•  Les habitants de Mouroux, dans <st1:personname productid="la Seine-et" w:st="on">la Seine-et</st1:personname>-Marne, vivent à la campagne et pourtant ils ne trouvaient pas de produits locaux. La mairie a demandé à un agriculteur de cultiver ses terres afin que la population puisse bénéficier de fruits et légumes sains

     





    Il y a des communes où l'on veut garder son bureau de poste, d'autres son boulanger, son médecin ou même son curé. Mouroux, 4 700 habitants, veut avoir " son " agriculteur. Un maraîcher, plus précisément, qui fournira fruits et légumes de saison, plutôt bio et, si possible, bon marché. Elle croit l'avoir trouvé en la personne de " Christophe ", comme tous l'appellent déjà sans pour autant le connaître.

    Car pour beaucoup, c'est bien un comble de vivre entourés de champs dans cette Seine-et-Marne restée agricole, et de ne pas trouver de produits locaux. Des exploitants, il en reste une dizaine à Mouroux, mais ils alimentent le marché national, voire international. Pis, ces " indécrottables " polluent sols et rivières avec leurs produits chimiques, s'inquiètent leurs voisins.

    L'idée de trouver un agriculteur à son goût vient de la mairie. " Il y a <st1:metricconverter productid="4,5 hectares" w:st="on">4,5 hectares</st1:metricconverter> de terres en friche au centre de la commune et qui lui appartiennent, on s'est dit qu'on allait les prêter à qui voudrait les cultiver ", raconte Jean-Louis Bogard, adjoint à l'environnement (sans étiquette) et commercial chez Orange. L'équipe municipale décide donc, en janvier, de proposer la création d'une Association pour le maintien d'une agriculture paysanne (AMAP), un partenariat entre des consommateurs, qui reçoivent des fruits et légumes toutes les semaines, et un agriculteur, dont le revenu est garanti par le préachat de sa production.

    Lancé au Japon, adopté aux Etats-Unis, le système est victime de son succès en France. Les groupes de consommateurs doivent s'armer de patience pour dégoter un producteur. Surtout en Ile-de-France, où le foncier vaut de l'or. L'avantage, avec le prêt des terres, c'est que les choses seront plus faciles.

    Informés par la presse municipale ou le panneau lumineux communal, 130 habitants sont venus à la première réunion, séduits par l'idée de consommer mieux. Apparemment, l'idée a fait son chemin. Au bord de <st1:personname productid="la RN" w:st="on">la RN</st1:personname> 34, qui relie Coulommiers à Paris et coupe le bourg en deux, Intermarché et Hyperprimeur viennent de se mettre à vendre du bio. Chez le second, dans la " barquette ratatouille ", l'oignon vient des Pays-Bas, le poivron d'Espagne et les tomates du Maroc. " Ils n'ont pas compris notre démarche ", persifle M. Bogard. Lui, veut du local. Il veut un agriculteur pour Mouroux.

    Les céréaliers du village ont décliné sa proposition de cultiver les terres communales, puis le réseau AMAP a suggéré de contacter un lycée agricole bio. Deux candidats étaient partants. Mais Mouroux a vite déchanté. Avoir des terres ne suffit pas, il faut de l'argent pour investir dans les bâtiments et le matériel. Et il aurait fallu deux ans avant de pouvoir déguster le premier légume.

    Or, désormais, les habitants sont pressés. Alors que la mairie s'apprêtait à procéder par petite annonce, certains ont pensé à Christophe. Ce maraîcher n'avait pas été contacté. Il habite Mouroux, mais ses terres sont à Coulommiers, à <st1:metricconverter productid="3 kilom│tres" w:st="on">3 kilomètres</st1:metricconverter>. Vendant sur les marchés, il hésitait à abandonner. Avantage de l'opération : il pouvait fournir, dès juin, une large gamme de produits. Inconvénient : il n'utilisera pas les terres de la mairie, il a ce qu'il faut.

    Va donc pour Christophe. Mais Jean-Louis Bogard ne perd pas espoir : " Un jour, notre parcelle sera cultivée ", lâche l'élu. Déjà, il pense préempter des terrains dans les bois, pour des vergers. Et voit loin : " Nous pouvons servir d'exemple. Des communes qui ont des terres, il y en a plein. "

    Parmi les " Amapiens ", il y a Linda Hengy. Jamais elle n'avait entendu parler du réseau, mais aussitôt elle y a vu des similitudes avec sa " philosophie ". " Au Canada, il y a des magasins de producteurs. En France, on trouve ça rétrograde, il faut que les mentalités évoluent ", juge-t-elle.

    D'origine algérienne, cette mère de cinq enfants a quitté la proche banlieue il y a cinq ans pour vivre là, à <st1:metricconverter productid="50 kilom│tres" w:st="on">50 kilomètres</st1:metricconverter> de Paris. Son mari est " responsable maintenance chez un sous-traitant de Citroën Aulnay ". Les Hengy vivent chichement. Linda n'a rien d'une militante et, chez elle, il n'y a pas de bio à table - " une arnaque ". En fait, elle veut seulement bien nourrir ses enfants et ne plus " être prise pour une imbécile ". Jusque-là, elle achetait tout chez Leclerc. " Michel-Edouard parle beaucoup, mais il fixe les prix qu'il veut. Or ils ne dépendent pas des producteurs, mais de jusqu'où le client est prêt à aller ", s'énerve cette abonnée à la newsletter de 60 millions de consommateurs.

    Comme sa famille, celle de Nadia Ayadi-Boukrourou n'appartient pas aux privilégiés, du moins financièrement parlant. Ancienne directrice de la communication d'un groupe d'édition, cette jeune femme a arrêté de travailler en arrivant à Mouroux, après la naissance de ses enfants, il y a quelques années. Son mari, prof de maths, a décidé de ne plus dispenser que des cours particuliers. " On me dit : "T'es riche pour manger bio". Non. Mais je n'ai pas d'écran plat, ma télé a 15 ans et je pars en vacances dans ma famille ! ", énumère-t-elle. Chez elle, plus de plats cuisinés, quasiment pas de médicaments non plus, et une lecture régulière du Canard enchaîné, notamment pour ses articles sur les pesticides.

    Son mari, pourtant, s'inquiète qu'elle s'engage à payer, même s'il n'y a rien dans le panier. " Quand il sera peu garni, j'irai compléter ailleurs sans rien lui dire ", rigole-t-elle. Et elle sait que ce sera le cas s'il grêle ou s'il gèle. Le prix fixé est de 15 euros par semaine, pour 6 à 7 kilos de légumes, afin que le producteur gagne 2 000 euros brut par mois.

    Sophie Lecoeur adhère à l'idée de lui garantir un revenu, mais veut en avoir pour son argent. " Je compte que cela me revienne moins cher que le marché, car tout le monde doit s'y retrouver ", insiste cette professeure de vente en lycée professionnel. Surtout, elle veut du bio, rien que du bio.

    Vu les attentes et les intérêts des uns et des autres, Michel Saint-Martin, le président de l'AMAP, sait que sa tâche sera difficile. C'est son expérience qui a poussé ce retraité à se présenter. Ce militant écologiste avait, un temps, cultivé un " jardin communautaire " avec des amis. " Moi qui suis là-dedans depuis trente ans, j'ai été surpris par l'engouement des gens. Je n'avais pas saisi la montée de la sensibilisation aux méfaits des pesticides, du besoin de contrôler ce qu'on mange et de s'impliquer ", avoue-t-il.

    Ce qui l'a séduit, aussi, c'est le " lien social ". " Cette AMAP ne sera pas un groupe de copains bobos ", dit-il calmement. Comme le projet est initié par la mairie, il y a un vrai brassage, même si, il faut le dire, les plus défavorisés et les plus aisés sont plus rares. La volonté de la mairie de réserver quelques paniers au centre communal d'action sociale le réjouit. Lui habite un hameau chic, Coubertin, havre de paix pourtant tout proche de <st1:personname productid="la RN" w:st="on">la RN</st1:personname> 34 fréquentée par 20 000 véhicules par jour.

    Il sait bien qu'il va devoir refréner les enthousiasmes : déjà certains voudraient étendre le projet aux fromages, oeufs, voire à la farine bio pour faire du pain. Mais aussi les exigences : d'autres aimeraient que " Christophe " aide des jeunes à s'installer sur les terres communales, ou qu'il accepte une deuxième AMAP et ne produise ainsi plus que pour le réseau, donc exclusivement bio.

    " Il y en a qui ne se rendent pas compte du travail que cela représenterait pour lui. Il faudra en discuter ", prévient le président. En tant qu'ancien chef d'entreprise, il sait qu'il va falloir jouer serré pour que le projet soit viable. S'il proscrit le recours à certains produits chimiques, il ne dit pas non à tous, car il estime que le prix doit rester raisonnable et la récolte assurée.

    Et Christophe, il en pense quoi ? " Cela va être sympa. " Pas très bavard, timide peut-être, ce qui détonne avec les futurs adhérents, le maraîcher, la trentaine, imagine qu'il sera plus disponible pour sa famille. Il se réjouit aussi à l'idée qu'il n'y aura plus d'invendus, donc pas de gâchis. Si la greffe prend, dans un an, il arrêtera les marchés et se consacrera aux AMAP, " en plein boom ".

    Mais il lui semble évident que tout ne sera pas simple. " C'est un métier, pas du jardinage du dimanche. Je sais que certains risquent de ne pas m'aimer. " Il sera à l'écoute, promet-il, mais il faudra aussi qu'on lui fasse confiance. Le bio ? " C'est cher parce que cela demande trop de main-d'oeuvre. Cela me dérangerait qu'il n'y ait que trois ou quatre légumes dans les paniers ", dit-il, pensant aux moins aisés. Mais déjà il n'utilise quasiment plus de produits chimiques. L'aide des adhérents pour désherber, justement ? " Il faut être réaliste. Après une demi-journée une binette en main, ils auront des ampoules. Mais ils seront les bienvenus, il n'y aura pas de clé au portail. " Le choix des légumes ? " Je ne ferai pas des panais pour cinq ou des navets pour dix, il faudra qu'ils s'accordent. " Et s'ils veulent des asperges, il s'y mettra, mais ils devront attendre deux ans pour en obtenir en quantité.

    Surtout, l'idée d'avoir à faire à une clientèle avertie le ravit. Il imagine qu'elle raffolera de ses salades abîmées, de ses tomates tachées et ne demandera pas de courgettes pour la soupe en décembre, comme sur les marchés. S'il ne pipait mot, il pensait très fort : " Autant rajouter de l'eau. "

    Laetitia Clavreul

     


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  • Les monnaies complémentaires se multiplient. Elles prennent la forme de crédits mutuels, de SEL (système d'échange local), de SOL (abréviation de solidaire), de devises régionales, ou encore de bons de réduction. Une volonté de renouveler la finance

     

     

    Ne dites pas à Richard Canonica qu'il contribue à changer le monde, il croit qu'il est banquier... Et c'est d'un ton placide, avec un bel accent helvète de Neuchâtel, qu'il explique au journaliste français étonné que <st1:personname productid="la Banque Wir" w:st="on">la Banque Wir</st1:personname> existe depuis 1934, et que, oui, elle gère sa propre monnaie, et que, ma foi, ça marche bien : 60 000 entreprises participent au système. Bien sûr, on a été un peu prudents, on visite tous les clients avant d'ouvrir un compte. Ah, un détail, les wirs ne rapportent pas d'intérêts.

    Si M. Canonica est très heureux que vous l'appeliez, il n'est pas du genre à vous promettre que sa banque se pliera en quatre pour vous, et qu'il multipliera vos économies par miracle. " On vise le long terme ", dit-il. Et, en passant : " C'est une opportunité pour résister à la mondialisation. " En fait, <st1:personname productid="la Banque Wir" w:st="on">la Banque Wir</st1:personname>, dont M. Canonica se présente comme " le technicien ", est un archétype des systèmes monétaires indépendants que de plus en plus de groupes divers veulent créer à travers le monde : elle crée et gère sa propre monnaie.

    Elle est née en Suisse en 1934, au cœur de la crise économique, de l'union d'une quinzaine de petites entreprises : celles-ci voulaient pouvoir s'échanger leurs produits, alors même que, faute d'argent, le commerce était au point mort. L'idée était de s'ouvrir des crédits mutuels au sein d'un Wirschaft Ring (" cercle économique "). Ils seraient comptabilisés en une unité spécifique, le wir, de valeur égale à un franc suisse.

    Comment cela fonctionne-t-il ? Quand l'entreprise A achète quelque chose à B, A reçoit un crédit et B enregistre le débit correspondant. Le débit en wir sera compensé par les ventes de B à un participant C, ou réglé en francs suisses, avec lesquels la convertibilité est totale.

    Le système a fait ses preuves, de nombreuses autres entreprises s'y sont agrégées, l'organe de comptabilité a obtenu le statut bancaire. Mais cette banque présente une caractéristique remarquable : elle ne cherche pas à gagner de l'argent, juste à faciliter les transactions entre les participants. " Nous pratiquons un taux de 0,8 %, pour couvrir les frais, dit M. Canonica d'un ton détaché. C'est beaucoup moins qu'ailleurs. " Le système prospère : soixante-quinze ans après sa création, il fait circuler chaque année plus de 1,7 milliard de francs suisses (1,1 milliard d'euros), et il est cité en exemple par un des meilleurs spécialistes mondiaux des monnaies complémentaires.

    " Vous l'aimez cuit comment, votre saumon ? - Euh, comme vous voulez, ça ira. " Bernard Lietaer reçoit très gentiment dans son grand appartement de Bruxelles, décoré de masques africains et asiatiques et de centaines de livres. Plutôt que de vous retrouver dans un restaurant, il prépare - avec talent, il faut le dire - le repas, tout en poursuivant la conversation.

    Son amabilité recouvre une longue et originale expérience de financier. Au sein de <st1:personname productid="la Banque" w:st="on">la Banque</st1:personname> royale de Belgique, il a appartenu à la petite équipe qui a conçu le système monétaire qui a conduit à l'euro ; puis, il est devenu gérant d'un des premiers fonds spéculatifs, le Gaia Fund, au début des années 1990. Il était alors un des plus gros acheteurs " d'options " à <st1:personname productid="la City" w:st="on">la City</st1:personname> de Londres. Mais, aussi étrange que cela paraisse, il a quitté ce jeu qui ne répondait pas à ses aspirations, et a commencé à se passionner en intellectuel sur le phénomène monétaire, avant de promouvoir les monnaies complémentaires.

    Pour comprendre sa démarche ou celle de <st1:personname productid="la Banque Wir" w:st="on">la Banque Wir</st1:personname>, il faut se rappeler un fait, si contraire au sens commun : la monnaie n'est pas fabriquée par une autorité centrale qui l'adosse à des réserves d'or ou d'argent ; elle est créée par les banques privées à partir des promesses de remboursement des emprunteurs. Et durant les dernières décennies, les banques se sont émancipées de toute autorité - avec les résultats que l'on sait.

    " L'homogénéisation monétaire, dit M. Lietaer, a incontestablement facilité les échanges à chacune des étapes historiques, le passage à l'Etat-nation, puis la mondialisation. Mais elle a aussi pénalisé la capacité de gérer les problèmes qui se manifestent dans les économies locales. En même temps, la puissance financière a tendance à se concentrer dans un nombre sans cesse plus réduit de centres de décision de plus en plus éloignés du citoyen ."

    Les conséquences sont néfastes. La monnaie est indifférente à la finalité de l'échange, et se moque de servir à enfouir des déchets toxiques ou à dispenser des cours d'alphabétisation. Elle pousse à des activités susceptibles de détruire l'environnement : " Quand une banque prête 300, il faut lui rendre 600. La croissance est nécessaire pour créer les 300 supplémentaires ", explique Bernard Lietaer. La création monétaire étant aux mains des banques, elle conduit à la concentration d'argent d'un côté et à la sous-monétarisation d'une partie de la population mondiale de l'autre : " Cette rareté, écrit un autre spécialiste, Patrick Viveret, oblige les dominés à n'utiliser qu'une faible partie de leur potentiel d'échange et d'activité. " Et puis, comme l'expérience actuelle le montre, le système financier est intrinsèquement instable.

    La solution de Bernard Lietaer à tous ces maux ? " Il faut de la diversité monétaire, comme il y a de la biodiversité dans une forêt, afin d'amortir les chocs. Les sociétés matriarcales ont toujours eu un système de double monnaie : une pour la communauté dans laquelle on vit, l'autre pour les échanges avec l'extérieur. Il nous faut créer des monnaies complémentaires qui permettent aux communautés de satisfaire leurs besoins d'échange sans dépendre d'une autorité extérieure. "

    Le plus étonnant est que déjà, nombre de monnaies s'émancipent du système dominant : les bons de réduction dans les supermarchés, les " miles " des compagnies aériennes ou les chèques-déjeuner sont si courants qu'on n'y prête plus attention. A une échelle plus impressionnante, les " marchés d'émissions de gaz à effet de serre " mis en place par les Nations unies ou par l'Union européenne afin de parer au changement climatique ne créent rien moins qu'une nouvelle monnaie, la monnaie carbone.

    Partout dans le monde, des communautés créent de nouvelles monnaies : les SEL (système d'échange local) permettent aux individus d'échanger leurs compétences, comptées en unités de temps. Les SOL (abréviation de solidaire), expérimentés en France par une dizaine de communes, fonctionnent sur carte à puce comme une carte de fidélité dans un magasin - sauf que c'est tout un réseau de magasins et d'institutions qui participent au système.

    En Allemagne, plus d'une trentaine de monnaies régionales (appelées regio) ont cours. L'Argentine a passé le pire moment de sa crise financière, entre 1998 et 2002, avec des systèmes privés d'échange qui ont impliqué jusqu'à six millions de personnes. Au Brésil, dans un bidonville de Fortaleza, <st1:personname productid="la Banco Palmas" w:st="on">la Banco Palmas</st1:personname> délivre depuis dix ans des microcrédits avec le palma , sa monnaie, qui présente un taux d'intérêt très faible. Elle a ainsi créé 3 200 emplois. D'autres villes brésiliennes commencent à imiter cette démarche.

    Le mouvement est stimulé par l'affaissement du système financier capitaliste, et va prendre une autre ampleur grâce aux nouvelles technologies. Les téléphones portables deviennent un moyen de paiement électronique. Une possibilité de plus en plus appréciée en Afrique, où le système bancaire est défaillant : au Ghana, par exemple, TradeNet permet d'effectuer les transactions des matières premières agricoles sur le téléphone.

    Internet pourrait permettre à des communautés autonomes de créer leur propre monnaie. Un réseau discret prépare cette mutation, dont Jean-François Noubel, cocréateur en son temps du serveur AOL, est un prophète : " La philosophie d'Internet peut s'appliquer à la monnaie comme elle l'a fait avec les médias, où l'on passe d'un système centralisé à un système où chacun est producteur et transformateur d'information. Il y aura ainsi des millions de monnaies, comme il y a maintenant des millions de médias. Il s'agit maintenant de fabriquer les outils d'interopérabilité, les protocoles permettant de mettre en réseau ce qui est fait. "

    Concrètement, des groupes expérimentaux commencent à définir des règles d'échanges et des registres de crédit, avec deux caractéristiques essentielles : les monnaies ne peuvent générer de phénomène spéculatif, et elles peuvent être pondérées par des paramètres définis en commun, comme par exemple la bonne réputation que s'attire chaque membre du réseau. De la même manière qu'Internet repose sur des protocoles tels que HTML (format de données conçu pour représenter les pages Web), le réseau " Metacurrency project " (projet monnaies libres) achève d'élaborer un protocole pour des monnaies libres.

    Les banquiers qui tiennent les rênes des institutions monétaires laisseront-ils ce bouleversement arriver ? Jean-François Noubel ne s'en inquiète pas : " Le processus est énorme, il est dans l'air, il est en train d'arriver. On va déposséder les banques du pouvoir de faire la monnaie. "

    f Sur le Web :

    Hervé Kempf
    Et si on essayait ? 

     


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  • En Inde, le spectre de " guerres de l'eau " se profile

    Le sous-continent puise dans ses nappes phréatiques à un rythme qui compromet la pérennité de cette ressource


    New Delhi Correspondance

    En Inde, les nappes phréatiques s'épuisent, mettant en péril les ressources en eau du pays. Un article paru jeudi 13 août dans la revue scientifique Nature établit qu'en six ans, de 2002 à 2008, les réserves d'eau souterraine de trois régions du nord de l'Inde, l'Haryana, le Pendjab et le Rajasthan, ont diminué de 109 milliards de mètres cubes, soit le dixième des réserves annuelles du pays.
    L'Inde est prise au piège entre une consommation qui ne cesse d'augmenter et des réserves qui baissent. L'eau souterraine est gratuite et abondante, même en temps de sécheresse. Depuis quarante ans, les agriculteurs se sont donc tournés vers l'exploitation des nappes phréatiques, sans se donner la peine de demander des autorisations. En l'absence de législation et de contrôle des autorités, 19 millions de puits ont été forés.
    Cette eau souterraine, qui constitue 38,5 % des ressources disponibles, est pourtant précieuse. S'il suffit de seulement quelques minutes pour extraire l'eau des profondeurs, il faut des années pour reconstituer une nappe phréatique. Dans son rapport intitulé " Propriété et gestion des nappes phréatiques ", le commissariat au plan indien met en garde contre leur surexploitation : entre 1995 et 2004, " la proportion de districts surexploités est passée de 4 % à 15 %, faisant de la surexploitation des nappes phréatiques un objet de préoccupation ". Dans les régions arides ou semi-arides comme le Gujarat, le Tamil Nadu ou le Rajasthan, plus de la moitié des districts sont classés comme étant dans une situation critique ou semi-critique ou comme surexploités.
    Cette pénurie conduit les agriculteurs à creuser des puits de plus en plus profonds. Mais tous n'ont pas les moyens de s'équiper de pompes à eau suffisamment puissantes. Dans un article paru mardi 11 août dans les Lettres de la recherche environnementale (ERL), Tushaar Shah montre que ces pompes à eau, qui fonctionnent avec des générateurs alimentés au gazole ou au kérosène, sont responsables de 4 % à 6% des gaz à effet de serre émis par l'Inde, le quatrième pollueur de la planète. Or le réchauffement climatique réduit les chances de renouvellement des nappes phréatiques.
    En 2001, le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC) a montré qu'une augmentation des températures se traduirait par de plus fortes précipitations, sur une moindre durée. Ce changement pourrait ralentir le rythme de réapprovisionnement des réserves d'eau souterraines. Enfin la montée du niveau de l'océan provoque la salinisation des nappes phréatiques côtières, les rendant impropres à la consommation. La contamination chimique des nappes phréatiques, à l'arsenic ou au fluor, est en outre déjà à l'œuvre dans certains Etats, comme l'Andhra Pradesh ou le Bengale-Occidental.
    Les nappes phréatiques servent à irriguer des cultures à haut rendement, où sont aussi utilisés des pesticides et des engrais. Or " les systèmes d'irrigation souterrains sont particulièrement vulnérables à la contamination chimique. Une fois contaminés il est très difficile, voire impossible de les décontaminer ", lit-on dans un des articles publiés dans ERL.

    Des tensions

    La pénurie d'eau suscite déjà des tensions en périphérie des grandes agglomérations. " La guerre de l'eau a commencé ", va même jusqu'à affirmer Sunita Narain, rédactrice en chef de la revue environnementale Down to Earth. " Aux alentours de New-Delhi, les citadins utilisent les ressources en eau des paysans. Et les paysans ont à leur tour recours aux maigres ressources en électricité des citadins pour pomper l'eau dans des puits profonds ", explique Sunita Narain. En 2005, cinq paysans ont été tués au cours de manifestations, dans le Rajasthan, pour protester contre l'acheminement de l'eau du barrage de Bisalpur vers la ville de Jaipur.
    Le gouvernement expérimente la possibilité de recharger artificiellement les nappes phréatiques et commence à peine à contrôler les creusements de puits. Restreindre l'accès à l'eau dans les régions agricoles s'avère difficile à contrôler et risqué politiquement. Le gouvernement central préfère donc étendre le réseau d'irrigation en surface. " Depuis 1990, les gouvernements du centre et des régions ont investi plus de 20 milliards de dollars dans la construction et la réhabilitation de systèmes d'irrigation par canaux, alors que la surface alimentée par cette irrigation a baissé de 3 millions d'hectares ", écrit Tushaar Shah.
    Le temps presse pour éviter la surexploitation des nappes phréatiques. Alors que l'agriculture consomme 85 % de l'eau douce du pays, la situation pourrait s'aggraver avec l'industrialisation et l'urbanisation de l'Inde. Le commissariat au plan indien prévoit qu'à ce rythme, l'Inde souffrira en 2050 d'un déficit de 320 milliards de mètres cubes d'eau par an.

    Julien Bouissou

    Un satellite pour mesurer les nappes phréatiques

    On peut évaluer des réserves d'eau souterraine depuis le ciel à l'aide de satellites comme Grace, lancé par <st1:personname productid="la NASA" w:st="on">la NASA</st1:personname> et l'agence spatiale allemande en 2002. Cet engin mesure des variations de la gravité qui trahissent la décharge des nappes phréatiques (aquifères). Entre 2002 et 2008, il a permis d'observer une baisse moyenne de <st1:metricconverter productid="4 cm" w:st="on">4 cm</st1:metricconverter> par an des nappes des Etats indiens du Pendjab, du Rajasthan et de l'Haryana, selon une étude publiée dans la revue Nature jeudi 13 août. Ces réservoirs naturels ont perdu 109 km3 d'eau, l'équivalent du triple des prélèvements annuels d'eau effectués pour couvrir les besoins de <st1:personname productid="la France..." w:st="on">la France...</st1:personname> " Si des mesures ne sont pas prises rapidement pour assurer un usage de l'eau durable, préviennent Matthew Rodell (NASA) et ses cosignataires, les conséquences pour les 114 millions d'habitants de la région pourraient être une baisse de la productivité agricole et des pénuries d'eau potable conduisant à d'importantes tensions socio-économiques. "

    Le Monde d'aprés : Score rose 9 - changement 6 au 13 /8/2009 


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  • Rapport Houillon
    Voila les propositions :

    Oui rien de bien précis :

    Mais faut garder le meilleur pour la fin:

    Oui la tout est dit notre pauvre monsieur, faut le faire avec les autres Globalisation, Mondialisation oblige. Un de leur argument préféré.
    Mais la :

    Oui la virulence affichée et la parfaite innocuité de leurs préconisation : Frédéric Loron dans "la crise de trop"
    A méditer
    L'existence d'abus inadmissible !!! extrait d'un rapport 


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  • Personne ne peut nier que la compétence et l’importance des responsabilités des dirigeants des plus grandes entreprises et des principaux établissements financiers puissent justifier des niveaux de rémunération bien supérieurs à ceux des salariés ordinaires. Pour autant, ainsi que l’observait en juillet <st1:metricconverter productid="2007 M" w:st="on">2007 M</st1:metricconverter>. Philippe Manière dans une étude de l’institut Montaigne au titre révélateur, « les inégalités de revenus doivent être tolérables pour le corps social, c’est-à-dire explicables [1]». Or, tel ne semble pas toujours être le cas.

    La décennie qui s’est écoulée a vu se creuser le fossé entre la revalorisation des rémunérations des mandataires sociaux et celle des salaires.

    Selon l’institut français des administrateurs, la rémunération moyenne des dirigeants de grandes sociétés cotées a progressé de 15 % par an entre 1997 et

    2007 alors que celle des salariés a évolué, sur la même période, de 3 % en rythme annuel. En outre, les montants perçus par les dirigeants des grandes entreprises cotées et par les opérateurs financiers ont atteint ces dernières années, en France comme dans la plupart des pays industrialisés, des sommets pouvant paraître difficilement justifiables au regard de leurs performances objectives.

     

    A. LE NIVEAU TRES ELEVE DE <st1:personname productid="LA PLUPART DES" w:st="on">LA PLUPART DES</st1:personname> REMUNERATIONS DES

    MANDATAIRES SOCIAUX DE TRES GRANDES SOCIETES

     

    Depuis le début des années 2000, il ne s’est jamais passé plus de trois ans en France sans qu’un scandale sur la rémunération ou les indemnités de départ d’un dirigeant de grande entreprise cotée éclate ; se sont en effet succédées les affaires Messier (2002), Bernard (2005), Forgeard et Zacharias (2006), Tchuruk et

    Russo (2008), Morin (2009). Ce contexte a considérablement nui à l’image des chefs d’entreprise en général, dont la situation personnelle est souvent à mille lieux des privilèges dont jouissent quelques happy few. Il a aussi porté atteinte, dans une certaine mesure, à la valeur travail en anéantissant toute progressivité des rémunérations en fonction des mérites et des responsabilités.

     

    Les rémunérations des dirigeants des plus grandes sociétés faisant appel public à l’épargne en France atteignent des montants qui peuvent donner le vertige

    aux salariés modestes et aux classes moyennes. Alors que, selon le Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERCS), le revenu médian annuel des Français s’établissait en 2007 à 15 780 euros pour une personne seule et

    23 664 euros pour un couple, le revenu moyen des responsables des plus grosses entreprises se situait, quant à lui, aux alentours de 5 millions d’euros, soit de 208 à

    312 fois plus. Le décalage est même encore plus grand aux États-Unis, où le revenu des capitaines d’industrie et des rois de la finance a augmenté de plus de

    400 % sur la période 2000-2006 quand, dans le même temps, le revenu médian des ménages a diminué de 1,1 % (1).

    Se pose légitimement, dès lors, la question de la justification de ces écarts.

     

    Je vous aide pour deviner qui écrit cela ?
    C’est un  rapport de l’assemblée Nationale du 7/7/2009
    Cet extrait est l’introduction ( la 1ére partie).

    Ils en font quoi après ?
    Regardez les débats que nous avons sur les bonus, les rémunérations, etc….

    Le titre est aussi d’eux….pas d’altermondialiste

    Ils font des rapports !!!!

    A relire :Et la confiance dans tout ça ? Kenneth Rogoff
    Chasseurs de bonus

    Pourquoi on peut tout dire sauf s’attaquer au pouvoir actionnarial ?

    Et surtout faut agir :

    Enfin une mesure contre la démesure de la finance, le SLAM !

     

    Mais voila la suite :
    L'existance d'abus inadmisible : suite !!! 

     


    [1]  Institut Montaigne, Amicus Curiae : « Comment “bien” payer les dirigeants d’entreprise ? », p. 5.

     


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