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    Vous avez aimé Bernard Madoff ? Vous allez adorer Andrew Hall. A la différence du premier, le second ne dort pas en prison. Il a le choix entre sa résidence du Connecticut (dont le style néoclassique rappelle <st1:personname productid="la Maison Blanche" w:st="on">la Maison Blanche</st1:personname>) ou son château vieux de 1 000 ans (mais retapé) en Allemagne. A la différence du premier, le second n'a escroqué personne. Ce trader vedette de la banque américaine Citigroup est juste en train de réclamer à son employeur les 100 millions de dollars auxquels il a droit en raison des profits qu'il lui a fait gagner en 2008.

    Premier problème : M. Hall et ses collègues ont beau être géniaux, Citigroup a eu besoin de 45 milliards de dollars d'argent public pour passer l'hiver. C'est donc le contribuable, désormais premier actionnaire de la banque, qui va devoir mettre la main à la poche pour que Citi puisse honorer ses engagements. Deuxième problème : c'est en spéculant sur le pétrole que M. Hall a gagné des millions. Sans qu'ils le sachent, c'est donc en partie " grâce " à lui, que les Américains ont payé en 2008 leur essence un peu plus cher que ce que la loi de l'offre et de la demande aurait exigé.

    L'affaire Andrew Hall est un concentré de la situation à laquelle sont actuellement confrontés les gouvernements occidentaux. Tous, peu ou prou, doivent gérer les mêmes contradictions. D'un côté, justifier devant les électeurs les milliards utilisés pour sauver les banques et, de l'autre, ne pas mettre les établissements financiers en difficulté face à leurs concurrents. Les déclarations au Monde de Christine Lagarde sont révélatrices. La ministre de l'économie compare les bonus à une drogue dont il faut se " désintoxiquer ", mais elle prend soin de dire que la solution ne peut qu'être internationale et que son rôle consiste surtout à ce que les banques ouvrent à nouveau les vannes du crédit.

    A écouter les dirigeants politiques, le G20 devrait parvenir assez facilement à un accord pour encadrer les rémunérations de la finance. Mais leurs déclarations sont trompeuses. Si le communiqué publié à l'issue du sommet de Londres est resté vague sur le sujet, c'est bien parce que, derrière les déclarations de principe, chacun cherche à préserver ses intérêts.

    Gordon Brown n'entend pas nuire à <st1:personname productid="la City" w:st="on">la City</st1:personname> en acceptant une régulation trop contraignante. Nicolas Sarkozy dénonce les banquiers, mais, étrangement, <st1:personname productid="la France" w:st="on">la France</st1:personname> n'a toujours pas rendu publiques les conventions qui lient le gouvernement aux banques aidées et qui, en principe, comportent des clauses sur les rémunérations. De même, Christine Lagarde a demandé à <st1:personname productid="la Banque" w:st="on">la Banque</st1:personname> de France un rapport sur les bonus " d'ici à la fin de l'année ". Pas avant. L'annonce récente par Nyse Euronext, la société privée qui gère notamment <st1:personname productid="la Bourse" w:st="on">la Bourse</st1:personname> de Paris, d'un transfert de salariés de Suresnes à Londres, rappelle que la concurrence intra-européenne reste rude.

    Quant à Barack Obama, il doit composer avec le Congrès et les lobbies, vent debout contre la principale originalité de la réforme annoncée (mais toujours pas votée) de la régulation : la création d'une autorité de défense des consommateurs qui aurait son mot à dire sur les produits proposés par les banques.

    On devrait en savoir plus sur la stratégie du gouvernement américain concernant les rémunérations le 13 août. C'est en principe ce jour-là que les sept entreprises américaines les plus aidées par l'Etat (dont Citigroup) doivent demander aux pouvoirs publics l'autorisation d'accorder ou non des bonus à leurs dirigeants. La partie ne va pas être facile pour le gouvernement, déjà en passe d'être considéré comme " antibusiness ".

    Pourtant, difficile de défendre les bonus. Le rapport publié à la fin du mois de juillet par le ministère de la justice de l'Etat de New York est un véritable réquisitoire. Chiffres à l'appui, sa conclusion est sans appel : " Quand les banques allaient bien, leurs salariés étaient bien payés. Quand les banques allaient mal, leurs salariés étaient bien payés. Et quand les banques allaient très mal, elles étaient aidées par les contribuables, et leurs employés étaient toujours bien payés. Les bonus et l'ensemble des indemnités n'ont pas varié de façon significative avec la diminution des profits. " En 2008, neuf banques ont accordé 33 milliards de dollars de bonus bien que leurs pertes aient atteint 88 milliards.

    Alors que les dirigeants politiques voudraient lier les bonus aux performances à long terme, les banquiers jurent que " rien ne sera plus comme avant la crise ", selon la formule de Baudouin Prot, directeur général de BNP Paribas. Est-ce si sûr ? Il y a quelques jours, Paul Krugman, Prix Nobel d'économie, notait dans le New York Times que les profits record (et donc les bonus record) de Goldman Sachs (3,4 milliards de dollars en un trimestre après une provision de 6 milliards pour les bonus) s'expliquaient en partie par les ordinateurs super-rapides de la banque, qui permettent de prendre de vitesse les autres investisseurs et d'acheter ou de vendre des actions en " une minuscule fraction de seconde avant que quiconque puisse réagir ".

    Si les gouvernements ne sont pas unis et volontaristes sur le sujet, M. Prot aura raison : demain, rien ne sera plus comme avant. Ce sera pire.

    Frédéric Lemaître

    Rédaction en chef

     

    Non, les etats le veule bien c'est pas pareils :

    Les Etats se doivent d'encadrer les rémunérations bancaires Tassin ( même plus !!!)
    Pourquoi on peut tout dire sauf s’attaquer au pouvoir actionnarial ?
    Enfin une mesure contre la démesure de la finance, le SLAM ! 


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  • Une vidéo ou on apprend vraiment beaucoup. Mais sur les marchés (a quoi ils servent ), c'est la langue de bois.


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  • Candidat de la droite française à l’élection présidentielle d’avril et mai prochains, M. Nicolas Sarkozy promet 68 milliards d’euros de baisses d’impôts supplémentaires. Au prétexte que « tout vaut mieux que de taxer le travailleur », ses projets (dont l’élimination de l’impôt sur les successions) favorisent fondamentalement les revenus du capital. Et le font à un moment où se généralisent les licenciements décidés par des actionnaires qui exigent plus de 15 % de rendement par an.

    Par Frédéric Lordon

    La société est menacée quand l’une de ses puissances, devenue hégémonique, écrase toutes les autres et les asservit, impose ses réquisits comme les seules priorités effectives et peut tout subordonner à son expansion indéfinie. Certaines sociétés ont connu la domination d’une Eglise ; d’autres ont été sous la coupe d’un parti unique ; d’autres encore craignent leur armée, plus puissante qu’aucune autre institution. La société capitaliste actuelle, toute démocratique qu’elle s’imagine, expérimente elle aussi le joug d’un groupe surpuissant, affranchi de toute force de rappel, par conséquent prêt à pousser son avantage jusqu’où bon lui semblera. Ce groupe, ignorant des limites et en proie à la démesure, c’est la finance actionnariale.

    Le pouvoir et la démesure ne tombent pas du ciel, ils sont inscrits dans des structures. Faire la généalogie de l’hégémonie actionnariale, c’est s’interroger sur les transformations structurelles qui ont libéré l’élan de la puissance financière. De ce point de vue, il suffit d’une carotte géologique sur les deux décennies écoulées pour reconstituer la prise de pouvoir de la finance. Evidemment, il s’agit là d’un exercice d’une autre nature que celui de l’anniversaire insignifiant ou de la commémoration qui fait vendre, dont le journalisme décérébré raffole, lui qui, n’ayant rien omis de la démission de M. Jacques Chirac de Matignon (trente ans) ou des voitures en feu (un an), a en revanche soigneusement laissé de côté l’événement le plus structurant de la société française sur le demi-siècle écoulé, à savoir la loi de déréglementation financière de 1986 (vingt ans).

    Des patrons sur des charbons ardents

    Autoriser ainsi les investisseurs internationaux à aller et venir librement, organiser la liquidité du marché boursier, c’est-à-dire la possibilité de vendre instantanément des blocs de titres, donc de quitter le capital d’une entreprise avec la même facilité qu’on l’avait abordé, installe les conditions de ces grands mouvements de capitaux qui vont balayer le marché et in fine faire les cours... c’est-à-dire déterminer la capacité des équipes de direction à résister aux menaces extérieures de la prise de contrôle hostile ! Or c’est bien là que se trouvent les raisons de l’extraordinaire emprise de la finance actionnariale sur les firmes et, surtout, sur leurs dirigeants. Si ne pas être à la hauteur des exigences des actionnaires signifie s’exposer à une désaffection boursière, donc à des baisses de cours qui finiront par rendre l’entreprise « opéable », on comprend sans peine l’empressement fébrile des managers à maintenir le profit à tout prix, puisqu’en bout de course, dans cette affaire, ils ne jouent rien moins que leur tête.

    Maillon à la fois faible et fort, le responsable de l’entreprise est simultanément le plus sensible aux menaces de la finance dès lors qu’elle a les moyens de le priver de son bonheur de diriger et de ses avantages en nature, bref de toute sa vie, et celui qui détient le pouvoir effectif de mettre toute l’organisation sous tension afin d’en extraire coûte que coûte le profit réclamé par les actionnaires – et de sauver sa place. Sur des charbons ardents, maintenant que ses enjeux existentiels les plus chers sont en cause, on peut compter sur lui pour cravacher « son » entreprise et lui faire rendre autant qu’elle le peut. Aussi, du sommet, descendent tout au long de la structure hiérarchique de la firme, et presque sans perte en ligne, les injonctions qui convertissent le désir de la persévérance managériale, lui-même aiguillonné par le désir de l’enrichissement actionnarial, en mobilisation productive intense. Cela jusqu’au dernier salarié, et même bien au-delà, dans tout le tissu des sous-traitants, chacun étant sommé de faire don de ses gains de productivité, captés, « remontés » et agrégés pour nourrir le tribut payé aux actionnaires.

    Les structures actuelles du capitalisme financier ont ceci d’inouï qu’elles ont levé presque toute restriction aux élans de conquête et d’accaparement des actionnaires. Quand tombent les barrières institutionnelles et réglementaires qui retenaient les puissances dominantes, celles-ci, logiquement, reprennent leur poussée et explorent à fond les nouvelles marges de manœuvre qui leur ont été concédées, car il est dans la logique de la puissance d’aller au bout de ce qu’elle peut – c’est-à-dire jusqu’à ce qu’elle rencontre un nouvel obstacle qui la force à s’arrêter. Mais ces obstacles n’existent plus, ou si peu ! Sans régulation interne ni externe, donc sans limites, le désir de la finance était voué à devenir tyrannique. Nous en sommes là.

    On peut se faire une idée assez exacte de cette divergence sans retenue au travers de l’évolution, sur à peine plus d’une décennie, de la contrainte de rentabilité imposée aux entreprises par le capital actionnarial, et de plus en plus agressivement puisqu’il n’y a pas lieu de mettre les formes quand on a tous les moyens d’exiger et d’obtenir. Au tout début des années 1990, une grande banque comme <st1:personname productid="la Banque" w:st="on">la Banque</st1:personname> nationale de Paris (BNP), confrontée à la révolution actionnariale qui s’annonce, avoue un peu piteusement un taux de profit, le ROE (1), de 2 % à 3 %. L’histoire est là pour attester que cela n’a pas empêché <st1:personname productid="la BNP" w:st="on">la BNP</st1:personname> de prospérer jusqu’ici, mais précisément cette histoire va changer...

    A la fin de la décennie, le pli est pris : la « norme » actionnariale exige 15 % ! Notre BNP, qui en 1999 se bat contre <st1:personname productid="la Société" w:st="on">la Société</st1:personname> générale, a fait bien des progrès : elle s’engage dorénavant sur un ROE de 18 %. Le milieu de la première décennie 2000 voit des entreprises de moins en moins rares proposer à leurs actionnaires des ROE de 20 %, voire 25 %. En 2006, The Economist s’extasie sur la performance de Goldman Sachs qui aura « sorti » un 40 % record (2). Bien sûr, même pour The Economist, c’est un résultat exceptionnel et qui ne saurait être généralisé. Mais on a connu l’hebdomadaire libéral plus allant, pourquoi être ainsi timoré ?

    En fait, la question doit être posée autrement : où sont les forces qui pourraient empêcher la finance actionnariale de faire du record d’aujourd’hui la norme de demain ? Comme, pour l’heure, la réponse est nulle part, on se demande bien pourquoi elle se retiendrait. Certaines entreprises l’ont parfaitement compris. Alors que le critère de maintien d’un site en activité a longtemps été qu’il ne soit pas déficitaire, Nestlé n’a pas hésité en 2005 à fermer son usine de Saint-Menet au motif qu’elle ne dégageait qu’un taux de profit de 9 % (3) quand la norme du groupe, évidemment calquée sur les desiderata des actionnaires, exige au minimum 13 %...

    L’arme de la guillotine fiscale

    Sauf à la laisser maltraiter le salariat à des degrés encore inconnus, mais qu’elle ne manquera pas d’explorer, la finance doit impérativement être arraisonnée. La démesure est la tendance de la puissance laissée à elle-même, c’est pourquoi la mesure doit toujours lui être appliquée du dehors. Le problème n’est pas simple car, des principales structures d’où la finance tire sa domination, la liberté de circulation des capitaux est sanctuarisée par les traités de l’Union européenne – fugitive pensée rétrospective pour les dévots en train de psalmodier : « l’Europe, bouclier contre la mondialisation... » Certes, les seuls combats politiques perdus à coup sûr sont ceux qu’on n’a pas menés, et l’on pourrait très bien imaginer lancer celui de la révision antifinancière des traités. On pourrait aussi avoir l’envie d’une solution moins improbable – <st1:personname productid="la Grande-Bretagne" w:st="on">la Grande-Bretagne</st1:personname> se ralliant à une mesure contre la finance... – et moins lointaine. A défaut donc de mettre à bas les structures actuelles, protégées par le droit des traités et la politique de l’Union, il faut songer à leur en opposer de nouvelles, envisageables si possible, au moins pour commencer, à la seule échelle nationale.

    Mettre une limite au désir sans limites de la finance suppose alors de borner réglementairement et autoritairement son profit, seul moyen de lui ôter toute incitation à pressurer les entreprises, leurs salariés et leurs sous-traitants, en créant donc les conditions qui rendent la surexploitation sans objet. « Réglementaire » et « autoritaire » étant les deux gros mots absolus aux yeux de l’idéologie libérale, qui offre aux puissances dominantes tous les moyens de maltraiter, mais « libéralement », il ne faut pas hésiter à les employer ni à les articuler bien distinctement pour signifier que nous avons compris la nature du capitalisme comme arène de puissances, et non comme paisible lieu de rencontre des offres et demandes, et que nous sommes décidés à en tirer toutes les conséquences pratiques. A la force, il faut opposer la force ; à celle du capital, celle de la loi – la seule à notre disposition.

    C’est l’instrument du fisc qui se chargera de guillotiner le profit du capital actionnarial – qu’il se rassure, nous lui en laisserons un peu, et aussi la tête sur les épaules. Lui en laisser un peu n’est pas autre chose qu’en revenir à la norme économique rustique selon laquelle le capital se rémunère grosso modo à la hauteur du taux d’intérêt. Des 10, 15, puis 20 % réclamés aux 3 % qui font les taux d’intérêt actuels, il y a l’exacte mesure de la dérive financière à rembobiner.

    Comme les guillotines fiscales ne font pas rouler de vraies têtes, on peut s’en servir en s’amusant un peu. Car, en l’occurrence, l’instrument tranchant pourrait être construit selon un plan emprunté... à la finance elle-même – mais évidemment quelque peu détourné de ses finalités originelles. Parmi les innombrables trouvailles du très prolifique discours de la « valeur actionnariale », l’EVA (Economic Value Added) s’est attachée à réviser la notion usuelle de profit net comptable, qui ne lui paraissait pas assez juteuse en l’état. Le « vrai » profit, dit l’EVA, c’est-à-dire celui qui fait sens du point de vue actionnarial, n’est pas le profit « habituel », la différence simple des recettes et des dépenses. Car ce calcul-là oublie en cours de route un « coût caché », injustement passé inaperçu, et que la doctrine de l’EVA porte enfin au jour : le coût du service méritoire en quoi a consisté l’apport des capitaux propres par les actionnaires.

    Ce « coût du capital », l’EVA suggère de le calculer comme somme du taux d’intérêt de l’actif sans risque (généralement les bons du Trésor à trois mois) plus une prime de risque spécifique. L’EVA a donc le culot de rebaptiser « valeur économique ajoutée » le surprofit – celui qui reste une fois qu’on a tout enlevé, y compris ce « coût du capital » – et n’hésite pas à déclarer qu’une entreprise n’est « vraiment profitable » que lorsque ce surprofit est lui-même positif. Mais elle a aussi, quoique très inintentionnellement, le bon goût de faire revenir dans le paysage une référence quantitative intéressante, puisqu’elle est effectivement située dans l’orbite des taux d’intérêt : la somme du taux de l’actif sans risque et d’une prime, voilà qui nous met par les temps qui courent autour de 5 % ou 6 % – c’est déjà plus raisonnable que les 20 % en vigueur pour le ROE.

    Evidemment, pour l’EVA, cette référence ne fait pas norme en soi, tout au contraire : elle définit simplement le minimum minimorum en deçà duquel une entreprise, quand bien même elle fait des bénéfices au sens comptable du terme, ne peut pas encore être dite profitable. Le « vrai profit » n’est compté qu’à partir de ce seuil, et assurément on l’encourage à être aussi élevé que possible...

    Retourner contre la finance actionnariale ses propres armes, c’est alors faire subir à l’EVA un double détournement. En premier lieu, ce qu’elle considère comme un plancher, il faut en faire un plafond ! – et désigner par là l’azimut général du retour dans l’orbite des taux d’intérêt (à une prime de risque près). Mais surtout, là où l’EVA n’est en fait conçue que comme un nouvel indicateur comptable, c’est-à-dire comme un critère de performance imposé aux entreprises, il faut en faire une norme bornant la rémunération actionnariale effective (lire « Une contrainte actionnariale, deux visages »).

    Or cette rémunération est constituée de trois éléments. Les deux premiers correspondent à des débours effectifs des entreprises, qui enrichissent les actionnaires par le versement de dividendes, mais aussi désormais – grande trouvaille du capitalisme actionnarial – au moyen de buy-back, opération consistant en le rachat par l’entreprise de ses propres titres. Gaver l’actionnaire de liquidités, voilà encore le moyen le plus direct de le cajoler. Mais l’expédient prend des proportions telles qu’il tourne au parasitisme à grande échelle. Les gâteries faites aux actionnaires détournent ainsi des sommes croissantes d’usages alternatifs tels que l’investissement productif ou la recherche et développement (R&D) – on ose à peine évoquer le maintien de l’emploi ou l’augmentation des salaires – en même temps qu’elle donne une illustration supplémentaire du pouvoir acquis par le capital actionnarial, mesuré ici par sa capacité à pomper impunément la richesse de l’entreprise.

    Quel est le premier geste auquel pense l’équipe dirigeante d’Arcelor pour sauver sa tête de l’opération publique d’achat (OPA) lancée par Mittal ? Gratifier les actionnaires, qui tiennent en main son destin au bout de leur ordre de Bourse, d’un grassouillet rachat d’actions de 5 milliards d’euros – on serait presque tenté de convertir en francs (33 milliards) pour mieux faire apprécier l’énormité des montants en jeu, et imaginer ce qu’on aurait pu en faire autrement...

    Il reste une dernière composante de la rémunération actionnariale effective, et pas la moindre : les plus-values. Hors les divers moyens de soutirer directement à l’entreprise sa substance, l’actionnaire peut y gagner sur le marché par le jeu spéculatif des achats et reventes. Ainsi sa rémunération globale agrège-t-elle, dans des proportions variables selon les années, les produits du prélèvement tributaire direct (dividendes et rachats d’actions) et les plus-values boursières. On nomme TSR (Total Shareholder Return) cette rémunération actionnariale effective globale rapportée au capital-actions investi. C’est au TSR qu’il faut s’en prendre. C’est lui qu’il faut ratiboiser pour convaincre les actionnaires qu’une fois un certain seuil atteint il est inutile de pressurer davantage l’entreprise pour obtenir d’elle « plus encore et indéfiniment », car tout l’excès désormais tombera, par voie de couperet fiscal, dans la poche de l’Etat.

    Où fixer ce seuil ? Précisément au niveau indiqué, à son corps défendant, par la théorie de l’EVA elle-même, soit le taux d’intérêt (de l’actif sans risque) plus un petit quelque chose (la prime de risque). Sur cette base, comment faire le calcul fiscal ? La question n’est pas simple, car des plus-values sont réalisées chaque jour de l’année, alors que les transferts par dividendes et les rachats d’actions ne sont connus qu’en fin de période. Il va donc falloir établir quelques conventions à l’esthétique incertaine pour les théoriciens purs de la finance.

    Ainsi, on peut retenir comme référence le montant total des transferts de liquidités – dividendes plus rachats d’actions – effectués l’année précédente par l’entreprise. A chaque cession boursière réalisée par un actionnaire, il lui est imputé une part T de ces transferts au prorata du nombre des titres concernés par l’opération. Ce montant T est ajouté à la plus-value réalisée, et l’ensemble est rapporté à la valeur initiale des titres vendus, ratio qui donne la rentabilité actionnariale effective – le TSR – de l’opération. Tout ce qui excède le seuil bornant réglementairement le TSR fait alors l’objet d’un prélèvement obligatoire (lire « Comment calculer le nouvel impôt ») . C’est coupant, et de bon goût.

    Il reste une question à trancher, à la fois très superficielle et très importante : quel nom donner à ce raccourcisseur de prétention actionnariale ? Pourquoi pas SLAM, comme Shareholder Limited Authorized Margin (ou marge actionnariale limite autorisée) ? On aurait pu préférer VLAN, l’équivalent français, qui saisit bien l’esprit de la chose, mais l’acronyme était plus difficile à construire. Et puis la finance se pique de ne parler qu’anglais, langue des affaires, par là réputée moderne ; donc on lui en donne. Il y a aussi qu’arraisonner la finance est un combat politique à portée évidemment internationale. Rien n’est plus souhaitable que de voir le plus grand nombre s’emparer de l’idée, pour se l’approprier, la décortiquer, trouver ses défauts présents, y remédier, pourquoi pas la rendre encore plus méchante ; bref le code du SLAM est immédiatement en open source, sa vraie place est dans le domaine public.

    Mais qu’on ne s’y trompe pas : l’internationalisation de la proposition répond à des intentions essentiellement politiques, et secondairement « techniques ». Qu’on n’aille pas, en particulier, y voir l’anticipation d’un projet qui devrait être « nécessairement international » pour venir à bout de la prévisible objection, jadis opposée à la taxe Tobin, qu’un dispositif de cette nature ferait « immédiatement fuir les capitaux hors de France ». Qu’ils fuient, ma foi, c’est bien possible, quoique dans une mesure qu’il ne faut sûrement pas exagérer. Que ce soit un problème réel, c’est déjà beaucoup plus contestable. Il est temps en effet d’indiquer la portée véritable des « bienfaits » de <st1:personname productid="la Bourse" w:st="on">la Bourse</st1:personname> au chœur des amis des marchés financiers qui ne cesse de répéter que « sans elle, pas de financement ». Car, à supposer même qu’on mette de côté la somme extravagante des nuisances en tout genre infligées aux entreprises par la tutelle actionnariale, la thèse de la « Bourse-qui-finance-l’entreprise » est tombée depuis belle lurette dans le domaine des contrevérités patentées.

    Evidemment pour s’en apercevoir, il faut avoir l’idée de mettre les apports de fonds propres en regard de tout ce que, par ailleurs, le chancre actionnarial ne manque pas de prélever. Tous calculs faits, il est apparu que dans le cas des Etats-Unis, paradis de la finance s’il en est, les prélèvements de dividendes et de rachats d’actions sont devenus supérieurs aux injections de capitaux frais, de sorte que la contribution nette des marchés d’actions au financement des entreprises est maintenant... négative ! Les marchés boursiers européens, qui n’en sont pas encore tout à fait là, en prennent le chemin, et leur contribution financière devient d’une minceur tendancielle. Si de la finance actionnariale ne reste plus que la nuisance tutélaire – sans le capital ! –, on aurait tort de redouter quoi que ce soit de grave à se passer de ses « services ».

    <st1:personname productid="la Bourse" w:st="on">La Bourse</st1:personname> et les investisseurs qui s’y ébattent s’amusent bien moins des émissions nouvelles – les véritables opérations de financement – que des étourdissantes opérations sur le marché secondaire où, si des liquidités s’investissent, elles ne font qu’alimenter l’improductive inflation des cours. La communauté financière qui n’a que l’exigence du rendement à la bouche devrait s’interroger sur le sien propre, désormais tombé à des niveaux misérables, justifiant qu’on accueille avec un calme raisonnable les cris d’orfraie qui ne manqueront pas d’être poussés à l’idée du SLAM.

    Il faudrait cependant être bien prétentieux pour estimer tenir là le dispositif en sa forme achevée, au-dessus de toute objection, la botte sans parade. L’imagination des professionnels de la finance est sans doute une qualité qu’on peut leur reconnaître sans hésiter, et proverbial est leur goût ludique des stratégies de contournement. Mais un dispositif partiellement contourné vaut mieux que pas de dispositif du tout. Et si l’idée est encore imparfaite, si des objections plus convaincantes que les jérémiades à base de « fuite des capitaux » se font connaître, qu’à cela ne tienne : parmi tous les spécialistes potentiellement concernés par cette affaire, il s’en trouvera bien quelques-uns qui, ayant d’autres projets que de contribuer à la célébration de l’état actuel des choses, voudront apporter leur savoir à sa transformation.

    Barres de fer contre portes blindées

    Plus encore que d’économistes, c’est de juristes et de fiscalistes qu’il faudrait le concours. Comment imposer les grands investisseurs internationaux – essentiellement anglo-saxons – opérant sur le marché français, mais taxables chez eux ? Est-il envisageable de prélever au niveau des intermédiaires de droit français qui passent leurs ordres ? Car on se doute bien que, pour être tant soit peu pertinent, le SLAM doit en priorité atteindre les grands concentrateurs de l’épargne collective, fonds de pension et fonds mutuels, vrais détenteurs de la force de frappe financière.

    Il faudra sans doute répondre à beaucoup de questions de ce genre et, la simplicité de son principe n’excluant pas la complexité de sa mise en œuvre, l’idée du SLAM est moins un slogan ready-made qu’un programme de travail collectif.

    D’un point de vue politique enfin – et c’est l’essentiel –, l’idée vaut moins pour ses caractéristiques techniques que pour ses propriétés d’entraînement. A supposer qu’on lui trouve tous les défauts de « plomberie » du monde, il lui reste la vertu de signifier que la puissance actionnariale à qui, non pas la société, mais une poignée d’élites partagées entre aveuglement et intéressement a décidé de lâcher toute bride finira un jour par rencontrer sur son chemin une puissance opposée, décidée à l’arrêter. A tous, et particulièrement à ces élites inconscientes, il faut souhaiter que ce coup d’arrêt soit donné le plus proprement possible.

    Car à force de violenter le corps social sans limites, puisqu’elle n’en connaît aucune elle-même, et que tous ceux qui étaient chargés de la tenir l’ont lâchée en poussant des hourras, la puissance actionnariale pourrait aussi un jour essuyer quelques retours de manivelle, mais moins gentils que le SLAM. La promenade dans le quartier des banques de Buenos Aires offre, après le krach économique de 2001, le spectacle édifiant des impacts de balle et des traces de barre de fer sur les portes blindées – comprendre : il est des seuils de spoliation au-delà desquels la population est très en colère (4).

    Ces seuils, il n’est souhaitable pour personne de les atteindre. Puisqu’il n’y a pas grand-chose à espérer des ravis de gauche et de droite qui se succèdent indifféremment aux affaires avec des projets trop semblables – comme celui de faire voter une Constitution européenne célébrant dans la partie « droits fondamentaux » la libre circulation des capitaux –, le mouvement doit venir d’ailleurs. Une idée telle que le SLAM, tout imparfaite qu’elle soit, est l’expression d’une analyse simple – le problème d’aujourd’hui, c’est la finance –, et d’un avertissement : « SLAM », c’est aussi le bruit de la porte qu’on se décide à claquer au nez des pénibles.

    Frédéric Lordon

    Biographie de Fréderic Lordon 

    Voila a mon sens un des auteurs qui lutte le plus contre les fausses vérités et la langue de bois. A savourer.


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    Par Martine Orange

    «Nous avons changé», soutenait Baudoin Prot, directeur général de BNP Paribas lors de la présentation des résultats, mardi 4 août. «Plus rien ne sera comme avant», entonnait en chœur la profession bancaire au plus noire de la crise bancaire de l'hiver 2008, au moment où elle tendait la sébile pour obtenir des milliards de l'Etat. «Je n'hésite d'ailleurs à dire que les modes de rémunération des dirigeants et des opérateurs doivent être encadrés. Il y a eu trop d'abus, il y a eu trop de scandales. Alors ou bien les professionnels se mettent d'accord sur des pratiques acceptables ou bien le gouvernement de <st1:personname productid="la République" w:st="on">la République</st1:personname> réglera le problème par la loi avant la fin de l'année», tonnait Nicolas Sarkozy lors de son discours de Toulon le 25 septembre 2008. «La seule loi du marché, c'est fini; l'autorégulation, c'est fini; les rémunérations excessives, c'est fini», insistait-il

    Et puis, tout a continué. Mais faut-il s'en étonner? L'Etat, en dépit des déclarations, n'a rien fait pour que cela change. Porté par une reprise des marchés (+12,6% en six mois pour le Cac 40), bien déconnecté de la réalité de l'économie, le monde bancaire a donc retrouvé ses bonnes vieilles habitudes: primes et bonus à tous les étages. Comme l'a révélé Libération, BNP Paribas a provisionné 1 milliard d'euros au deuxième trimestre pour assurer les bonus de ses traders à la fin de l'année. La banque essaie de nuancer la portée de l'information: il ne s'agit que des provisions, les bonus ne seront acquis qu'au vu des résultats annuels.

    Derrière, les autres banques se font toutes petites. Des bonus, elles en distribueront peut-être mais il faut attendre la fin de l'année pour vraiment savoir. Aucune transparence n'existant sur le sujet, il est difficile d'évaluer la réalité des bonus qui se préparent, d'autant qu'un certain nombre de banques ont converti une partie des rémunérations variables en fixe, afin de «conserver les meilleurs».

    BNP-Paribas, en tout cas, n'est pas la seule à se préparer à augmenter les bonus, à en juger par les résultats publiés par <st1:personname productid="la Société" w:st="on">la Société</st1:personname> générale ce mercredi. Son activité banque d'investissement et de financement, celle qui emploie le plus d'opérateurs de marché, a vu son produit net bancaire baisser de 3,7 % à 2,1 milliards d'euros au premier semestre. Elle affiche une perte nette de 426 millions d'euros sur la même période, en raison de nombreuses dépréciations d'actifs. Pourtant, ses frais de gestion –composés des salaires, des frais opérationnels comme l'informatique mais aussi des provisions pour les bonus– ont continué à augmenter de 6% à plus de 2 milliards d'euros. Pour le seul deuxième trimestre, période faste sur les marchés, les frais de gestion ont progressé de 18% pour retrouver des niveaux comparables à ceux de deuxième trimestre 2007, où les marchés nageaient en pleine euphorie. Les autres banques n'ont pas encore publié leurs comptes mais les comportements risquent peu de diverger par rapport à leurs concurrents.

    • ·  Opacité entretenue

    La critique fondamentale d'Andrew Cuomo, procureur général de New York, sur les pratiques de Wall Street s'applique à merveille aux banques françaises. «Quand les banques vont très bien, les salariés sont très bien payés; quand leurs résultats sont médiocres, les salariés sont encore bien payés; quand elles sont au bord de la faillite et ont besoin d'être sauvées par les contribuables, ils sont toujours bien payés». L'ennui est qu'il n'y a aucun Andrew Cuomo en France qui ait envie de faire la lumière complète sur les agissements des banques et de mettre en regard les aides versées par l'Etat et les rémunérations et primes versées aux salariés bancaires, de contrôler l'utilisation de l'argent public. Et l'opacité la plus complète est soigneusement entretenue par les banques sur le sujet.

    Car, même si elles ne le disent pas, elles ont continué à verser des bonus, même au pire moment de la crise à leurs opérateurs de marché, tout en recevant d'une autre main 20 milliards de fonds propres de la part de l'Etat, et plus de 60 milliards d'euros pour de refinancements de crédits à des taux privilégiés. Natixis, la filiale commune des Caisses d'épargne et des Banques populaires, a ainsi versé 90 millions d'euros à ses traders. Anné historique, il est vrai: la banque a perdu 2,6 milliards d'euros en 2008 et ses deux actionnaires principaux ont accepté plus de 5 milliards de l'Etat. Calyon, la banque de marché du Crédit agricole a enregistré une perte annuelle de 2,9 milliards d'euros. Mais ses frais de gestion ont continué à augmenter à 2,6 milliards d'euros. Le Crédit agricole a reçu 3 milliards d'euros de fonds publics.

    La banque d'investissement et de financement (CIB) de BNP-Paribas a accusé une perte de 1,18 milliard d'euros en 2008. Ses frais de gestion «notamment grâce à une forte réduction des bonus» note le rapport annuel de la banque, ont diminué de 22,4%. Ils représentaient encore 3,7 milliards d'euros. Quelle est la part des bonus? Le chiffre est confidentiel, selon la banque. BNP Paribas a obtenu 5 milliards d'euros sous forme d'actions privilégiées de la part de l'Etat. La banque d'investissement de <st1:personname productid="la Société" w:st="on">la Société</st1:personname> générale a perdu 235 millions d'euros en 2008. Mais les frais de gestion, malgré une forte baisse des rémunérations variables, comme le note le rapport annuel, ont augmenté de 5,3% à 3,4 milliards d'euros.

    Selon une étude de l'Agefi publiée en avril 2009, les bonus des traders ont diminué en moyenne de 40% à 50% l'an dernier. La baisse a affecté tous les métiers. Certains n'ont bénéficié même d'aucun bonus. Mais cela n'a pas remis en cause le fonctionnement du système. En moyenne, la part variable représente entre 100 et 150.000 euros pour les traders, qui vient s'ajouter à un salaire moyen compris entre 55.000 et 78.000 euros. Il y a bien sûr les super stars qui touchent bien au-delà du million d'euros de bonus par an. Les banques se montrent très discrètes sur leur cas, «au nom de la concurrence».

    • ·  Ethique bancaire

    Au printemps dernier, le premier ministre François Fillon avait répété que le gouvernement ne resterait pas inactif face à certaines pratiques bancaires. Après la rémunération des dirigeants d'entreprises aidées, un décret allait être pris «visant à interdire toute distribution de stock options, tous les bonus dans les entreprises aidées». Le projet a été oublié.

     Le code éthique mis en place par la profession est censé largement suffire pour mettre un terme aux abus. Celui-ci prévoit de prendre en compte dans le calcul des rémunérations variables les coûts liés des opérations jusqu'à leur terme et d'étaler les bonus en tenant compte des résultats à moyen et long terme. Aller plus loin, expliquèrent les banquiers, revenait à faire courir un risque de déclassement pour les banques françaises, les meilleurs traders fuyant vers des lieux plus compréhensifs. A terme, ce serait toute <st1:personname productid="la Place" w:st="on">la Place</st1:personname> de Paris qui serait pénalisée. Le pouvoir s'inclina donc devant cet argument massue, demandant toutefois, un code de bonne conduite pour les entreprises aidées.

     Dans un rapport publié en juin sur les aides au monde bancaire, <st1:personname productid="la Cour" w:st="on">la Cour</st1:personname> des comptes dresse un premier constat de ce code de bonne conduite. Les banques aidées se sont engagées, note-t-il à «présenter à <st1:personname productid="la Commission" w:st="on">la Commission</st1:personname> bancaire, dans les six mois suivant la conclusion de la présente convention, une politique adaptée de rémunération des opérateurs de marché, permettant à <st1:personname productid="la Commission" w:st="on">la Commission</st1:personname> bancaire d'en apprécier l'impact sur le profil de risque du Groupe. Il s'agit donc d'un engagement limité à l'obligation de présenter un rapport à <st1:personname productid="la Commission" w:st="on">la Commission</st1:personname> bancaire, de surcroît assez flou: aucune disposition ne précise même les grandes lignes de ce que doit être une politique adaptée de rémunération. En outre, le manquement éventuel à cette obligation n'est assorti d'aucune sanction directe. »

    Bilan: les banques qui ont répondu à <st1:personname productid="la Commission" w:st="on">la Commission</st1:personname> bancaire semblent avoir des interprétations très différentes de leurs engagements. Certaines prennent toutes les activités, d'autres non, incluent de façon variable les risques, s'engagent à ne pas verser de nouveaux bonus mais maintiennent ceux qui existaient au préalable. Bien sûr, les filiales étrangères ne sont pas incluses dans le périmètre ce qui donne une plus grande latitude d'action.

    La provision de 1 milliard faite par BNP Paribas pour honorer le versement à venir des bonus illustre en tout cas la relativité de la prise en compte du long terme pour les rémunérations variables. Tout reste calculer trimestre par trimestre, comme au bon vieux temps.

    L'impuissance organisée de l'Etat

     Sans doute est-ce l'été. Mais le gouvernement est jusqu'à présent resté muet sur l'affaire des bonus. Il découvre comme tout le monde ce qui se passe dans les banques. Et les exhortations de Christine Lagarde, qualifiant la culture des bonus garantis comme une «honte absolue» n'ont pas suffi à mettre un frein à ces pratiques.

     En renonçant à prendre la moindre disposition contraignante à l'égard des banques aidées, il s'exposait à se retrouver dans une telle situation. A maintes reprises, des économistes comme des députés l'ont mis en garde contre cette excessive confiance à l'égard des banques. L'utilisation de l'argent public, ont-ils rappelé, devait au moins être contrôlée. Sans aller jusqu'à des interdictions ou des textes législatifs contraignants, le pouvoir s'est même privé d'avoir au moins un rôle de modération, en refusant de siéger dans les conseils d'administration des banques aidées. En présence de ses représentants, les directions des banques auraient-elles eu la même facilité à accorder des bonus? En tout cas, il leur aurait au moins fallu s'expliquer de façon approfondie sur les modes de rémunération qu'elles entendaient mettre en œuvre. Là, rien, aucun contrôle, aucune demande.

     Ce refus d'exercer le moindre rôle dans les banques aidées est critiqué, y compris par <st1:personname productid="la Cour" w:st="on">la Cour</st1:personname> des comptes. «Dans la position où il se trouve, l'Etat supporte les mêmes risques qu'un actionnaire normal: il peut être amené, comme tout actionnaire, à supporter le coût de mauvaises décisions de gestion. Mais n'étant pas représenté dans les organes de gouvernance, il ne peut émettre d'opinion sur ces décisions de gestion et se prive ainsi d'une source d'information de première importance. L'Etat, pour protéger au mieux ses intérêts patrimoniaux, doit donc se donner les moyens d'être informé des décisions prises au sein des établissements bancaires, qui sont susceptibles d'affecter la valeur de sa participation», insiste-t-elle. «Par conséquent, ajoute-t-elle, si les concours publics devaient être significativement accrus ou prolongés dans le temps, le dispositif actuel devrait être revu, afin d'envisager la nomination par l'Etat de représentants au sein des banques.»

     Depuis, la suggestion de <st1:personname productid="la Cour" w:st="on">la Cour</st1:personname> des comptes semble avoir été enterrée. Nicolas Sarkozy veut bien continuer à parler de la réforme du capitalisme, faire de grandes déclarations dans toutes les instances internationales. Le prochain sommet du G20 aux Etats-Unis en septembre va lui donner l'occasion de reparler abondamment du sujet. Mais lorsqu'il s'agit seulement de veiller à la bonne utilisation de l'argent public, d'imposer un minimum de contreparties aux aides publiques, plus rien n'est exigé, même pas la transparence. Le hold up du monde financier peut continuer en toute impunité.

     

    Je publie cet article car il retrace vraiment ce qui se passe, mais il est Largement trop gentil. Maintenant il faut réagir et c’est à nos politiques de le Faire.
    De plus si ces messieurs les banquiers et/ou Traders se trouvent pas assez bien payés mais qu’ils partent qu’ils aillent ailleurs. Je pense qu’ils y aura des déçut. Cette histoire de l’excellence pour certain j’aimerais bien que l’on juge sur pièce (car après tout ils ont réussit un sacré festival).

    Le marché des matières premières est exposé aux caprices des traders 

    Je mets cet article qui finalement tombe assez bien , pour montrer les "dégats"  que font les traders. Le coté pervers des choses. c'est pas les rémunérations, mais les conséquences sur la vie "réelle" et les gens qui produisent, autre chose que du virtuel.

    La question est la.



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