• L'affichage écologique panique la dtribution

    croissance verte

    L’affichage écologique panique la distribution  

    La loi imposera dans un an l’analyse du cycle de vie des biens de consommation courants et son affichage en magasin. Un énorme travail de concertation est en cours.

    Le calendrier nous fait peur. »Dans la grande distribution, c’est la panique. Dans un an, les distributeurs devront afficher l’empreinte écologique des biens de consommation courants. Personne ne sait encore vraiment à quoi ressemblera cette étiquette d’un nouveau genre, quels produits elle concernera, quelles notes et quels modes de calcul seront choisis. Mais le gouvernement l’a promis dans la loi Grenelle 1 :« Les consommateurs doivent pouvoir disposer d’une information environnementale sincère, objective et complète portant sur les caractéristiques globales du couple produit-emballage. »Et la loi Grenelle 2, qui doit terminer prochainement son parcours législatif, prévoit une mise en route au 1er janvier 2011. Seul répit accordé par l’Etat : les modalités de la loi, qui seront précisées par décret cette année, organiseront une introduction progressive de l’affichage, une famille de produits après l’autre.« On a fait la loi sur l’affichage avant d’en vérifier la faisabilité. La France se lance dans une première mondiale : nulle part ailleurs, on a légiféré sur le sujet »,explique Philippe Joguet, responsable du service réglementation développement durable à la Fédération du commerce et de la distribution (FCD). Personne ne conteste pour autant son objectif. Les premières expériences d’étiquettage énergétique sur les produits électroménagers ont montré, depuis 1995, combien ce levier peut influer vertueusement sur le marché : ceux dont la consommation d’énergie était en catégories C et D ont pratiquement disparu du marché et les plus vertueux (A) représentent 80 % des ventes. Il a même fallu créer des catégories de champions imprévues : A + et A ++, qui occupent déjà de 15 à 20 % du marché.

    Défi économique

    Dans les autres catégories de produits, le « consomacteur » le plus motivé dispose déjà d’une flopée de labels plus ou moins fiables, d’étiquettes énergétiques, d’allégations vertes. Mais, devant le rayon de son supermarché, c’est le grand moment de solitude. Aujourd’hui, après vingt ans de défrichage par quelques pionniers, un outil fait son apparition dans la distribution qui permet d’objectiver les qualités environnementales d’un produit : l’analyse de cycle de vie (ACV).Jusqu’ici, des ACV très poussées ont surtout été réalisées pour orienter des politiques publiques ou des décisions stratégiques d’entreprises. L’utilisation massive des ACV pour chaque produit représente un tout autre défi économique.« Il faut industrialiser cette pratique,estime Sophie Goldblum, directrice des activités développement durable d’Accenture en France.Une ACV complète coûte plusieurs dizaines de milliers d’euros par produit. Pour des cas simples comme les pâtes, on peut réaliser une ACV simplifiée de 700 à 800 euros, puis la décliner pour 100 euros sur le reste de la gamme(spaghettis, cannellonis…).Sur de longues séries, cela renchérit le produit au minimum de 1 ou 2 centimes. »Une perspective qui glace les commerçants.

    Des expérimentations

    La réglementation a poussé en 2008 plusieurs entreprises à prendre les devants et à lancer des expérimentations. Depuis, les initiatives se sont multipliées (lire ci-dessous) avec des approches souvent très différentes. Pour homogénéiser les méthodes, l’Ademe et l’Afnor ont lancé une plate-forme de réflexion avec 500 participants – essentiellement des industriels, mais également d’autres parties prenantes. Le tout organisé au sein d’une dizaine de groupes de travail thématiques : alimentaire et aliments pour animaux, électronique, hygiène et beauté, ameublement, services financiers, etc. Ces travaux sont alimentés par ceux des fédérations comme la FCD ou la Febea (entreprises de la beauté). La FCD doit par exemple rendre en mars les résultats d’une expérimentation sur l’ACV de 300 produits, dont 50 % en alimentation. Chaque groupe doit s’accorder sur sa méthode d’ACV. Par exemple, l’unité de mesure à employer est déterminante : le gramme est la norme pour l’alimentaire, mais la peinture gagne à s’afficher au mètre carré de surface couverte plutôt qu’au litre. Autre difficulté, les règles d’allocation : à qui attribuer le bénéfice du recyclage d’un matériau ? Comment répartir les impacts d’un coproduit, par exemple ceux d’une vache quand un kilogramme de l’animal produit du lait, du cuir et de la viande ? Chaque famille devra retenir trois des indicateurs les plus pertinentes sur ses impacts (climat, ressources naturelles, biodiversité, eau…).Ces travaux, dont la règle est le consensus, avancent lentement face aux âpres débats que l’enjeu suscite. Christine Cros, qui coordonne cette plate-forme à l’Ademe, reste optimiste :« Plusieurs catégories sont presque bouclées comme les produits de beauté, certains shampoings, les lessives. »Pour faciliter le consensus, l’Ademe et ses partenaires convergent vers des ACV simplifiées et centrées sur les impacts principaux.« Pour une table en bois dotée de pieds en alu, on ignorera les vis de fixation »,concède Christine Cros.

    MATTHIEU QUIRET

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