout examiner, et l'on verra vite que c'est donc un autre récit qui prend forme de la crise des Caisses d'épargne. Loin du récit officiel d'une banque qui, par malchance, a été happée, presque malgré elle, par une crise venue d'outre-atlantique, c'est une autre chronique qui apparaît : celle d'un établissement depuis de longues années pris dans ses propres errements.

 Du même coup, la lecture de la crise financière et de son impact français s'en trouve modifiée. Car, dans le discours public, l'enchaînement des faits est transparent : du fait d'une spéculation hasardeuse, les Caisses d'épargne se sont trouvées fragilisées, ce qui a justifié une accélération du vieux projet de fusion entre cette banque et les Banques populaires, avec François Pérol pour nouveau patron de la banque fusionnée. A la lecture des faits que nous mettons à nu, ce sont pourtant d'autres questions qui viennent à l'esprit : la crise financière n'a-t-elle pas bon dos ? Compte tenu des alertes très nombreuses qui ont existé ces dernières années – mais qui souvent n'ont pas été rendues publiques –, pourquoi la puissance publique n'est-elle pas intervenue bien plutôt et de manière plus énergique?  Si ces alertes avaient été prises en compte quand il était encore temps, aurait-il été nécessaire que l'argent public soit mobilisé à hauteur de plus de 5 milliards d'euros pour venir en aide aux Caisses d'épargne ?

Pourquoi François Pérol a-t-il retiré ses plaintes?

Et pourquoi tout n'est-il pas aujourd'hui mis sur la table ? Pourquoi, puisqu'il en va de l'argent public, un audit, lui aussi public, c'est-à-dire transparent, n'a-t-il pas été engagé ? Pourquoi <st1:personname productid="la Commission" w:st="on">la Commission</st1:personname> des finances de l'Assemblée nationale, qui en a le droit, n'a-t-elle pas décidé de constituer une commission d'enquête sur cette crise des Caisses d'épargne, ou à tout le moins une mission d'information ? Après tout, il en va maintenant de l'argent public, et il aurait été utile que les élus de <st1:personname productid="la Nation" w:st="on">la Nation</st1:personname> fassent la clarté sur cette affaire. Pourquoi presque toutes les investigations de <st1:personname productid="la Commission" w:st="on">la Commission</st1:personname> bancaire sont-elles restées secrètes ?

On verra effectivement que les dysfonctionnements que nous passerons en revue posent bien d'autres questions que celles ayant trait à l'avenir de cet établissement bancaire. Ils débouchent sur des questions décisives, ayant trait à la régulation économique et, au-delà, au fonctionnement même de l'Etat et au bon usage des deniers publics. Elles débouchent aussi sur des interrogations concernant le rôle de <st1:personname productid="la Commission" w:st="on">la Commission</st1:personname> bancaire, qui est chargée de veiller au respect des dispositions réglementaires, c'est-à-dire sur les modes de régulation en France du secteur économique et financier.

Cette nouvelle enquête que nous publions permet, par ailleurs, de comprendre le bien-fondé de nos enquêtes antérieures, qui avaient fait l'objet des plaintes aujourd'hui retirées. Dans une première enquête en sept volets publiée sur le pré-site de Mediapart du 28 janvier au 2 février 2008 (que l'on retrouvera dans l'onglet «Prolonger» associé à cet article) nous avions en effet donné, les premiers, l'alerte sur la gestion des Caisses d'épargne, près de neuf mois avant que le groupe ne perde 751 millions d'euros dans une spéculation hasardeuse sur les marchés financiers. Nous le disons sans nous en réjouir : qui nous avait lu à l'époque n'a malheureusement pas été surpris de ce que la banque a ensuite appelé un «incident de marché» et qui, évidemment, est autrement plus grave que cela.

Une offre de preuves pour nos lecteurs

Avant que ces 751 millions d'euros ne partent en fumée, l'ancienne direction des Caisses d'épargne, emmenée par le président du directoire, Charles Milhaud, et le directeur général, Nicolas Mérindol, choisissant une procédure très peu économe des moyens de la justice, n'en a pas moins déposé dix plaintes en diffamation, avec constitution de partie civile, huit au nom de <st1:personname productid="la CNCE" w:st="on">la CNCE</st1:personname>, les deux autres au nom de chacun de ces deux dirigeants. Edwy Plenel en qualité de président de Mediapart et moi-même, en qualité d'auteur de ces articles, avons donc été mis en examen à dix reprises. Dix plaintes, auxquelles était venue s'ajouter une onzième, déposée par François Pérol, à la suite des enquêtes complémentaires que nous avions réalisées à l'occasion de son départ de l'Elysée.

Dans les mois qui ont suivi la onzième plainte déposée par François Pérol, je n'en ai pas moins continué mon travail. C'est ainsi que j'ai découvert de nouveaux faits, qui viennent compléter de nombreuses recherches ou documents en ma possession depuis longtemps, que je comptais présenter lors du procès ou que nous avions déjà versés dans notre offre de preuves.

C'est donc de ce nouveau travail de recherche et de documents plus anciens qu'est née cette enquête complémentaire qu'on lira sur Mediapart à partir d'aujourd'hui. Enquête qui révèle que les dysfonctionnements qui ont perturbé la vie des Caisses d'épargne sont beaucoup plus anciens que nous ne l'imaginions nous-mêmes, et surtout encore plus graves que ne le laissait transparaître notre première enquête mise en ligne au début de 2008.

Là encore, que l'on prenne connaissance des faits que nous présenterons ici, aujourd'hui et au cours des prochains jours ! Que l'on étudie chacun des nombreux documents confidentiels que nous produirons. Et l'on comprendra vite, face à l'offre de preuves dont nous disposions, pourquoi nous attendions sereinement ce procès qui donc n'aura pas lieu.

En quelque sorte, puisqu'il n'y aura pas de procès, cette offre de preuves, c'est à nos lecteurs que nous la devons. Au travers des sept épisodes que nous mettrons en ligne ces prochains jours, cette offre de preuves, la voici.

 

Je mettrais tous les articles avec les liens et donc vous pourrez aussi suivre les discussions.

J’ai même crée une nouvelle catégorie.

Mais voici aussi mon commentaire au premier article :

Bravo, du vrai journalisme d’investigation. Mais je ne voudrais pas que vous focalisiez QUE sur les CE, les pratiques que vous dénoncez existe chez d’autres « mutualistes ». Un livre déjà relativement ancien (décembre 2001) de Jean-loup Izambert « Le Crédit-Agricole hors la loi ? » semble le démontrer.

Au fond la question est : Pourquoi ces banques ont-elles voulut jouer comme des banques d’affaires ?

Charles Milhaud, dans une interview récente et aussi dans son livre continue à défendre cette thèse.
Oui vous avez raison, la crise à bon dos, mais l’exemple de <st1:personname productid="la CE" w:st="on">la CE</st1:personname>, ne doit pas rester seul.

Merci

 

Lien : En sept............

Caisses d'épargne: ses étranges contrats et commissions en Arabie saoudite
Ecureuil: les lourds secrets de l'accident financier
Ecureuil: les alertes de la Commission bancaire que personne n'a voulu entendre
Ecureuil: un «conduit» vers 500 millions de pertes
L'Ecureuil fait « Bingo ! » avec le logement social
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Outre-mer, les coûteuses opérations de l'Ecureuil Par Laurent Mauduit 

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