• France Telecom : les salarie expriment un profond malaise

    France Télécom : les salariés expriment un profond malaise

    Un questionnaire rempli par le personnel indique un fort recul du sentiment de fierté

     

                Technologia, le cabinet d'expertise a présenté, lundi 14 décembre, à la direction et aux syndicats de France Télécom les premiers résultats du questionnaire sur le stress au travail, auquel 80 000 des 102 000 salariés de l'opérateur ont répondu. Il en ressort que seuls 39 % d'entre eux se disent " fiers d'appartenir " au groupe, contre 96 % auparavant ; 65 % estiment que leurs conditions de travail se sont " dégradées depuis quelques années " ; et 39 % jugent que leur santé s'est " dégradée au cours des cinq dernières années en raison de leur activité ".

    Pour illustrer ce malaise, nous avons donné la parole à deux salariés, qui racontent leur quotidien ces dernières années. Paule (les prénoms ont été modifiés), 32 ans d'ancienneté, travaille dans un centre d'appel 10-14 (service commercial). " Nous sommes bien conscients qu'il faut nous adapter en permanence aux nouveaux produits, dit-elle. Mais l'entreprise est allée trop loin. Elle veut tout contrôler dans notre environnement : murs gris sur lesquels on a mis des slogans, interdiction de parler à son voisin, phrases types à dire au client etc. "

    Elle note aussi que son travail a été " saucissonné : il y a quelques années, quand un client demandait où en était sa demande d'Internet, j'appelais une collègue pour le savoir. Aujourd'hui, je prends son dossier, j'y inscris des commentaires et je l'envoie au service technique ou à un sous-traitant. C'est beaucoup moins intéressant et j'ai l'impression de laisser le client en plan ". Déboussolée, elle s'est rendue à une consultation de souffrance au travail en région parisienne : " Je ne pouvais plus jouer le jeu de la vente à tout prix, je ne supportais plus la passivité de mes collègues, qui acceptaient tout comme des serpillières. " Elle a finalement obtenu un poste dans un service facturation, mais se souvient des animations dans l'open space du 10-14. Parfois, un but était installé : " Si vous vendiez un service Internet, vous étiez autorisé à tirer un ballon dans le but. Si vous réussissiez, vous gagniez quelques euros. Le pire, c'est que les gens jouaient le jeu. On ne peut pas descendre plus bas. "

    Jeannie, 30 ans d'ancienneté, a été gestionnaire des marchés publics, avant de connaître la valse des mobilités subies. Elle a dû chercher un emploi en interne durant huit mois, restant " seule face à l'ordinateur, sans activité. " Puis, elle a postulé au 10-14 dans sa région, en Aquitaine. " J'étais bien contente de retrouver une activité, mais j'ai désapprouvé les méthodes de management : mise en concurrence permanente des vendeurs, flicage continu, ordres et contre-ordres dans la même journée, ventes abusives, etc. Pour obtenir des congés, il fallait se mettre à genoux ", dit-elle. Elle fait une dépression. A son retour, elle obtient un poste administratif, puis son service ferme.

    " Je suis désinvestie "

    Tout le monde est muté chez Orange. " Là, il y avait beaucoup d'arrêts de travail, des malaises cardiaques, d'accidents vasculaires cérébraux, etc. ". Nouvel arrêt de travail (deux mois et demi). " J'avais des idées noires ", dit-elle, puis elle retrouve un poste de gestionnaire. Mais dans son esprit, tout a changé. " Je me sens comme une rescapée. Je suis totalement désinvestie mais ça va beaucoup mieux. " Elle a fait le deuil du France Télécom d'avant : " C'était ma boîte, on était une famille. Aujourd'hui, il n'en reste plus rien. C'est une prison. "

    Paule aussi a tiré un trait : " J'étais fière de travailler à France Télécom. Aujourd'hui, je suis fière de résister au rouleau compresseur. " Jeannie ajoute : " Bizarrement, cette série de suicides m'a ouvert les yeux. J'ai compris que je n'étais pas seule à souffrir, mais on n'ose pas se le dire. "

    Francine Aizicovici

     

    Lien : POURQUOI LE TRAVAIL FAIT (de plus en plus) SOUFFRIR 


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