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La Chine est déjà rattrapée par le problème des retraites
La Chine est déjà rattrapée par le problème des retraites
La politique de l'enfant unique accélère le vieillissement de la population. Shanghaï teste un report de l'âge de départ
Shanghaï Correspondance
La municipalité de Shanghaï a lancé un ballon d'essai face au problème du vieillissement de sa population. Ses résidents employés du secteur privé peuvent, depuis le 9 octobre, décider de repousser volontairement l'âge de leur départ à la retraite, fixé jusqu'ici, comme au niveau national, à 60 ans pour les hommes et 55 ans pour les femmes, à respectivement 65 et 60 ans. Ceux qui choisiront de rester à leur poste pourront continuer à gagner leur plein salaire, supérieur à leur future pension de retraite, et ainsi contribuer à équilibrer le système de pensions shanghaïen, déficitaire de 10 milliards de yuans par an, soit 1,08 milliard d'euros.
La capitale économique est en première ligne du vieillissement de la Chine et compte déjà 3,12 millions d'habitants d'un âge supérieur à 60 ans, soit plus d'un cinquième de sa population. A terme, la question promet de se poser à l'ensemble du pays le plus peuplé de la planète. La politique de l'enfant unique, adoptée il y a trois décennies, a forcé sa transition démographique - la baisse parallèle des taux de natalité et de mortalité lorsqu'une nation s'extirpe de la pauvreté -, tandis que l'espérance de vie des Chinois a grimpé de 66 ans à 73 ans au cours de la même période.
Le comité national sur le vieillissement estime que le pays comptait 167 millions de personnes âgées de plus de 60 ans à la fin de l'année 2009, soit environ 12,5 % de la population, et qu'elles devraient être 200 millions dans un délai de cinq ans, puis 248 millions en 2020. A ce rythme, seulement deux actifs cotiseront pour chaque retraité chinois en 2035.
Or, si ces trente années de réformes ont suscité une progression économique fulgurante, elles ont aussi impliqué la restructuration d'entreprises étatiques qui, à défaut de prospérité, assuraient à leurs salariés une sécurité au sein de l'unité de travail, y compris à l'heure de la retraite. Ce " bol de riz en fer " a volé en éclats. En parallèle, dans les campagnes, les migrations des jeunes générations vers des régions plus riches mettent à mal la principale source de financement des retraites, la piété filiale.
Dans ce contexte, les nouvelles mesures appliquées à Shanghaï sont une manière de voir ce qui pourrait fonctionner à l'échelle du pays. Mais le vice-ministre des ressources humaines et de la sécurité sociale, Wang Xiaochu, a pris note du verdict de l'opinion publique en présentant en septembre un Livre blanc sur la population chinoise : 92 % des 200 000 internautes ayant participé à un sondage sur le site QQ ne veulent pas entendre parler d'une prolongation du nombre d'années de cotisation, a relevé le vice-ministre. D'autant que les jeunes Chinois ont en tête une autre préoccupation : trouver une place sur un marché du travail sélectif.
Pourtant, le report du départ à la retraite devra être envisagé en Chine comme il l'est dans les pays riches, estime Peng Xizhe, doyen de la faculté de politiques publiques et de développement social de l'université Fudan, à Shanghaï. " Il faut préparer l'opinion, consolider la structure familiale et organiser davantage l'épargne ", juge le professeur Peng.
Pour Liu Kaiming, directeur de l'Institut d'observation contemporaine, la solution est à trouver du côté des grandes entreprises, étatiques notamment. " Elles ont engrangé plus de 1 000 milliards de yuans de profits cette année, mais n'en ont reversé que 2 milliards à la sécurité sociale, s'insurge M. Liu. Lorsqu'elles financeront un filet de sécurité sociale, la transition sera assurée. "
Ces alarmes suscitent un débat sur le rôle de la politique de l'enfant unique, critiquée par ailleurs pour les avortements forcés et autres applications désastreuses en termes de droits humains auxquelles elle conduit encore. Les jeunes surnomment le phénomène " 4-2-1 " : à eux seuls, ils pourraient avoir à prendre en charge la vieillesse de leurs deux parents et de leurs quatre grands-parents.
Le vice-premier ministre, Li Keqiang, qui pourrait hériter du poste de premier ministre en 2012, a pourtant réaffirmé, le 21 septembre, que le gouvernement maintiendrait le contrôle des naissances, qui a fait chuter le taux de fertilité à moins de 1,8 enfant par femme.
Il n'y aura pas de solution simple à ce défi démographique, prévient Peng Xizhe, de l'université Fudan, qui préconise en attendant un certain assouplissement de la politique de l'enfant unique. Le dilemme est de taille : " La Chine doit décider lequel, du défi du vieillissement ou de celui d'un nouvel accroissement de la population du pays le plus peuplé, est le plus important. "
Le chef du planning familial du Guangdong, Zhang Feng, a de son côté expliqué récemment au quotidien Nanfang Dushibao, basé à Canton, que la province envisagerait de laisser les fils et filles d'enfants uniques avoir deux enfants à partir de 2016. Pas question, en revanche, d'abandonner complètement cette politique avant 2033. A cette date, la Chine aura atteint son " pic " de population, à 1,65 milliard d'habitants.
Harold Thibault
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Un système déficitaire de 140 milliards d'euros par an
Fonctionnement Le système d'assurance-vieillesse de base couvrait 235 millions de Chinois en 2009, selon un Livre blanc gouvernemental. Introduit en 1997, il associe en principe les retraites par répartition, destinées à financer les pensions des anciens salariés des entreprises étatiques, et par capitalisation, à hauteur de 11 % du salaire, pour les travailleurs de la nouvelle économie. Le poids des pensions des anciens salariés de la période socialiste en fait en réalité un système par répartition, déficitaire de 140 milliards d'euros par an et ne parvenant pas à couvrir les retraites des ruraux et des travailleurs du secteur informel, qui doivent s'en remettre à leurs familles.
Un futur incertain Deux chercheurs de l'Académie des sciences sociales, Yang Du et Wang Meiyan, estiment dans une étude publiée cette année que la Chine devra se tourner vers des retraites par capitalisation, le système par répartition ne pouvant pas être équilibré dans un pays qui comptera un tiers de seniors en 2050.
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Un système déficitaire de 140 milliards d'euros par an
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