• Menaces sur la reprise

    Menaces sur la reprise

    Mises sous perfusion monétaire et budgétaire, les économies semblent se refaire une santé. Mais le sevrage s'annonce très délicat.

    Le malade semble tiré d'affaire.

    Pendant une année et demie, il s'était laissé dépérir; le voilà qui reprend des forces. Les chiffres du troisième trimestre 2009 confirment la reprise de l'économie mondiale. Les Etats-Unis enregistrent - enfin - une croissance positive après dix-huit mois de baisse. Le produit intérieur brut (PIB) augmente aussi dans la zone euro et l'activité repart de plus belle en Asie, où la Chine renoue avec une croissance insolente.

    Mais ces performances sont celles d'économies sous perfusion. Sous perfusion de liquidités quasiment gratuites, fournies sans compter par les banques centrales. Sous perfusion aussi des milliards de l'argent public injecté par les Etats.

    Le traitement a sans doute permis d'éviter une dépression redoutable, mais ces remèdes de cheval ne peuvent être administrés trop longtemps sous peine de miner la confiance dans la valeur de la monnaie et dans la capacité de remboursement des Etats. Des effets secondaires apparaissent déjà. Les liquidités surabondantes alimentent la spéculation et la formation de nouvelles bulles, sur les matières premières et les Bourses. Le creusement des déficits se traduit par une explosion des dettes publiques que certains Etats risquent de payer très cher. C'est pourquoi la grande question économique du moment est celle des stratégies de sortie. Autrement dit: comment mettre fin au dopage monétaire et budgétaire sans provoquer un sevrage trop violent qui tuerait dans l'oeuf la reprise?

    La question n'est pas triviale. Il faudra en effet beaucoup d'adresse aux gouvernements dans les prochains mois pour éviter de faire replonger l'économie. Mais croire que la sortie de crise se résume à une bonne gestion des stimuli publics serait comme croire qu'il suffit de bien doser la méthadone pour guérir un drogué. Le drogué, c'est une économie dont la croissance jusqu'à la crise dépendait d'un endettement en perpétuelle augmentation et d'une destruction des ressources non renouvelables. En faisant du retour de cette croissance la priorité des politiques publiques, les gouvernements s'exposent à un échec à court terme. Plus grave: ils ne préparent pas les sociétés à vivre avec une croissance qui, demain, pourrait ne pas être - voire ne devra pas être - aussi soutenue qu'hier. Ils prolongent artificiellement un modèle insoutenable sans s'attaquer aux causes profondes de la crise.

    La grande peur que cette crise a provoquée a ouvert une fenêtre d'opportunité pour revoir en profondeur les règles du système. De plus, elle a coïncidé avec la prise de conscience d'une autre crise - écologique - imminente. Mais cette fenêtre risque de se refermer une fois la situation économique normalisée. Dans ce cas, la pire menace pour une prospérité durable est peut-être... la reprise elle-même.

     

    Sandra Moatti

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