• Quand la récession apaise les tensions raciales

    Quand la récession apaise les tensions raciales

    A Atlanta, dans l’Etat de Géorgie, les difficultés économiques contribuent à rapprocher les Noirs et les Blancs.

    26.11.2009|Shaila Dewan|The New York Times

    Etats-Unis 

    A l’époque du boom immobilier, le comté de Henry, dans la banlieue d’Atlanta, n’était pas épargné par les tensions raciales. De plus en plus de Noirs se joignaient en effet aux dizaines de milliers de personnes qui affluaient en masse dans la région, approfondissant le fossé qui séparait les nouveaux venus des résidents de longue date. Mais la récession a commencé à aplanir les différences. Car Blancs et Noirs sont de plus en plus souvent côte à côte dans les salles d’attente bondées des locaux de l’aide sociale et de la banque alimentaire. Les entreprises en difficulté appartenant à des Noirs sont soutenues par des clients blancs. Et la compassion entre voisins se joue des barrières raciales.

    Au bureau d’aide aux familles et aux enfants, Keasha Taylor, une Noire de 36 ans, s’est récemment retrouvée à expliquer le fonctionnement du système à une mère de famille blanche qui attendait avec elle. “Aujourd’hui, beaucoup de Blancs ont des difficultés, commente Mme Taylor. Or nous, nous avons déjà l’habitude de la pauvreté. Pas eux.” Peggy Allgood, une Noire de 54 ans qui a perdu son travail et sa maison, et vit désormais dans une caravane, a remarqué que la crise efface les différences, qu’elles soient raciales ou sociales. “Toutes les personnes que je rencontre me disent que leurs heures de travail ont été réduites ou que leur emploi a été supprimé, souligne-t-elle. Ma voisine, qui est blanche, cherche du travail. Elle ne trouve rien.”

    La récession s’est abattue à un moment où le comté s’efforçait de s’adapter à l’évolution spectaculaire de sa démographie. En 1990, le comté était blanc à 90 %. Aujourd’hui, sa population a plus que triplé pour atteindre 192 000 habitants, dont seulement 60 % de Blancs. “Il y avait beaucoup de tensions raciales ici, mais tout le monde sait aujourd’hui que nous avons besoin les uns des autres pour survivre à la récession”, souligne Eugene Edwards, président de l’antenne locale de l’Association nationale pour le progrès des gens de couleur (NAACP). “Les gens commencent à s’entraider.” On voit se passer beaucoup de choses complètement inédites. Des femmes en Jaguar s’arrêtent devant la banque alimentaire et d’anciens millionnaires se terrent dans leurs demeures aussi magnifiques qu’invendables. Ici, les statistiques montrent que la crise frappe aussi durement les Blancs que les Noirs. En juin 2006, 55 % des familles qui recevaient des bons d’alimentation étaient noires et 44 % blanches. Ces pourcentages sont restés identiques, mais le nombre de bénéficiaires – noirs comme blancs – a augmenté d’environ 50 %. De même, en juillet 2008, 49 % des demandeurs d’allocation chômage étaient blancs et 45 % noirs. En août 2009, 49 % étaient blancs et 48 % noirs.

    Cela ne signifie pas pour autant que le comté de Henry soit un parfait laboratoire de l’égalité. Le nombre de Noirs sollicitant l’aide de l’Etat est toujours disproportionné par rapport au nombre de Blancs, comme c’était déjà le cas avant la crise. Et comme dans le reste du pays, les Noirs ont été plus de deux fois plus nombreux que les Blancs à contracter des emprunts à risques, ce qui fait que davantage de familles noires luttent pour garder leur maison. Mais l’idée que la récession contribue à aplanir les différences est largement acceptée dans le comté. Les résidents, Noirs comme Blancs, hésitent à dire qu’un groupe a été plus touché que l’autre. Selon Keasha Taylor, il reste tout de même une distinction entre Blancs et Noirs : “Ils ont un peu plus de mal que nous à faire face aux difficultés économiques, mais ils suscitent plus d’empathie que nous.”

     

    Suffisamment rare pour en parler, souvent l’inverse.


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