• Le gendarme de <st1:personname productid="la Bourse" w:st="on">la Bourse</st1:personname> émet deux alertes   sur des fonds étrangers   ( Madoff n’a pas suffit)

    Malgré l’ampleur de la crise financière et les nombreuses fraudes révélées ces douze derniers mois, plusieurs sociétés tentent toujours d’attirer le chaland avec de juteux rendements. Deux d’entre elles, Eurowork Limited et Eternity Funds, viennent de faire l’objet d’alertes de la part de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Premier point commun : la promesse d’un très haut rendement – 10 % par an dans le cas d’Eternity Funds, de 12 à 50 % par mois dans le cas d’Eurowork Limited. Deuxième point commun : toutes deux sont basées à l’étranger et ne disposent pas de l’agrément de l’AMF, une autorisation écrite indispensable pour pouvoir démarcher investisseurs institutionnels ou particuliers sur le sol français. Internet, cependant, permet à ces deux sociétés de proposer leurs services dans le monde entier. Le cas d’Eternity Funds est, à ce titre, révélateur. Pour ce dernier, le gendarme de <st1:personname productid="la Bourse" w:st="on">la Bourse</st1:personname> se montre particulièrement clair : il« recommande aux investisseurs de ne pas donner suite[à ses]sollicitations. »Fondation privée domiciliée à Curaçao, dans les Antilles néerlandaises, Eternity Funds indique ni plus ni moins sur son site que le capital investi par ses clients sera« bloqué ».En clair, dès lors qu’une personne décide de lui confier son argent, celle-ci ne pourra plus le récupérer. Un fait curieux que l’intéressée justifie en disant que c’est là la condition sine qua non pour mener à bien sa stratégie d’investissement et garantir un rendement de 10 % par an et à vie. Ce genre de contrats, dits « perpétuels », est interdit en France. Mais visiblement autorisé offshore.

    Recette miracle

    Créé le 1er juillet 2009, Eternity Funds ne dispose d’aucun « track record », n’apporte aucune indication sur le niveau de ses fonds propres et ne précise pas dans le détail les ingrédients de cette recette miracle, source de retours sur investissement hors du commun. La fondation se borne à dire que les encours gérés seront alloués de manière très diversifiée. Une méthode qui, en principe, a plutôt tendance à faire rapprocher les taux de rendements de ceux des emprunts d’Etat, par essence moins risqués et bien inférieurs à 10 %. Ni le parcours ni les noms des gérants d’Eternity Funds n’apparaissent sur le site. Contacté par téléphone, l’un des créateurs de la fondation, Léo Golovine, trente-cinq ans, a assuré que le dépositaire des encours d’Eternity Funds était la banque suisse Credit Suisse, dont le nom ne figure pas sur son site. Egalement contacté par téléphone, l’établissement helvétique n’a pas souhaité faire de commentaires.


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  • Après une dévaluation, le Vietnam suscite l’inquiétude  

    Les autorités ont décidé de dévaluer le dong. Une mesure non dénuée de fondement, mais qui a suscité les craintes des investisseurs, après la quasi-faillite de Dubaï.

    Après Dubaï, le Vietnam sera-t-il le prochain sur la liste ? Depuis que les autorités de Hanoi ont opté, mercredi dernier, pour une dévaluation du dong (la devise vietnamienne) en même temps qu’une hausse des taux d’intérêts, le pays d’Asie fait face à une fébrilité nouvelle sur les marchés. Pour preuve : les credit default swaps (CDS), qui permettent d’assurer un emprunteur contre un éventuel défaut de paiement, se sont subitement envolés ces derniers jours. Pour la seule journée de jeudi, le CDS du Vietnam s’est apprécié de 36 points de base (seul Dubaï avait fait pire ce jour-là), pour atteindre 248 points. Cela signifie, concrètement, que le coût à payer pour s’assurer contre un défaut de paiement du Vietnam s’établit à 2,48 %. Un niveau qui correspond à une probabilité d’un défaut de paiement dans dix ans d’environ 34 %, selon des calculs de Morgan Stanley.

    Chute des exportations

    De fait, le Vietnam présente des déséquilibres financiers structurels, que la crise internationale n’a fait qu’aggraver. Le déficit commercial est en train de se creuser. En novembre, il atteignait 1,75 milliard de dollars, contre 1,66 un mois plus tôt. Les exportations ont en effet chuté de 11,4 % au cours des onze premiers mois de l’année par rapport à la même période de 2008. Or les investissements étrangers ont également fortement chuté cette année : entre janvier et novembre les engagements se montent à 19,7 milliards de dollars. Un chiffre à comparer aux 70,6 milliards promis sur les onze premiers mois de 2008 ! Dans ce contexte, ni le commerce extérieur ni les investissements ne fournissent assez de devises étrangères au pays, qui affiche un déficit courant permanent. D’où la question : Hanoi serait-il en mesure de faire face à une attaque spéculative ?Sur place, pourtant, on insiste sur le caractère excessif de cette réaction du marché. Comme le confie un banquier,« objectivement, c’est à l’automne 2008 que la vulnérabilité du pays était la plus nette. Ce qui se joue aujourd’hui est au contraire une certaine normalisation de la situation ». Normalisation ? En un sens, oui, car depuis des mois, le taux de change officiel du dong vietnamien avait perdu toute crédibilité. Au marché noir, les opérateurs étaient prêts à payer le dollar plus cher. Par cette baisse de 5,44 %,« la banque centrale ne fait que prendre acte d’un état de fait », poursuit le même banquier. Il n’en reste pas moins que le timing n’a probablement pas été le bon.

    Gabriel Grésillon

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  • INTERVIEW

    MICHEL LALLEMENT SOCIOLOGUE, SPÉCIALISTE DU TRAVAIL AU CNAM ET AU CNRS

    « Les entreprises ne savent plus cultiver le plaisir de travailler »  

    Comment expliquer une telle rupture du lien entre les entreprises et les salariés?

    On aurait tort de n’y voir qu’un mouvement d’humeur ou un accident de l’histoire dû à la crise. Ses racines sont profondes : cela prend corps dans les années 1980 où le partage de la valeur bascule en faveur des profits, se poursuit dans les années 1990 avec le durcissement des conditions de travail et s’accentue ensuite avec la financiarisation de l’économie. C’est cette accumulation de dérives à leur détriment qui pousse aujourd’hui les salariés à bout. La crise a juste accéléré le phénomène, en mettant en lumière les limites de ces logiques.

    A-t-on franchi avec la crise un véritable cap?

    Il faut bien noter que le rejet porte plus sur le fonctionnement global du système économique que sur les notions même d’entreprise ou de travail. La valeur travail reste forte. Le sentiment du travail bien fait, la satisfaction du client restent des aspirations fortes des salariés, mais les entreprises ne savent plus cultiver ce plaisir de travailler. Le malaise né du sentiment d’être obligés de travailler mal, trop vite, en étant gérés comme des marionnettes, victimes du dogme de la flexibilité pour la flexibilité. L’étau se resserre. Avant, un salarié pouvait se réfugier dans une position de retrait, en faisant juste proprement son travail, sans plus. Aujourd’hui, la pression et les exigences sont telles que soit on se plonge dans son travail et on peut alors encore s’y épanouir, soit on décroche totalement, avec un vrai phénomène de rejet. Il n’y a plus d’entre-deux.

    Quel est l’impact des modes de management moderne?

    Les organisations matricielles, où tout le monde reporte à tout le monde, génèrent des injonctions contradictoires : prospecter plus de clients tout en réduisant ses frais, accélérer les cadences mais soigner la qualité, etc. On demande aux salariés, en bout de chaîne de grandes machines très bureaucratisées, d’en assumer toutes les contradictions dans une ambiance de « flicage » permanent. C’est très lourd à porter, en témoigne le développement des nouveaux maux du travail : le harcèlement, le stress, la dépression… On surestime actuellement un peu trop leur essor, mais il doit nous alerter. Il règne encore dans les entreprises le sentiment que c’est un simple moment à passer et on se contente d’essayer de limiter la casse, sans réflexion de fond. C’est le règne du court-termisme, qui débouche sur une courte vue.

    Comment les salariés s’adaptent-ils à ces contraintes?

    La notion de « collectif rapproché » de travail redevient essentielle. Les salariés ont pris conscience de l’importance de se serrer les coudes face à la pression et à des ordres de plus en plus jugés absurdes. Ils s’arrangent et se couvrent en recréant leur propre organisation de proximité. C’est la réponse par le bas aux formes d’individualisation développées et imposées par le haut. Les vrais problèmes, et les drames, arrivent quand des salariés se retrouvent vraiment isolés. La question de la mobilité est alors essentielle : on souffre d’autant plus qu’on n’a pas le sentiment de pouvoir sortir de cette impasse en changeant de travail. Sur ce point, la crise de l’emploi a fait des ravages. Le rôle des managers directs est aussi central. Soit ils catalysent les problèmes, soit, dans la majorité des cas, ils protègent leurs équipes en faisant tampon entre les exigences d’en haut et la réalité du terrain. C’est pour cela qu’ils restent épargnés par les critiques des salariés, qui leur savent gré et ont bien conscience de la difficulté de l’exercice.

    Comment regagner la confiance des salariés?

    Tout salarié a fondamentalement besoin de reconnaissance sociale : on veut bien travailler beaucoup, mais à condition que l’entreprise nous valorise. Le salaire, les primes, les bonus, ne sont qu’une petite part de cette reconnaissance. Les salariés manquent cruellement de petits gestes simples au quotidien, des félicitations, des encouragements… Il ne suffit pas de le dire une fois par an, au passage, lors d’évaluations annuelles très codifiées. La manière dont l’entreprise apporte de la reconnaissance est encore très manipulatrice. Par exemple, quand on désigne l’employé du mois, on met en réalité les gens en concurrence. Il faut aussi réintroduire de l’écoute. Beaucoup ont le sentiment que leur avis n’est jamais pris en compte, ni même sollicité. C’est très démobilisant.

    Les grandes entreprises développent les politiques sociales les plus généreuses, or ce sont les plus vivement critiquées par les salariés. Comment expliquer ce paradoxe?

    C’est un mécanisme classique de « frustration relative ». Les grandes entreprises sont l’incarnation des dérives précédemment citées et on y retrouve les écarts les plus criants entre des salariés qui travaillent beaucoup et des dirigeants qui leur semblent évoluer dans un univers parallèle. C’est la perception personnelle et directe de ce décalage qui y nourrit les critiques et les frustrations, même si on y est mieux payé qu’ailleurs.

    Les entreprises affichent de plus en plus leur «responsabilité sociale», mais les salariés les jugent à une large majorité «irresponsables».

    L’effet de toute la rhétorique sur leur responsabilité sociale est complètement tombé. Les salariés constatent dans leur quotidien le décalage entre les discours et les actes. Ils entendent parler de solidarité, mais voient bien se déployer des politiques d’individualisation, ils entendent les discours sur la diversité, mais ne la voient pas se déployer… Ils ne sont plus dupes et savent que c’est avant tout un discours destiné à rassurer les actionnaires et séduire les jeunes diplômés. Là aussi, la crise a mis tout cela encore plus à nu.

    Pourquoi, malgré leur souffrance, les salariés développent-ils une telle méfiance vis-à-vis des syndicats censés les protéger?

    C’est un phénomène sociologique au long cours. La nature du salariat a beaucoup évolué, avec notamment une élévation du niveau moyen d’éducation. Le rapport à l’action collective n’est plus pieux, sacralisé, comme il a pu l’être pour la génération précédente. Dans un contexte d’individualisation du travail, les salariés délèguent de moins en moins leurs intérêts. Ils exigent plus de transparence et de démocratie directe afin d’avoir les moyens de s’exprimer personnellement. Le syndicalisme n’a pas encore su s’adapter. Il s’est institutionnalisé et a créé des professionnels de l’action syndicale qui ont progressivement perdu contact avec la base.

    PROPOS RECUEILLIS PAR DEREK PERROTTE

     

    POURQUOI LE TRAVAIL FAIT (de plus en plus) SOUFFRIR 


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