• Le prêt entre particuliers sur le point de décoller en France

     

    Après FriendsClear, Prêt d'Union pourrait lancer son offre au premier trimestre 2011. Les banques surveillent l'émergence du « peer to peer lending » avec attention.

    Encore à un stade de développement embryonnaire en France, le prêt entre particuliers (« peer to peer ») mérite pourtant que l'on s'y intéresse. Le succès d'acteurs comme Prosper aux États-Unis (créé en 2005) ou Zopa au Royaume-Uni (2006) a entraîné l'apparition d'une trentaine d'acteurs en 2007 et 2008. Selon le cabinet de conseil Ineum Consulting, à l'échelle internationale, le poids du marché du « peer to peer lending » pourrait passer de 38 milliards de dollars en 2008 à 159 milliards en 2013. En France, les prêts entre particuliers pesaient fin 2009 « seulement 3 milliards d'euros d'encours environ, mais on estime que ce mode de financement représentera 5 milliards d'encours en 2015 », avancent les consultants d'Ineum.

    À en juger par le développement des sociétés de prêt entre particuliers dans les pays anglo-saxons et par les taux de défaut affichés ? entre 0,5 % et 3 % seulement, alors qu'ils sont de 5 % à 6 % sur le marché du crédit à la consommation classique ?, le modèle est viable. Reste à savoir si les nouveaux entrants pourront résister à la pression des établissements en place. Les banques s'intéressent de près au sujet et un certain nombre d'entre elles ont déjà lancé des études d'opportunité. « Le P2P lending peut constituer aujourd'hui une opportunité majeure de différenciation et de modernisation pour les acteurs traditionnels bancaires », confirme Aurélie Brugere chez Ineum Consulting.

    Un modèle crédible

    FriendsClear (crédit à la consommation et crédit aux entreprises d'au maximum 25.000 euros sur 3 ans) s'est ainsi adossé au Crédit Agricolegricole. Une façon de renforcer sa crédibilité tout en continuant à se positionner comme un acteur alternatif.

    De son côté, Prêt d'Union (crédit à la consommation en P2P) pourrait lancer sa plate-forme au premier trimestre 2011. Ses promoteurs doivent encore mener à bien une augmentation de capital d'environ 3 millions d'euros et, maintenant que l'instruction technique de leur dossier est terminée à la Banque de France, obtenir l'agrément de l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP). La start-up a déjà levé 1 million d'euros et peut se prévaloir du soutien du fonds d'investissement de Xavier Niel, Kima Ventures.

    « La directive sur les services de paiement permet une activité de crédit, du moment que le délai reste inférieur à un an. Il est donc fort probable que certains acteurs se positionneront sur le créneau du peer to peer lending sans la participation d'une banque ou d'un organisme de crédit », explique Marwan Farah chez Ineum Consulting.

    Le système permet aux emprunteurs de bénéficier d'un taux intéressant, tout en assurant un bon rendement aux prêteurs, défendent les promoteurs du prêt entre particuliers. Sur son site Internet, FriendsClear déclare prêter aux entrepreneurs à 5,53 % et rémunérer les prêteurs 4,50 %.

    Babyloan et plus récemment Xetic (lire ci-dessous) jouent quant à eux sur le registre solidaire. Les prêts des internautes ne sont pas rémunérés mais ils permettent de financer des microcrédits dans des pays du Sud, et bientôt du Nord.

    Les développements du P2P à l'étranger n'ont pas fini d'être une source d'inspiration. En Irlande, un site permet de changer des devises de particulier à particulier. Aux États-Unis, une plate-forme permet même d'investir sur le potentiel d'une personne contre la promesse de recevoir un certain pourcentage de ses revenus futurs.

    Par Sophie Rolland -

    Xetic.org, un nouveau venu dans l'univers des sites philanthropiques 2.0

    Après Babyloan, cette association lyonnaise à but non lucratif propose un placement de particulier à particulier « 100 % solidaire ».

    Lancé en octobre 2010, Xetic propose aux internautes de prêter de petites sommes d'argent ? à partir de 20 euros ? afin de financer des projets de micro-entrepreneurs du Sud qui n'ont pas accès au crédit classique. Comme son grand frère Babyloan, Xetic s'inspire de Kiva, le célèbre site communautaire de San Francisco.

    Pour sélectionner ses projets, il s'appuie sur des institutions de microcrédit locales déjà soutenues par des acteurs expérimentés, comme la fondation Mérieux, l'ONG Entrepreneurs du Monde ou encore la région Rhône-Alpes et la ville de Lyon. Actuellement, le site propose de financer une quarantaine de projets au Burkina Faso, au Bénin et au Sénégal.

    1 million d'euros de prêts

    « Les besoins sont immenses et l'ambition de Xetic est de financer 1 million d'euros de prêts solidaires d'ici à 2012 », explique le président de Xetic, Jérémy Camus, qui insiste sur la « valeur ajoutée humaine du projet au-delà de la valeur ajoutée économique ».

    L'association à but non lucratif cherche aussi à nouer des partenariats avec des entreprises. « L'idée, pour une agence de voyage par exemple, pourrait être de proposer à ses clients d'accompagner des projets dans des pays où ils sont partis », explique Jérémy Camus. S. R.


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  • Banque de Chine : un mastodonte sous tutelle

     


     

    La banque centrale chinoise dépend du Conseil d'État. Plutôt favorable à un système de change plus flexible, la banque n'a cependant qu'un rôle mineur dans la définition de la politique monétaire et des changes de la Chine.

    Il y a beaucoup d'idées fausses sur la banque centrale chinoise. « Ce n'est qu'en fait qu'un comité consultatif parmi d'autres pour le Conseil d'État, et certainement pas le plus influent », commentait ainsi récemment un observateur de la banque. C'est tout le drame de la People's Bank of China (PBoC) dans les réunions internationales face à des interlocuteurs qui ne cessent de réclamer une réévaluation du yuan. La direction de la banque centrale n'a que très peu de marge de manoeuvre et elle ne peut sortir du mantra officiel : « Maintenir la stabilité de la monnaie et promouvoir la croissance économique. » En Chine même, la banque centrale doit composer entre les intérêts des gouvernements locaux, qui réclament un statu quo économique, le ministère du Commerce et défenseur de milliers de petits exportateurs et bien d'autres membres influents du Conseil d'État ou du puissant NDRC (agence de planification) qui ne veulent pas sacrifier des points de croissance pour changer un modèle qui a fait ses preuves. « La PBoC est prisonnière d'une politique de croissance à tout prix. Cela fait des mois qu'elle réclame un taux de change plus flexible, sans pour autant avoir beaucoup d'impact au niveau du Conseil d'État », analyse Patrick Chovanec, économiste et professeur à l'université de Tsinghua.

    À la tête de la PBoC, Zhou Xiaochuan gouverne et essaye de faire passer ses idées sans dévier de la ligne officielle. Avocat depuis toujours d'un système de change plus flexible, c'est le plus réformateur des membres du Conseil d'État. Plus technocrate que politicien, il est très respecté et apprécié à l'étranger pour être l'allié le plus apte à faire bouger la Chine. Cette complicité apparente avec l'Occident le dessert néanmoins en Chine où il est accusé d'être trop proche des thèses libérales. C'est souvent à travers le très respecté « comité de politique monétaire », un « think tank » « indépendant », que la banque centrale arrive cependant à faire passer quelques idées audacieuses. À titre d'exemple, Yu Yongding, membre de l'Académie des sciences, a récemment défendu dans le « Financial Times » la thèse d'une croissance économique plus faible au profit d'un recentrage de l'économie sur la consommation intérieure.

    Au-delà de ces tentatives pour influencer les esprits, la banque centrale ne prend aucune décision. Elle se contente de les exécuter. Elle ne peut que suggérer, espérer se faire entendre au Conseil d'État et prier pour qu'un ministère plus puissant ne vienne pas balayer ses arguments.

    C'est bien peu pour une banque centrale qui affiche quelque 2.600 milliards de dollars de réserves. Pour maintenir sa parité avec le dollar, elle achète massivement des billets verts qu'elle « neutralise » en émettant en contrepartie des obligations. « La PBoC n'est qu'une énorme machine à stériliser », résume un observateur. Elle doit jongler entre le taux très bas des obligations américaines tout en rendant attractives celles qu'elle émet au profit des banques commerciales. « Cette mécanique l'incite à mener une politique de resserrement perpétuelle », analyse Patrick Chovanec.

    Le deuxième rôle de la banque centrale est de fixer les quotas de crédits des banques commerciales, et par conséquent, de contrôler la masse monétaire. Et c'est en faisant sauter les quotas d'un commun accord avec les autres agences du gouvernement en 2009 qu'elle a permis aux banques d'injecter 1.000 milliards de yuans dans l'économie. Et le premier quota fixé en début d'année de 5.000 milliards a été dépassé presque instantanément. Officiellement, elle mène pourtant « une politique monétaire accommodante », comme elle l'a elle-même théorisée.

    Quand elle tire la sonnette d'alarme, à la mi-2009, sur les créances douteuses, elle s'est heurtée à la politique qu'elle avait elle-même participé à mettre en oeuvre. Les gouvernements locaux, toujours incités à dépenser, ont créé des véhicules d'investissement - près de 8.000 à ce jour - pour contourner le coup de frein des banques en matière de crédit. L'économiste Victor Shih estime ainsi que les dettes atteindront 3.500 milliards de dollars à la fin de 2011, soit 97 % du PIB.

    Ce n'est que début 2010 et après avoir évalué les dégâts estimés à 7.000 milliards de yuans (estimation très basse) que la banque centrale commence à imposer des ratios des réserves obligatoires plus élevés. Depuis, elle a réinstauré les quotas et élevé le ratio des réserves quatre fois avec des résultats mitigés sans pour autant renoncer dans le discours à ligne expansionniste qu'elle s'est fixé. Pour le moment, elle a bien du mal à arrêter la machine. Au deuxième trimestre 2010, les banques auraient autant prêté via leurs véhicules que par leur bilan. Mais dans les méandres du système, la banque centrale tente de jouer un (petit) rôle dans la réforme du système. Elle a lancé elle-même en 2008 ses obligations à long terme, camouflées sous le vocable « commercial paper », pour aider les entreprises. Elle oeuvre également pour l'internationalisation de la monnaie. C'est elle qui est derrière la directive qui permet l'émission des obligations en yuans à Hong Kong ou encore celle qui prévoit des opérations de swaps en yuans entre les banques centrales. Le but à terme est d'introduire plus de dynamique de marché dans l'afflux de capitaux en Chine.

    Dernier chantier en cours, elle planche sur une réforme des taux des dépôts. L'idée serait de laisser les banques fixer le taux plafond dans une bande de fluctuation. Il est imposé actuellement par la PBoC. Cette réforme reviendrait à éliminer l'écart garanti entre taux de crédit et de dépôt qui permet actuellement aux banques de générer leurs profits. La proposition doit encore arriver au Conseil d'État où elle doit passer un premier examen avant d'être discutée par les membres. Il se peut qu'elle ne soit jamais validée. Comme beaucoup de réformes proposées par la banque centrale.

    Virginie Mangin, à Pékin


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  • La Suisse n'a plus de secret pour la France

     


     

    La convention franco-suisse autorisant la levée du secret bancaire entrera en vigueur dans quelques semaines.

    Avis aux Français qui disposent encore de comptes bancaires non déclarés en Suisse et ne sont pas encore passé par la cellule de régularisation de Bercy. Dans quelques semaines, l'administration fiscale française pourra demander à la Suisse la levée de son secret bancaire. La ratification par Berne de la convention d'échange d'information signée le 27 août 2009 est désormais définitive. Malgré les menaces, aucune initiative de référendum populaire n'a été introduite dans les 100 jours suivant l'adoption du texte par le parlement helvète.

    Progression des accords

    La lutte contre les paradis fiscaux et le secret bancaire initiée lors du G20 de Londres, le 2 avril 2009, fait des progrès. Plus de 600 conventions d'échanges d'informations ont été signées en un an et demi. Reste à s'assurer que ces textes qui permettent la levée du secret bancaire seront effectivement appliqués. Cela suppose de s'assurer que les États signataires disposent bel et bien de l'information, que celle-ci est accessible et qu'il existe bien des accords d'échange.

    C'est au forum mondial, émanation de l'OCDE, que revient le privilège de s'assurer que les pays signataires répondent effectivement à ces exigences minimales. Huit pays sont déjà passés sous ses fourches caudines et une quarantaine d'autres, dont les États-Unis et la Suisse, feront prochainement l'objet d'un examen approfondi. « Le mandat du forum mondial est simple : faire que l'imprécation du G20 sur la fin de l'ère du secret bancaire devienne une réalité », explique un spécialiste.

    Le seuil des douze conventions qui devaient être signées pour sortir de la liste infamante de l'OCDE appartient désormais au passé. Les pays membres du forum devront désormais signer des conventions avec tous les pays qui le demandent. C'est ainsi que Monaco, qui rechignait à signer un accord avec l'Italie, a été contraint d'engager des discussions avec Rome.

    Le G20 de Séoul permettra de prendre la mesure des progrès réalisés contre les paradis fiscaux depuis le sommet de Londres. Des avancées contre le secret bancaire ont été obtenues. En revanche, l'évasion fiscale des multinationales demeure la grande oubliée de l'offensive du G20 contre les paradis fiscaux.

    Par Xavier Harel

    MAIS,

    « L'offshore a encore de beaux jours devant lui »

    Nadav Bensoussan est à la tête de France-Offshore, une société proposant aux PME françaises de réduire très sensiblement leur imposition.

    Nadav Bensoussan a tout juste 32 ans. Mais il est déjà à la tête d'une petite multinationale. Sa société France-Offshore est présente en France, au Royaume-Uni, à Hong-Kong et en Lettonie. Elle n'emploie pour l'instant qu'une cinquantaine de personnes mais est en plein essor. Créé en 2001, France-offshore est le leader français de la création de sociétés offshore pour les petites et moyennes entreprises.

    L'optimisation fiscale ne doit plus être un sport réservé à l'élite du CAC 40. Elle doit être accessible aux petites et moyennes entreprises (PME) ou aux prestataires de services. Tel est le credo de France-offshore qui offre une vaste palette de solutions pour réduire très sensiblement son imposition sur les bénéfices.

    « Lorsqu'une entreprise vient nous voir, l'économie d'impôt réalisée représente au moins dix fois l'investissement effectué », explique Nadav Bensoussan. Il affirme ainsi avoir fait économiser 7 millions d'euros d'impôt à un entrepreneur venu le voir en début de semaine. Coût de l'opération : 47.000 euros ! Les tarifs sont affichés sur le site internet de l'entreprise. Une société offshore coûte 2.890 euros si elle est constituée à Londres, 2.710 euros dans les îles vierges britanniques ou 6.770 euros à Gibraltar.

    Montages légaux

    « Mais il n'est pas nécessaire de créer des sociétés offshore dans des territoires exotiques pour réduire son imposition, explique-t-il. 80 % des sociétés que nous créons se trouvent en Europe. » Et de citer le cas de Gibraltar, lié au Royaume-Uni par une convention fiscale extrêmement avantageuse qui permet de remonter jusqu'à 80 % des bénéfices à Londres, libres d'impôt sur les bénéfices. « Résultat : vous pouvez faire tomber votre imposition à 4 % seulement », s'enflamme le jeune homme. Et ce, en toute légalité.

    Nadav Bensoussan s'est d'ailleurs appliqué à lui-même ses conseils. France- offshore est enregistré à Londres. Le bureau français est un simple prestataire de services. « Le 26 de chaque mois, la maison mère couvre les dépenses du mois (salaires, charges, loyers...) et le budget retombe à zéro », explique Nadav Bensoussan. Résultat, France-offshore ne réalise ni chiffre d'affaires ni bénéfices en France et n'y paye donc pas d'impôt sur les bénéfices.

    L'offensive du G20 contre les paradis fiscaux ? Une aubaine. « Le travail d'information des médias a fini de convaincre ceux qui en doutaient encore que l'offshore permet de réduire significativement son taux d'imposition », se réjouit-il. « Tous les montages que nous proposons sont parfaitement légaux, rappelle Nadav Bensoussan. Un client qui viendrait chez nous chercher des montages visant à faire de la fraude fiscale serait déçu ». X. H.

    L'optimisation fiscale ne doit plus être un sport réservé à l'élite du CAC 40, selon France- offshore.


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  • Le plan quinquennal chinois reprogramme la lutte contre les inégalités

     

    Le comité central du Parti communiste a annoncé les grandes lignes du prochain plan quinquennal et la nomination de l'actuel vice-président Xi Jinping à la commission militaire.

    Les salaires et les réformes sociales seront les clés de voûte du prochain plan quinquennal (2011-2016), discuté durant les travaux du plénum du Parti communiste chinois (PCC) qui s'est achevé lundi. L'accent sera mis, comme prévu, sur la poursuite des réformes structurelles.

    Véritable outil institutionnel du PCC, le plan fixe le cap de la politique économique et sociale, en particulier au niveau local. Habituellement, le gouvernement veille à ce que les régions respectent les objectifs.

    Ce plan, dont la version finale sera rendue publique en mars, ne devrait pas différer du précédent. Mais, le contexte à changer du fait de la crise économique mondiale : la Chine doit rééquilibrer vers la consommation intérieure sa croissance fondée sur les investissements. Elle doit aussi réduire les inégalités sociales - entre riches et pauvres, entre régions côtières et arrière-pays - engendrées par une croissance qui a dépassé en moyenne les 10 % par an depuis des années.

    Neuf secteurs clés

    « La Chine va augmenter les salaires, améliorer la cohésion sociale et approfondir les réformes », indique le communiqué. Concrètement, on peut s'attendre à une hausse de la part des salaires dans le PIB, à un vaste programme de construction de logements sociaux et, selon le « South China Morning Post », un journal de Hong Kong, 4.000 milliards de yuan seront investis dans neuf secteurs clés dont les énergies renouvelables. Par ailleurs, les engagements pris lors de la conférence de Copenhague de réduire l'intensité énergétique sont réaffirmés.

    Autre mesure qui devrait figurer en bonne place : la réforme du système du Hukou - ou permis de résidence - qui exclu actuellement des millions de travailleurs de la sécurité sociale.

    Plusieurs économistes prévoient que les objectifs de croissance seront réduits à 7 % par an contre 7,5 % dans le précédent plan. « Il y a beaucoup d'attentes sur le volet social. Le plan doit résoudre les problèmes démographiques, la pression monte pour réformer le système de santé et des retraites », explique Alistair Thornton, économiste chez IHS Global Insight à Pékin. Enfin, comme prévu, l'actuel vice-président, Xi Jinping, a été nommé à la commission militaire. Sauf incident majeur, il devrait succéder à Hu Jintao à la présidence début 2013.

    Virginie Mangin, à Pékin


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  • Economie Saint-Marin

    Mort d’un paradis fiscal
    La Stampa Turin



    La tour de la Guaita, sur le sommet de la roche du Titano, surplombant la plaine de Romagne.

    Jadis considéré comme un placement sûr pour les capitaux qui souhaitaient échapper au fisc, la petite république enclavée aux pieds des Apennins a subi de plein fouet la crise économique et le tour de vis imposé par Rome pour contrer la fuite des capitaux.

    Le paradis fiscal de la République de Saint-Marin se meurt, sous les premières brumes automnales qui recouvrent le rocher. Le dernier avis d’expulsion a été annoncé début octobre, quand la Banque d’Italie a placé l’un de ses administrateurs à la tête de la Caisse d’Epargne de Rimini qui contrôle le Crédit industriel de Saint-Marin, l’une des douze banques de la République. D’après les inspecteurs de via Nazionale [siège de la Banque d’Italie], la loi anti-blanchiment aurait été violée de manière incontestable.

    Saint-Marin était autrefois une terre d’émigration. Dans les années 1960, la riviera adriatique a connu un boom économique avec l’arrivée du tourisme et le développement du commerce et de l’industrie. Alors que s’installait l’aisance matérielle, on a vu apparaître les premiers fonds non déclarés au fisc : des hôteliers et des commerçants venaient d’Emilie-Romagne pour déposer leurs bénéfices à Saint-Marin.

    Le crime organisé y a planté ses racines

    Jusqu’à l’overdose des années quatre-vingt-dix. A côté des quatre banques historiques, 59 sociétés et huit organismes de crédit s’occupent essentiellement de collecter des fonds et de les investir, mais offrent très peu de services financiers : un vrai pays de cocagne pour tous ceux qui veulent faire transiter des capitaux illégaux. Car l’argent sale attiré par Saint-Marin ne vient pas que d’Italie : neuf euros sur dix arrivent de l’étranger. Les Russes sont apparus pour faire du commerce de gros et le crime organisé a planté ses racines dans l’Etat enclavé.

    Les scandales financiers n’ont alors pas tardé à éclater, comme celui du groupe Delta, contrôlé par la glorieuse Caisse d’Epargne – créée à la fin du XIXe siècle grâce à l'épargne des paysans et des ouvriers –, devenue au fil du temps le centre des malversations. Le paradis fiscal a fini par déchanter avec le tsunami économique mondial, la mise en demeure des paradis fiscaux, l’établissement des listes noires de l’OCDE et l’embargo du gouvernement italien.

    Saint-Marin avait dépassé toutes les bornes

    Cette époque est révolue. Saint-Marin avait dépassé toutes les bornes”, reconnaît Marco Arzilli, le secrétaire d’Etat à l’Industrie. Le gouvernement actuel – une coalition de la démocratie chrétienne sur le déclin, en place depuis 2008 – fait tout son possible pour ôter l’étiquette de capitale des fraudes qui colle au rocher. “Lorsque nous sommes entrés au gouvernement, l’Etat était en procédure de conformité renforcée de moneyval et figurait sur la liste grise de l’OCDE. En deux ans, nous avons fait bouger énormément de choses”, renchérit la secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Antonella Mularoni.

    Nous avons aboli les sociétés anonymes et le secret bancaire ; en termes de transparence bancaire, nous nous sommes alignés sur les modèles internationaux ; nous avons fermé de nombreuses entreprises fictives. Enfin, nous nous apprêtons à signer deux accords : le premier, sur la collaboration entre notre police et la police italienne, le second, sur l’autorisation octroyée aux inspecteurs de la Banque d’Italie d’entrer dans les institutions de notre République. Le problème, c’est que, sur cette question, le gouvernement italien fait la sourde oreille”. Tout comme le FMI, à Washington.

    Cette attitude est totalement incompréhensible”, ajoute-t-elle. Une chose est sûre : à Saint-Marin, les banquiers se sont fait discrets. L’année dernière, le reflux des capitaux a été dévastateur : la banque centrale parle d’une baisse de 35%. Les fraudeurs du fisc ne font plus confiance au mont Titan [le mont sur lequel est bâti Saint-Marin] et les boucliers fiscaux [votés en Italie] ont vidé tous les coffres-forts : une fuite de presque six milliards sur les 14 milliards d’euros déposés.

    "On veut notre peau"

    Entre-temps, la crise touche toutes les professions, avec une diminution des embauches et des liquidités des organismes qui ne peuvent accéder au marché interbancaire. Enfin, pour couronner le tout, un géant comme la banque UniCredit veut mettre un terme à son alliance historique avec la Banca Agricola e Commerciale. “On veut notre peau”, affirme avec conviction Marco Beccari, secrétaire du syndicat démocratique des travailleurs de Saint-Marin. “Bien sûr, ceux qui ont agi malhonnêtement ont terni notre image. Mais, dans le fond, notre économie est saine, et nous devons la protéger. 31 000 habitants, 20 000 travailleurs, dont 6 500 venant d’Emilie-Romagne”.

    Quelque 4 000 employés dans le secteur public et 15 000 salariés du secteur privé – dans les domaines du commerce, de la mécanique, de la sidérurgie, de l’industrie pharmaceutique et de la céramique – travaillent dans les régions industrielles près de la frontière avec Saint-Marin. Ce microcosme, qui n’avait pas bougé d’un pouce pendant des années, subit aujourd’hui les conséquences des mesures fiscales drastiques du gouvernement italien.

    Il est question d’un déficit de 80 millions d’euros dans le budget de l’Etat saint-marinois cette année, et au moins du double pour 2011. On évoque l’intervention éventuelle du FMI qui soutiendrait la République de Saint-Marin avec des lignes de crédit, comme avec la Grèce ou l’Argentine. “Certaines entreprises sont retournées en Italie ; d’autres n’acceptent plus nos factures. Nous sommes considérés comme des pestiférés”, se plaint Beccali.

    La Ligue du nord en dernier espoir

    La crise économique est passée par là : l’année dernière, 1% des travailleurs a perdu son poste. 1 500 salariés sont au chômage technique. Et le travail au noir a augmenté. Ces chiffres peuvent paraître dérisoires, mais ils pèsent lourd sur le monde idyllique de Saint-Marin, qui a toujours connu le bien-être et la générosité : des retraites calculées sur la rétribution, des restaurants d’entreprise proposant des repas à 1,50 euro, une bonne couverture sociale, l’obtention de prêts pour l’achat d’une résidence principale et pour les crèches.

    Ces garanties sont menacées aujourd’hui par l’embargo venant de Rome et aggravées par la chute de l’immobilier. Sur le mont Titan, on a construit sur le moindre strapontin, l’immobilier étant l’un des réseaux de blanchiment de l’argent sale. Aujourd’hui, on compte au moins 7 000 biens immobiliers vides. “Notre objectif est de sauver l’économie saine”, explique-t-on à la Chambre de commerce. “Sinon, tout va sauter, y compris pour les travailleurs italiens et les entreprises des environs qui réalisent les commandes provenant de Saint-Marin”.

    Il ne reste qu’un seul espoir : la Ligue du nord, qui obtient de nombreux votes chez les travailleurs de la région limitrophe de la République. “Ce sont les seuls qui pourraient ramener le gouvernement italien à la raison”, raconte-t-on à Saint-Marin, rappelant que le ministre italien de l’Economie, Giulio Tremonti, a autrefois été conseiller des banques de Saint-Marin…


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