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Les Etats-Unis placent le libre-échange dans l'impasse
Les Etats-Unis placent le libre-échange dans l'impasse
Pas un communiqué du G7 ou du G20, pas une déclaration du Fonds monétaire international (FMI) ou de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) sans la formule sempiternelle selon laquelle " il est indispensable, pour soutenir la reprise économique en cours et accélérer le développement des pays moins industrialisés, de conclure le cycle de Doha au plus tôt afin de faciliter les échanges internationaux ". Or, force a été à Pascal Lamy, le directeur général de l'OMC, de reconnaître, le 2 décembre, que la volonté de négocier faisait défaut entre ses 153 membres, à l'issue de la 7e Conférence ministérielle de l'Organisation réunie à Genève.
Au regard des ambitions d'origine, il s'agit d'un nouvel échec. Rappelons que, en novembre 2001, le cycle des négociations ouvert à Doha (Qatar) se voulait une réplique aux attentats du 11-Septembre. Dans l'esprit de ses initiateurs, l'abaissement des barrières douanières devait gonfler les exportations et contribuer à développer les pays moins avancés, de façon à détourner leurs populations d'actes désespérés.
M. Lamy a raison de dire que, depuis 2001, les négociateurs sont tombés d'accord sur " 80 % " des dossiers. Pourtant, à Cancun en septembre 2003, à Hongkong en décembre 2005 et à Genève en juillet 2008, les discussions ont débouché sur des impasses, les 20 % de problèmes restants insolubles. Grosso modo, les pays développés acceptaient de cesser de surprotéger leurs agricultures à condition que les pays en développement ouvrent leurs marchés aux produits manufacturés du Nord. Les pays du Sud - emmenés par l'Inde - demandaient à pouvoir prendre de fortes mesures de sauvegarde en cas de menaces pour leur agriculture, ce que refusent à ce stade les pays du Nord.
La paralysie de <st1:personname productid="la Conférence" w:st="on">la Conférence</st1:personname> de l'OMC à Genève est essentiellement imputable, cette fois-ci, aux Etats-Unis. En effet, Ron Kirk, leur représentant au commerce, y a jeté un froid en remettant en cause les avancées de 2008 et en déclarant que les pays émergents devaient " bouger en dehors des zones de confort pour faire les choix difficiles nécessaires ". Il semble que l'administration Obama adopte cette position dure pour obtenir des concessions qui rendraient l'accord final plus acceptable par la majorité démocrate du Congrès, pas du tout favorable au libre-échange.
La difficulté à conclure le cycle de Doha tient aussi à l'extraordinaire complexité de la négociation. Dans les années 1980, il y avait autour de la table quelques dizaines de pays et quelques centaines de produits industriels. Désormais, 153 pays traitent d'une myriade d'intérêts qu'ils défendent avec une foultitude de droits de douane, de subventions et de quotas.
Plus grave, " les gains à attendre du cycle de Doha semblent faibles ", souligne Guillaume Naudin, chercheur associé à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) : de 130 à 700 milliards de dollars, selon les experts. " Et encore au bout de quinze ans !, reprend M. Naudin. Les gouvernements peuvent se demander si cela vaut la peine d'affronter leurs opinions, auprès desquelles il est toujours plus vendeur de dire du mal des étrangers ! "
Enfin, la terre a beaucoup tourné depuis juillet 2008. La récession s'est installée et les gouvernements du Nord comme du Sud se satisfont de n'avoir pas succombé aux tentations du protectionnisme que leur réclamaient les victimes de la crise. Ils préfèrent ne prendre aucune initiative impopulaire. Tant pis si le commerce mondial, qui chutera de 9 % à 12 % cette année, n'est pas stimulé aussi vite que souhaité par une nouvelle suppression des obstacles à son développement. Enfin, le réchauffement climatique est devenu une obsession planétaire, et prend le pas - jusqu'à <st1:personname productid="la Maison Blanche" w:st="on">la Maison Blanche</st1:personname> - sur les préoccupations commerciales d'hier.
L'impasse n'est peut-être pas aussi grave qu'il y paraît pour les pays en développement qui sont devenus les plus demandeurs d'un libre-échange dont ils pensent pouvoir désormais tirer parti. Car <st1:personname productid="la Chine" w:st="on">la Chine</st1:personname> n'est pas le seul pays à avoir profité des précédentes phases de libéralisation, comme l'a rappelé Stockwell Day, le ministre canadien, à Genève : l'abaissement des barrières depuis <st1:metricconverter productid="2000 a" w:st="on">2000 a</st1:metricconverter> permis de doubler de 0,6 % à 1,5 % la part des pays les moins avancés dans le commerce mondial.
Le glissement de la croissance vers le monde en développement était éclatant dès avant la crise. Il se transpose en matière commerciale. Les pays industrialisés se claquemurent-ils pour préserver leur boeuf, leur coton ou leur riz ? Les pays du Sud multiplient les accords de libre-échange entre eux, à l'image de celui qui a été conclu à Genève entre 22 pays en développement, parmi lesquels le Brésil, l'Inde, l'Egypte, l'Iran, le Vietnam ou <st1:personname productid="la Corée" w:st="on">la Corée</st1:personname> du Sud. Ces pays se consentiront des réductions d'au moins 20 % de leurs droits de douane sur 70 % des produits qu'ils s'échangent. Gain attendu, selon <st1:personname productid="la Conférence" w:st="on">la Conférence</st1:personname> des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced) : 8 milliards de dollars. Certes, pas de quoi se passer encore des débouchés des pays riches, mais voilà une démarche symbolique d'indépendance économique qui devrait faire réfléchir au Nord.
Alain Faujas
Service Economie-Entreprises
Bizarre que pendant que l’on nous vante les vertus du libre échange tant de pays le bloque.
Faut vraiment comprendre ce capitalisme qui dit tout haut « faites ce que je vous dit, moi je fait ce qui me plait ».
Mais il y a plus grave, les idées que véhicule ce protectionnisme, un peu partout dans le monde, des choses très nauséabondes.
Maintenant la crise de 1929 à était amplifié par le protectionnisme, nous n’en sommes pas la, mais quand même attention. C’est une des menaces sur la reprise.
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