• Les Etats-Unis sortent de la récession, mais pas de la crise Par Ludovic Lamant

    Les Etats-Unis sortent de la récession, mais pas de la crise

    Par Ludovic Lamant

     

    Les Etats-Unis ont renoué, cet été 2009, avec la croissance. Mais entre l'explosion de la dette, les sombres perspectives de l'emploi et la consommation atone des ménages, l'équation américaine reste carabinée. Le gigantesque plan de relance voté en février dernier suffira-t-il ?

     1- Pourquoi l'économie américaine repart

    La première économie de la planète a fait état, jeudi 27 octobre, d'une augmentation meilleure qu'attendu, de 3,5%, de son Produit intérieur brut (PIB) au troisième trimestre 2009. Les prévisions des économistes tournaient autour de +3%. Au-delà du chiffre exact, qui importe finalement peu, c'est le signe positif qu'il faut retenir. Après quatre trimestres consécutifs dans le rouge, les Etats-Unis viennent donc de sortir de leur plus longue récession depuis les années 30. En clair, ils produisent à nouveau davantage de richesse qu'ils n'en détruisent, si l'on s'en tient à la définition (restrictive et contestable) du PIB.

    Le premier semestre de l'année avait préparé le terrain à l'embellie : après une chute de 5,5% sur les trois premiers mois de 2009, le PIB s'était nettement repris, pour ne céder «que» 0,7% au deuxième trimestre. Lawrence Summers, principal conseiller économique de Barack Obama, avait d'ailleurs tué le suspense, dans un entretien à Reuters le 21 octobre, prévenant que «le troisième trimestre a enregistré de la croissance, et de la croissance à un taux négligeable, et selon toute vraisemblance, le quatrième trimestre devrait faire de même».

    Deux explications à cette nette reprise annoncée du PIB. D'abord, les effets du plan de relance de 787 milliards de dollars adopté en février par le Congrès. Ces dépenses publiques en forte hausse avaient déjà permis de limiter la casse d'avril à juin. Surtout, le comportement des entreprises semble avoir dopé le PIB américain. Après s'être contentées d'écouler leurs stocks et de tourner au ralenti, en attendant que la demande reprenne, elles ont recommencé à produire et stocker. Un changement décisif, puisqu'aux premiers mois de 2009, le seul «déstockage» avait pesé à la baisse sur le PIB, à hauteur de 1,4%.

    Reste à savoir si cette croissance retrouvée s'avérera suffisamment vigoureuse pour créer des emplois. Tout dépend désormais, ou presque, de l'attitude des ménages américains. Vont-ils enfin se remettre à consommer à des niveaux proches de ceux d'avant 2007, malgré leur endettement massif et des perspectives d'augmentations des impôts dans les années à venir ?

      2 - Pourquoi personne n'ose s'en réjouir

     

    Il n'y a qu'à lire le dernier Livre beige de <st1:personname productid="la Réserve" w:st="on">la Réserve</st1:personname> fédérale, pour comprendre que rien n'est encore gagné outre-Atlantique. Dans ce rapport sur l'économie américaine publiée le 22 octobre, <st1:personname productid="la Fed" w:st="on">la Fed</st1:personname> fait preuve d'une prudence extrême : «Le nombre de cas où l'activité économique s'intensifie sur le territoire est supérieur à celui des cas de ralentissement, mais l'on ne peut qualifier chaque amélioration que de modeste ou de diffuse.» L'institution s'inquiète notamment de la fin du dispositif de prime à la casse et de ses effets sur le secteur automobile.

    Pas plus d'euphorie à signaler dans l'entourage d'Obama, bien au contraire. Christina Romer, conseillère du président, a prévenu, le 22 octobre, qu'il ne fallait pas s'attendre à ce que le taux de chômage, fin 2010, s'établisse «très en deçà» du taux actuel. C'est-à-dire à près de 10%, à des niveaux jamais atteints depuis 26 ans. Romer redoute en particulier que les effets du plan de relance, qu'elle a contribué à mettre au point, se dissipent dès la mi-2010, ce qui tendrait à fragiliser la croissance dès l'an prochain.

     

    Ce pessimisme, rare chez un conseiller présidentiel, a laissé la majorité des observateurs pantois : l'ex-prof de Berkeley a agité sans le dire ouvertement, le scénario catastrophe d'une rechute de la croissance l'an prochain – le double dip, disent les Américains. Cela tombe d'autant plus mal que les prochaines élections aux Etats-Unis sont prévues, justement, pour la mi-2010.

    Enfin, le grand feuilleton de la dette publique en pleine explosion (100% du PIB américain dès 2010) suscite bien des inquiétudes. Dans sa dernière livraison, The Economist redoute que la crise bancaire de l'an dernier, laisse place à une crise d'endettement plus coriace encore.

    3 - Où en est le plan de relance ?


    Constitué de dépenses publiques (507 milliards) et de baisses d'impôts (282 milliards), le plan s'achèvera fin 2010. Plus de 200 milliards ont d'ores et déjà été débloqués. La presse américaine regorge de reportages décrivant les effets très concrets de cette relance, notamment des quelque 200 milliards engagés dans des projets publics (stades, ponts, autoroutes, écoles, musées, parkings, etc.). A chaque fois ou presque, ce sont toujours les deux mêmes critiques qui reviennent. D'abord, les infrastructures ne sont pas des investissements stratégiques pour la croissance de demain. Ensuite, il faudra attendre des années (trop longtemps!) pour sentir les effets de ces investissements sur l'emploi.

    En fait, huit mois après son lancement, le plan de relance n'a toujours pas apporté les preuves de son efficacité. Sauf, à court terme, à soutenir les chiffres de la croissance. En témoigne le débat qui continue de faire rage, parmi les économistes américains, autour du «multiplicateur» keynésien. De quoi s'agit-il ? Du rendement des dollars investis dans la relance. Si, par exemple, l'on parvient à augmenter le PIB d'un milliard de dollars, à partir d'une injection d'un milliard de dollars dans la relance, le multiplicateur est égal à 1.

    Tout l'art d'une relance réussie consiste donc à faire grimper ce multiplicateur. Pour faire fructifier les investissements, on peut par exemple rétablir plus vite la confiance des ménages, pour les inciter à consommer davantage. D'après <st1:personname productid="la Maison Blanche" w:st="on">la Maison Blanche</st1:personname> (et en simplifiant beaucoup), le multiplicateur du plan de relance s'établit à 1,6 en ce qui concerne les dépenses publiques, et à 1,0 pour les réductions d'impôt. Faux, ont rétorqué d'autres économistes, qui ont fait état de rendements très inférieurs à partir de modèles d'évaluation alternatifs. Le débat est pour l'heure impossible à trancher.

    3 - Où en est le plan de relance ?


    Constitué de dépenses publiques (507 milliards) et de baisses d'impôts (282 milliards), le plan s'achèvera fin 2010. Plus de 200 milliards ont d'ores et déjà été débloqués. La presse américaine regorge de reportages décrivant les effets très concrets de cette relance, notamment des quelque 200 milliards engagés dans des projets publics (stades, ponts, autoroutes, écoles, musées, parkings, etc.). A chaque fois ou presque, ce sont toujours les deux mêmes critiques qui reviennent. D'abord, les infrastructures ne sont pas des investissements stratégiques pour la croissance de demain. Ensuite, il faudra attendre des années (trop longtemps!) pour sentir les effets de ces investissements sur l'emploi.

     

    En fait, huit mois après son lancement, le plan de relance n'a toujours pas apporté les preuves de son efficacité. Sauf, à court terme, à soutenir les chiffres de la croissance. En témoigne le débat qui continue de faire rage, parmi les économistes américains, autour du «multiplicateur» keynésien. De quoi s'agit-il ? Du rendement des dollars investis dans la relance. Si, par exemple, l'on parvient à augmenter le PIB d'un milliard de dollars, à partir d'une injection d'un milliard de dollars dans la relance, le multiplicateur est égal à 1.

    Tout l'art d'une relance réussie consiste donc à faire grimper ce multiplicateur. Pour faire fructifier les investissements, on peut par exemple rétablir plus vite la confiance des ménages, pour les inciter à consommer davantage. D'après <st1:personname productid="la Maison Blanche" w:st="on">la Maison Blanche</st1:personname> (et en simplifiant beaucoup), le multiplicateur du plan de relance s'établit à 1,6 en ce qui concerne les dépenses publiques, et à 1,0 pour les réductions d'impôt. Faux, ont rétorqué d'autres économistes, qui ont fait état de rendements très inférieurs à partir de modèles d'évaluation alternatifs. Le débat est pour l'heure impossible à trancher.

    Faut-il d'ores et déjà enclencher un deuxième plan de relance de l'ère Obama ? Officiellement, côté Maison Blanche, il est encore trop tôt pour se prononcer. Dans les faits, les économistes en sont de plus persuadés, alors que les élections de mi-mandat, en 2010, approchent. En fait, les dernières annonces présidentielles en direction des petites et moyennes entreprises, ressemblent fort à un nouveau plan de relance qui ne dirait pas son nom. Le 21 octobre, Barack Obama a en effet promis d'injecter de nouveaux fonds publics aux banques qui s'engageraient à participer à un «pool» de financement destiné aux PME en difficulté, à hauteur de 40 milliards de dollars. Parallèlement, le Congrès débat ces jours-ci d'une série de mesures «additionnelles» censées «compléter» le plan de relance de février (entre autres choses, de nouveaux crédits d'impôt pour les primo-accédants).

     

    4 - <st1:personname productid="la Fed" w:st="on">La Fed</st1:personname> à l'offensive


    C'est en passe de devenir une tendance de fond de la politique américaine : Ben Bernanke, patron de <st1:personname productid="la Réserve" w:st="on">la Réserve</st1:personname> fédérale autrefois si transparent, est monté au créneau, à plusieurs reprises la semaine dernière, pour exiger des réformes du capitalisme financier. Alors que les politiques, Barack Obama en tête, semblent de plus en plus enfermés dans une gestion quotidienne de la crise (à commencer par le suivi anxieux des soubresauts du PIB et du chômage), <st1:personname productid="la Banque" w:st="on">la Banque</st1:personname> centrale s'est trouvée un nouveau rôle : fixer le cap économique des années à venir. Bernanke plus fort que le G-20 ? Les observateurs américains ont manqué de s'étrangler.

    Lundi 19 octobre, le patron de <st1:personname productid="la Fed" w:st="on">la Fed</st1:personname> fait une sortie très remarquée sur les déséquilibres macroéconomiques, regrettant que la croissance mondiale soit trop dépendante de la consommation des ménages américains. Tout en évitant d'aborder frontalement la question sensible du dollar. Episode deux, le 22 octobre : l'institution s'empare du dossier des rémunérations des dirigeants des banques, estimant qu'il faudrait aligner les paies sur la performance de long terme de leurs établissements.

     

    Enfin, vendredi 23, dernier acte d'une semaine détonante : <st1:personname productid="la Fed" w:st="on">la Fed</st1:personname> se propose de mener davantage d'audits au sein des banques, pour connaître le volume exact de leurs fonds propres, ce «matelas» censé les protéger des crises à venir. Et suggère surtout d'imposer aux géants bancaires (les fameux too big too fail) le paiement d'une prime d'assurance. S'il est entendu que l'économie américaine ne peut se permettre la faillite de l'une de ses banques, et donc que l'Etat leur viendra en aide systématiquement en cas de coup dur, il faut, avance Bernanke, que ces grandes banques participent davantage à l'effort collectif.

    Cet activisme inédit de <st1:personname productid="la Fed" w:st="on">la Fed</st1:personname> n'a pas manqué de soulever des critiques, certains y décelant même la fin de l'indépendance de l'institution à l'égard de Washington. Il traduit en tout cas, en creux, la difficulté de l'équipe Obama à ne pas céder au court-termisme de la gestion de crise.

     

    Taux de chômage par Etats 


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